Le Temps

Les Genevois ont un choix écologique à faire

Dimanche prochain, trois possibilit­és s’offrent aux votants: diviser par deux la taxation des véhicules, comme le demande l’initiative de l’UDC, opter pour le contre-projet qui tient compte des enjeux climatique­s, ou choisir le statu quo

- MARC GUÉNIAT

Les trois choix soumis dimanche 3 mars aux Genevois en matière de taxation des véhicules sont au fond assez simples. Ils peuvent accepter sans fioriture l’initiative de l’UDC qui réduirait de moitié l’impôt sur les véhicules et produirait une baisse des recettes de l’Etat à hauteur de 59,7 millions de francs par année. Ou alors opter pour le contre-projet élaboré par la majorité du Grand Conseil, qui tient compte des enjeux écologique­s et serait fiscalemen­t neutre. Ou enfin, tout refuser et maintenir le système actuel, jugé obsolète par le parlement et le Conseil d’Etat.

A l’UDC de dégainer la première, puisque c’est elle qui a lancé ce débat. Dans son argumentai­re, le parti dit vouloir «redonner du pouvoir d’achat» aux Genevois. Par ailleurs, un lien, qui ne saute pas aux yeux, est établi entre la fiscalité des véhicules et «les préjudices résultant de la réalisatio­n de chicanes […] absurdes ayant pour seul objectif de rendre excessivem­ent difficile l’utilisatio­n des transports individuel­s motorisés». En résumé, «circuler à Genève est devenu un casse-tête qui coûte trop cher».

Porsche ou Fiat?

Alors, quel est ce lien? Pour le député UDC Michael Andersen, il réside dans les embouteill­ages résultant de la «guerre des transports»: «Quand on paie une taxe élevée, on s’attend à pouvoir rouler correcteme­nt.» Et qu’importe si cet impôt n’est pas affecté, en ce sens qu’il alimente la caisse générale de l’Etat et non un fonds dédié à l’entretien des routes. Il faut aussi considérer le fait, plaide-t-il, que tout le monde n’est pas en mesure de circuler à vélo et que des pans entiers du canton sont «délaissés» par les transports publics.

Quid du contre-projet, qui tient compte des enjeux climatique­s? Il serait «socialemen­t désastreux», estime Michael Andersen, puisque, comme l’a montré la Tribune de Genève, il favorise la Porsche Cayenne hybride (-84%) et pénalise la Fiat 500 hybride (+43%). Lequel conclut: «Quand le PLR et Le Centre se mettent d’accord avec les socialiste­s et Les Vert·e·s sur la fiscalité, c’est qu’il y a un problème.»

«Quand le MCG et l’UDC se mettent d’accord, c’est que le projet est populiste et passéiste», réplique Thomas Wenger, du Parti socialiste, qui explique: «L’initiative rase gratis et incite les gens à rouler davantage. En clair, elle provoquera plus de bouchons et plus de pollution.» Le Conseil d’Etat est du même avis: il pense que la diminution de moitié de la taxation ne poussera pas les propriétai­res à remplacer les véhicules les plus polluants. Ce serait donc une perte de recettes fiscales «sans aucun bienfait environnem­ental».

Un «effet de bord»

Favoriser la Porsche au détriment de la Fiat? Le député reconnaît quelques «effets de bord». Tout comme le Conseil d’Etat, selon qui le nouveau système renchérit la taxation des voitures peu puissantes mais très polluantes. Par ailleurs, le législateu­r a voulu éviter de trop taxer les grosses cylindrées, les protégeant contre la «sur-exponentia­lité» du système actuel, de la même façon que le bouclier fiscal limite l’ardoise des très hauts revenus. «Globalemen­t, le contre-projet est équilibré, réaliste et intelligen­t», assure Thomas Wenger. Il résulte d’un compromis rassemblan­t les quatre partis gouverneme­ntaux ainsi que le TCS et l’ATE.

«Quand le PLR et Le Centre se mettent d’accord avec les socialiste­s et Les Vert·e·s sur la fiscalité, c’est qu’il y a un problème» MICHAEL ANDERSEN, DÉPUTÉ AU GRAND CONSEIL

Concrèteme­nt, chaque véhicule est soumis à une taxe de base de 120 francs. Pour les voitures thermiques et hybrides s’y ajoute un impôt complément­aire basé sur les émissions de CO2 et progressif. Les véhicules électrique­s ou à hydrogène sont, eux, taxés sur le poids à vide, avec une progressio­n favorisant la détention les plus légers. Les artisans de la loi envisagent une stabilité des recettes fiscales à moyen terme, en partant du principe que 40% du parc de véhicules sera électrifié d’ici à 2030. Autrement dit, il se pourrait bien que l’UDC ait raison en affirmant que le contre-projet accroît, à court terme, les rentrées fiscales.

Si l’initiative et son contre-projet sont refusés, le statu quo prévaut. Il prévoit une taxation progressiv­e en fonction de la puissance du moteur et des émissions de CO2 pour les voitures de tourisme. Actuelleme­nt, la fiscalité genevoise se situe dans la moyenne suisse. ■

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