«Un gouvernement de coalition avec le Hamas serait boycotté»
Le chef de la diplomatie palestinienne Riyad al-Maliki s’est exprimé hier devant le Conseil des droits de l’homme de l’ONU à Genève. Il ne s’attend pas à des miracles de la réunion intra-palestinienne prévue à Moscou. Mais il appelle à soutenir un gouvern
Alors que les Américains, certains Etats européens et arabes parlent de la nécessité de revitalisation de l’Autorité palestinienne, la récente démission du premier ministre, Mohammad Shtayyeh, pourrait être l’occasion à saisir. Venu mercredi s’adresser au Conseil des droits de l’homme de l’ONU, le chef de la diplomatie palestinienne, Riyad al-Maliki, a rencontré des journalistes de l’Acanu, l’association des correspondants du Palais des Nations.
«Il est faux de dire que le Hamas contrôlait tout»
Il le souligne: «Nous essayons de comprendre ce que ce concept de revitalisation implique. Pour qu’un nouveau gouvernement puisse agir, il faut toutefois que des changements interviennent sur le terrain. Avec l’occupation, l’Autorité palestinienne est dans l’incapacité de vraiment gouverner.» A l’aube d’une rencontre intra-palestinienne orchestrée par la Russie qui doit se tenir du 29 février au 2 mars à Moscou, Riyad al-Maliki met en garde: «Nous ne nous attendons pas à un miracle de Moscou.»
Mais pour le chef de la diplomatie, il est hors de question de former un gouvernement de coalition avec le Hamas. Il serait immédiatement boycotté et ce n’est pas ce que nous souhaitons. Nous voulons coopérer pleinement avec la communauté internationale. Nous avons besoin d’un gouvernement technique.» Si le premier ministre palestinien a démissionné, c’est pour «ne pas apparaître comme un obstacle» dans la revitalisation de l’Autorité palestinienne.
Le contexte demeure délétère, les opérations israéliennes à Gaza étant toujours en cours. Pour Riyad al-Maliki, il ne fait aucun doute que le futur gouvernement palestinien devra gouverner non seulement en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, mais aussi dans la bande de Gaza. Bien qu’il appelle la prise de contrôle de Gaza par le Hamas un «coup d’Etat militaire», le ministre réfute le discours selon lequel l’Autorité palestinienne aurait été complètement absente de l’enclave: «Nous avons toujours été à Gaza; 40% du budget de l’Autorité palestinienne y étaient consacrés. Nous avons aussi payé 60 000 fonctionnaires, émis des passeports, investi dans des infrastructures. Il est faux de dire que le Hamas contrôlait tout.» Les responsables de l’Autorité palestinienne admettent qu’il est difficile d’avoir le moindre contact avec le Hamas. Riyad al-Maliki espère simplement que le mouvement islamiste montre de la compréhension pour un futur gouvernement technique.
La situation n’évoluera toutefois pas tant qu’il n’y aura pas de cessez-le-feu entre Israël et le Hamas. Une perspective qui paraît encore lointaine. Le ministre des Affaires étrangères nourrit néanmoins des espoirs pour la suite. Avec un nouveau gouvernement, dit-il, il pourrait y avoir une grande conférence internationale pour élaborer un «plan Marshall» pour reconstruire Gaza et des pourparlers pour développer un vrai plan sécuritaire où il n’y aurait aucun soldat israélien tant à Gaza qu’en Cisjordanie.
Gaza inhabitable
Riyad al-Maliki convient néanmoins que des questions plus pressantes le préoccupent. «Benyamin Netanyahou [premier ministre israélien, ndlr] a des objectifs de guerre inavoués, analyse le chef de la diplomatie palestinienne. Il veut continuer la guerre et rendre Gaza inhabitable. Il est en train de réussir. Il a déjà forcé les Gazaouis à évacuer le nord pour se rendre au sud de Gaza. Il veut transformer le nord en une zone tampon et enfin il souhaite chasser tous les Gazaouis vers le Sinaï égyptien. Sa méthode? Il utilise une nouvelle arme contre les civils palestiniens: il les prive d’eau, de nourriture, de médicaments et d’aide humanitaire. Ils n’auront bientôt plus le choix: ils devront quitter pour survivre.»
La moribonde solution à deux Etats que certains essaient malgré tout de raviver reste pour Riyad al-Maliki la seule manière de trouver une issue à un conflit qui déchire le Proche-Orient depuis trois quarts de siècle. Et un Etat binational comme l’appelle de ses voeux l’historien israélien Shlomo Sand? «Ce n’est pas envisageable. Les Arabes israéliens sont déjà des citoyens de seconde zone. Même majoritaires, les Palestiniens aurontils des droits égaux à ceux des Israéliens? J’en doute.»
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