Les marchés immobiliers chinois et américain font leur brushing
Depuis des mois, des prophètes de mauvais augure annoncent une future catastrophe immobilière. En particulier dans le commercial aux EtatsUnis et dans le résidentiel en Chine. Un état des lieux attentif s'impose
«Quand votre coiffeur vous fait une recommandation boursière, vendez cette action!» Ce vieux dicton financier pourrait presque s’appliquer aux prédictions immobilières. En tout cas, pour ce qui concerne l’immobilier commercial américain. En fait, si le grand public commence à s’y intéresser, c’est que la possible crise est déjà passée ou, à tout le moins, est sous contrôle.
Un marché américain plus sûr qu'il n'y paraît
Un premier constat: même si, à la suite de la défaillance des petites banques régionales, des craintes sont forcément nées, dans l’ensemble, les banques américaines ne sont pas particulièrement vulnérables à l’immobilier commercial. Surtout si l’on compare la situation actuelle aux périodes de stress financier passées.
Les risques sont plus ou moins concentrés sur le marché des bureaux dans les villes. Le taux moyen de vacance sur l’ensemble du pays est légèrement inférieur à 20%. Mais il diffère beaucoup d’une cité à l’autre. Les volumes inoccupés les plus importants sont situés à New York et à San Francisco.
Dans la Grosse Pomme, on a notamment vu force constructions importantes lancées par des investisseurs qui y cherchaient avant tout une échappée fiscale. En clair, ces propriétaires ne sont pas – en priorité – préoccupés par le rendement. Même avec une moitié de locaux vacants, ils n’ont pas de souci de liquidités, mais seulement un problème de valorisation. Comme ce sont souvent des complexes importants, ils sont trop grands pour qu’on envisage de les démolir. Et leurs investisseurs se satisfont de rendements même moyens. Concrètement, le risque est faible de ce côté-là. En revanche, ces bureaux disponibles font pression sur le marché local et empêchent de vraies hausses sur les autres locaux.
Néanmoins, les fondamentaux restent positifs. A New York, le marché commence déjà à se détendre dans la Midtown Manhattan compte tenu du fait que de petits immeubles commerciaux sont progressivement en train d’être transformés en logements résidentiels.
Dans la plupart des autres pays développés, les marchés de bureaux affichent des taux d’inoccupation inférieurs à 10% en moyenne. La plupart des villes d’Europe ou d’Asie – à quelques exceptions près qui n’affectent pas matériellement les banques et qui, de surcroît, sont déjà bien connues – offrent des taux de vacance d’environ 5%, voire moins. En résumé, les marchés de bureaux bénéficient d’une croissance des loyers, même si les divergences fondées sur la qualité restent toujours à considérer.
Par ailleurs, les autres secteurs immobiliers, comme les locaux industriels et logistiques, le résidentiel ou même le commerce de détail et d’autres niches, ont des fondamentaux sains et bénéficient d’une croissance des loyers en raison d’une pénurie générale de l’offre.
Craintes très particulières, mais pas systémiques
En clair, les mauvaises nouvelles récentes concernant les banques américaines sont plutôt idiosyncrasiques et non systémiques. Les établissements font preuve d’une très grande transparence quant à leur exposition à l’immobilier. Dès lors, tant les régulateurs que les investisseurs du monde entier sont bien conscients des risques et devraient déjà les avoir intégrés.
On sera plus circonspect sur la Chine où la privatisation des logements urbains, initiée en 1998 par l’introduction de droits de propriété, a engendré une sorte de frénésie dans l’activité de construction. Avec des prix des logements et un marché du financement des nouveaux immeubles en hausse constante.
Quelques ombres sur la Chine
Aujourd’hui, malgré des signes visibles de ralentissement, l’activité et les niveaux de prix restent encore trop élevés. Malgré les baisses et la forte correction enregistrées, les effets de levier et les déséquilibres entre offre et demande demeurent excessifs. L’atterrissage devrait toutefois s’effectuer cette année encore, au terme de ce cycle de baisse.
Le ralentissement a été brutal, mais l’effondrement devrait être évité. C’est d’ailleurs plus l’économie chinoise qui a trinqué, que l’économie mondiale. En outre, le marché immobilier chinois est toujours largement contrôlé et réglementé par le gouvernement: un krach tel que ceux observés dans une économie de marché typique est tout à fait improbable. Au contraire, le marché chinois pourrait, ces prochains mois, offrir de nouvelles opportunités d’investissements. A condition d’être très sélectif!
En conclusion: chez votre coiffeur, demandez une coupe de cheveux plutôt qu’un conseil boursier.
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