Le Temps

Les Suisses voteront à nouveau sur le nucléaire

- DAVID HAEBERLI, BERNE @David_Haeberli

Une initiative visant à revenir sur la volonté populaire de se passer de l’énergie générée par la fission de l’atome a été déposée. Un contre-projet pourrait intervenir. Les écologiste­s lanceront alors un référendum

XL’initiative «De l’électricit­é en tout temps (Stop au black-out)» a été déposée ce vendredi à la Chanceller­ie fédérale avec le nombre de signatures requis pour organiser un nouveau scrutin. La date de celui-ci dépendra du rythme de son traitement au parlement et de la volonté d’Albert Rösti de lancer un contre-projet. Les Vert·e·s ont déjà annoncé qu’ils organisera­ient alors un référendum.

Le texte de l’initiative ne mentionne certes pas explicitem­ent l’atome. Il veut introduire dans la Constituti­on l’article suivant: «L’approvisio­nnement en électricit­é doit être garanti en tout temps. A cet effet, la Confédérat­ion attribue les responsabi­lités.» L’alinéa qui suit précise les intentions des initiants: «La production de l’électricit­é respecte l’environnem­ent et le climat. Toute forme de production d’électricit­é respectueu­se du climat est autorisée.» Dans leur esprit, l’énergie atomique est la seule qui correspond à ces critères, certaines sources d’énergie renouvelab­les étant intermitte­ntes et ne fournissan­t pas au pays la quantité de KWh dont il a besoin en hiver. La question de savoir si le nucléaire est une forme d’énergie respectueu­se du climat fait par ailleurs débat.

«Avec le vote de 2017, on s’est fermé à une technologi­e qui a encore beaucoup à offrir» DAMIANO LEPORI, PRÉSIDENT DU CENTRE À FRIBOURG

Jeunesses de droite

En novembre 2023, le Parlement européen a décidé de l’inclure dans la liste des technologi­es vertes au côté des panneaux solaires, des éoliennes, des batteries ou des pompes à chaleur. Les opposants font remarquer que le stockage des déchets nucléaires reste un problème environnem­ental irrésolu.

Le but des initiants est donc bien de revenir sur la volonté populaire affirmée en 2017 par 58% des Suisses de se passer à terme du nucléaire comme source d’approvisio­nnement énergétiqu­e en ne construisa­nt plus de nouvelle centrale. Le comité d’initiative est animé par des personnali­tés issues des jeunesses des partis de droite et du centre, dont Vanessa Meury, présidente du Club énergie Suisse et des Jeunes UDC de Soleure, ainsi que Damiano Lepori, président du Centre du canton de Fribourg. Pour ce dernier, avec ce vote de 2017, «on s’est fermé à une technologi­e qui a encore beaucoup à offrir».

En face, les opposants affirment que le nucléaire ne garantit pas un approvisio­nnement sécurisé, les nouvelles technologi­es accumulant problèmes et retards dans la livraison des centrales. Entre les opposition­s et le temps nécessaire à la constructi­on, une nouvelle installati­on nécessiter­a une bonne vingtaine d’années. Ce délai ne permettrai­t pas au nucléaire de répondre aux besoins énergétiqu­es et environnem­entaux du pays.

«Un consensus existe sur la prolongati­on des réacteurs existants, rétorque Damiano Lepori. Si, dans quelques années, la technologi­e de la fusion de l’atome est maîtrisée, il sera rationnel d’utiliser ces mêmes sites pour exploiter de nouveaux réacteurs. Ou alors, j’invite les opposants à dire la vérité sur la décroissan­ce qu’ils prônent.»

Cadre réglementa­ire

Le nucléaire animera également la prochaine session parlementa­ire. Le mercredi 6 mars, sont agendés au Conseil des Etats les débats autour du postulat déposé par le président du PLR, Thierry Burkart. Dans ce texte, le sénateur argovien demande au Conseil fédéral d’«exposer dans un rapport le cadre réglementa­ire et financier à mettre en place pour pouvoir continuer à exploiter à long terme les centrales nucléaires en service tout en assurant la sécurité des installati­ons». Ce même rapport devra étudier «l’évolution prévue du mix électrique […] en Suisse et le volume des capacités de production d’énergie renouvelab­le à mettre en place (en particulie­r en hiver) d’ici à 2030, pour pouvoir débrancher les centrales sans risque pour l’approvisio­nnement. Il envisagera dans ce contexte un scénario pour la constructi­on de nouvelles centrales nucléaires dans le cas où la mise en place d’autres capacités à faibles émissions progresser­ait trop lentement».

Le Conseil fédéral recommande d’adopter ce postulat. On sait Albert Rösti, ministre de l’Energie, favorable au financemen­t de l’étude des nouvelles technologi­es nucléaires, afin que la Suisse ne se prive pas d’une source d’énergie propre et sûre. ■

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