Le Temps

Verdict contrasté pour l’inceste fraternel

Le prévenu est condamné pour avoir abusé de sa petite soeur alors qu’elle était incapable de résistance. Il obtient par contre son acquitteme­nt s’agissant des violences sexuelles dont l’accusait son ex-copine

- FA. M.

Cette maison familiale, imprégnée d’orthodoxie religieuse, a bien été le théâtre d’un inceste fraternel. C’est ce que retient le Tribunal correction­nel genevois. Le verdict, rendu hier au lendemain d’une audience particuliè­rement intense, souligne que le prévenu, 22 ans à l’époque des faits, a entretenu une relation sexuelle avec sa jeune soeur mineure, alors que cette dernière était trop dans les vapes pour pouvoir résister. Le jeune homme avait lui aussi beaucoup bu et pris de l’ecstasy, sans quoi il n’aurait jamais commis un tel acte. Mis au bénéfice d’une responsabi­lité restreinte, malgré une expertise retenant «de manière insoutenab­le» que son état d’intoxicati­on n’est pas établi, il écope d’une peine de 2 ans de prison avec sursis.

Cette affaire comportait un autre volet qui n’a pas emporté la conviction des juges. Le prévenu était aussi accusé d’avoir violé et contraint son ex-copine à des fellations durant leur relation, tout en la maintenant sous emprise et dans la crainte de représaill­es. Des abus totalement contestés. Sans remettre en question la grande souffrance et la sincérité de la plaignante, le tribunal estime ne pas disposer d’éléments objectifs suffisants permettant de confirmer la version de la jeune femme. Sa mémoire altérée et sa volonté de tout oublier «rendent plus difficile» l’établissem­ent des faits.

Doute insurmonta­ble

A ce propos, les juges rappellent que la présomptio­n d’innocence exige un niveau de preuve très élevé qui ne saurait en aucun cas être abaissé s’agissant d’infraction­s de nature sexuelle. Suivant la défense dans son argumentai­re, le verdict relève qu’un traumatism­e postérieur ne saurait prouver à lui tout seul des faits antérieurs. Pour rechercher des éléments concomitan­ts aux actes reprochés, et à défaut de témoins ou de confidence­s, le tribunal s’est plongé dans les messages permettant de suivre ce couple au quotidien. Il n’a trouvé aucun élément, ni aucune allusion à un acte mal vécu, à des pressions ou à des menaces. A l’inverse, les juges constatent des discussion­s diverses et variées, et même très crues à l’initiative de la plaignante.

«Cela ne signifie pas qu’elle a menti, mais une simple possibilit­é est insuffisan­te en droit pénal.» N’étant pas en mesure d’écarter ce doute sérieux et de se forger une intime conviction de culpabilit­é, le tribunal a donc acquitté le jeune homme de toutes les accusation­s relatives à son ex-compagne. En réponse au réquisitoi­re du parquet, la décision ajoute qu’on ne saurait extrapoler d’un événement unique (l’acte d’ordre sexuel sur sa soeur et l’inceste) pour appuyer un autre cas, sachant que l’expertise psychiatri­que ne conclut à aucune perversion sexuelle ou personnali­té antisocial­e. Les parties peuvent faire appel.

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