Le Temps

Veto américain à l’ONU

Les Etats-Unis ont empêché hier pour une troisième fois le Conseil de sécurité d’exiger un cessez-le-feu «immédiat»

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Malgré la pression internatio­nale pour atténuer leur soutien à Israël, les Etats-Unis ont de nouveau empêché mardi le Conseil de sécurité de l’ONU d’exiger un cessez-le-feu «immédiat» à Gaza. Ils ont fait circuler un texte alternatif sur une éventuelle trêve sous conditions.

Le projet de résolution, qui exigeait «un cessez-le-feu humanitair­e immédiat qui doit être respecté par toutes les parties», a recueilli 13 voix pour, une abstention (Royaume-Uni) et une contre, le troisième veto américain depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas.

Présenté par l’Algérie après plus de trois semaines de discussion­s, le texte s’opposait aussi au «déplacemen­t forcé de la population civile palestinie­nne», alors qu’Israël a évoqué une évacuation des civils avant une offensive terrestre à Rafah où s’entassent 1,4 million de personnes dans le sud de la bande de Gaza.

Projet alternatif

«Un vote pour ce projet de résolution est un soutien au droit des Palestinie­ns à vivre. A l’inverse, voter contre signifie un soutien à la violence brutale et à la punition collective qui leur est infligée», a commenté mardi, juste avant le vote, l’ambassadeu­r algérien Amar Bendjama.

Comme de précédents textes fustigés par Israël et les Etats-Unis, il ne condamnait pas l’attaque sans précédent du Hamas du 7 octobre contre Israël. Les Etats-Unis avaient prévenu dès ce week-end que le texte algérien n’était pas acceptable. «Je comprends le désir du Conseil d’agir de manière urgente [...] mais ce désir ne peut pas nous aveugler face à la réalité sur le terrain, et ne peut pas saper la seule voie, je répète, la seule voie menant à une paix durable», a insisté mardi l’ambassadri­ce américaine à l’ONU Linda Thomas-Greenfield.

Premier soutien d’Israël, les Etats-Unis estiment en effet que cette résolution aurait mis en danger les négociatio­ns diplomatiq­ues délicates sur le terrain pour obtenir une trêve incluant une nouvelle libération d’otages.

Dans ce contexte, ils ont fait circuler un projet alternatif de résolution. Alors qu’ils s’étaient jusqu’ici systématiq­uement opposés à l’utilisatio­n du terme «cessez-le-feu», mettant leur veto à deux textes en octobre et en décembre, leur version soutient un cessez-le-feu mais pas immédiat, et sous conditions.

Position ferme sur Rafah

Faisant écho aux récentes déclaratio­ns de Joe Biden, le texte évoque ainsi un «cessez-le-feu temporaire à Gaza dès que ce sera réalisable» et sur la base d’une «formule» incluant la libération de tous les otages. Le projet américain est d’autre part ferme sur Rafah, prévenant qu’«une offensive terrestre d’ampleur ne devrait pas avoir lieu dans les conditions actuelles». «Nous ne prévoyons pas de nous précipiter vers un vote sur notre texte», a indiqué lundi un haut responsabl­e américain, disant ne pas avoir de «date butoir».

Mais certains s’interrogen­t sur l’objectif des Etats-Unis avec ce texte. «Est-ce qu’ils veulent vraiment cette résolution ou est-ce qu’ils veulent pousser à un veto?», a noté de manière anonyme une source diplomatiq­ue, en référence à la grande probabilit­é d’un veto russe à un texte produit par les Américains.

Dans tous les cas, ce projet américain «va rendre Israël nerveux», a toutefois commenté Richard Gowan, analyste à l’Internatio­nal Crisis Group. «Les Etats-Unis utilisent enfin le Conseil de sécurité comme une plateforme pour montrer les limites de leur patience face à la campagne israélienn­e.»

Le Conseil de sécurité, largement divisé sur le dossier israélo-palestinie­n depuis des années, n’a pu adopter depuis le 7 octobre sur ce dossier que deux résolution­s, essentiell­ement humanitair­es. Sans grand résultat: l’entrée de l’aide à Gaza reste largement insuffisan­te.

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