Plus que jamais, l’amour du voyage passe par l’estomac
Le tourisme culinaire connaît un joli boom depuis plusieurs années. Explications et conseils pour réussir son prochain «food trip» à Rome ou à Mexico…
Visiter un atelier artisanal de fabrication de miso et déguster sa production sur place, avant d’être accueilli dans une ferme produisant du wasabi, du côté de Takayama. Flâner sur le marché étincelant, coloré, parfumé de Nishiki, à Kyoto, parmi les étals de poissons, d’algues et autres légumes marinés, avant de croquer quelque irrésistible wagashi (pâtisseries traditionnelles), s’initier à l’art complexe du kaiseki ou encore aux mystères du saké… Telles sont quelques-unes des activités proposées par le voyagiste Fert, qui a fait de la découverte culinaire l’une de ses spécialités depuis une quinzaine d’années.
Quel que soit le groupe, l’individu, le couple ou la famille, la nourriture est une des activités les plus fédératrices, note Christophe Dubouchet, responsable groupes et événementiel au sein de l’agence genevoise. Manger et boire, voilà qui rassemble, fait tomber les barrières et parle à tout le monde.
C’est aussi, indéniablement, une des meilleures manières de découvrir une culture, de s’en imprégner, d’aller à la rencontre de l’altérité. Le tourisme culinaire (ou gourmand, ou encore gastronomique) recouvre une diversité presque infinie de propositions et de destinations: il connaît depuis peu un boom considérable. Partie intégrante de l’offre culturelle d’un lieu, les traditions gourmandes sont aussi un élément fortement identitaire, comme l’ont bien compris les Etats qui les font inscrire au patrimoine
Les Suisses seraient particulièrement curieux sur ce terrain, très intéressés par la qualité de la nourriture, désireux de s’ouvrir par ce biais à d’autres cultures
culturel immatériel – à l’instar de la France, de l’Italie ou du Mexique. Mais cet intérêt est évidemment bien plus ancien, certains le faisant remonter aux caravanes des Sumériens il y a quelque 4000 ans.
Passion suisse
On devrait toutefois la définition contemporaine du Culinary Tourism à Erik Wolf: ce pionnier est à l’origine de la World Food Travel Association, en 2003, qui scrute ce marché, élabore des scénarios pour ses acteurs et décerne des labels aux plus originaux ou exemplaires d’entre eux. Les destinations du moment? Les plus demandées sont le Japon et la Thaïlande, le Mexique et le Pérou, constate Christophe Dubouchet. L’Afrique a aussi beaucoup à offrir même si elle reste un peu en retrait sur ce terrain et que les régions européennes (emmenées par le trio Italie-France-Espagne) les plus proches regorgent de valeurs sûres ou montantes, telle la Slovénie.
Les Suisses seraient particulièrement curieux, très intéressés par la qualité de la nourriture, désireux de s’ouvrir par ce biais à d’autres cultures, note le spécialiste, à la différence d’autres clientèles, plus frileuses et moins enclines à la découverte. L’envie d’expériences gourmandes est une des premières motivations pour boucler sa valise, intéressant plus de 53% des touristes, affirme encore la World Food Travel Association.
A partir de là, les possibilités sont innombrables: arpenter les marchés avec un chef et passer ensuite en cuisine. Cuisiner et manger avec des habitants du lieu, apprendre à confectionner un plat, rencontrer des producteurs, artisans, paysans, pêcheurs, vignerons, prendre part à un festival ou un événement autour d’une spécialité, découvrir un quartier via ses adresses, bars ou restos emblématiques. La liste n’est pas exhaustive et il faut y ajouter notamment – désolée pour les formules rarement ou approximativement traduites – les food tours, les food trails ou encore le food surfing, voire le social dining que proposent des plateformes telles Eatwith ou Travelingspoon.
Le fil rouge qui relie ces propositions? Les notions d’expérience et de rencontre: préparer un repas et le déguster avec une famille d’accueil vietnamienne ou participer à la récolte des olives et à la fabrication de l’huile dans une finca andalouse l’illustrent bien.
Les vignobles aussi
Les voyagistes ne sont toutefois pas seuls à faire fructifier cet intérêt. Depuis longtemps, les routes des vignobles mettent en lumière les crus d’Afrique du Sud ou d’Argentine, les vins hongrois, espagnols ou portugais. Les stations de ski et balnéaires mettent sur pied des festivals gastronomiques, à l’instar de Saint-Moritz ou du Tessin. Et il faut citer les structures hôtelières de luxe – du Waldorf Astoria au groupe Anantara – qui en ont bien compris tout le potentiel. Ces dernières proposent ainsi à leurs hôtes une immersion dans le Trastevere romain à la recherche des meilleures pizzas ou une balade à travers les limonaie de la Côte amalfitaine. Voire une visite guidée à travers les champs d’agave d’Oaxaca, au Mexique, suivie d’un atelier distillation permettant de rapporter son petit flacon de mezcal ô combien pittoresque, sans oublier le sel d’insectes pour faire le malin…
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