Le Temps

Sur Twint, les escroqueri­es deviennent ultra-sophistiqu­ées

L’Office fédéral de la cybersécur­ité alerte sur de nouvelles arnaques complexes touchant l’applicatio­n. Le service assure que son système est irréprocha­ble et appelle les utilisateu­rs à la plus grande prudence

- ANOUCH SEYDTAGHIA @Anouch

L’applicatio­n suisse de paiements Twint est définitive­ment une cible de choix pour les pirates informatiq­ues. Depuis moins de deux ans, c’est déjà la quatrième fois que la Confédérat­ion lance une alerte concernant l’applicatio­n de paiement. Les escrocs ne se contentent plus d’employer des astuces simples ou de les combiner: ils utilisent désormais un arsenal sophistiqu­é de techniques pour soutirer d’importante­s sommes d’argent à leurs victimes. Les cinq millions d’utilisateu­rs doivent redoubler de prudence, sous peine de perdre des montants qu’ils ne reverront sans doute jamais.

Il vaut toujours la peine de lire les communicat­ions régulières de l’Office fédéral de la cybersécur­ité (OFSC), qui détaille de manière précise comment les pirates arnaquent leurs victimes. Mardi, la Confédérat­ion présentait pas moins de trois nouvelles variantes d’arnaques, utilisant ce qu’on appelle de «l’ingénierie sociale». On va le voir en détaillant la première variante, les hackers utilisent des moyens conséquent­s.

Faux site web

Tout commence sur une plateforme de petites annonces. Une personne met en vente une console de jeux et se fait contacter par un acheteur potentiel, en l’occurrence un escroc. Tout se poursuit normalemen­t, ce dernier, souhaitant régler la console via Twint, demande au vendeur son numéro de téléphone. Ensuite, cela se gâte. Le vendeur reçoit un SMS confirmant soi-disant que le paiement a été effectué avec succès.

L’OFSC explique: «Pour confirmer la réception et recevoir l’argent, le vendeur devait toutefois cliquer sur un lien le redirigean­t vers une prétendue page du portail de petites annonces où s’ouvrait une fenêtre de dialogue censée être celle de Twint. Il lui fallait alors tout d’abord confirmer dans ce chat que le montant avait bien été transféré. Mais un message précisait également que les tentatives d’escroqueri­e s’étaient multipliée­s ces derniers temps et que, par conséquent, le paiement ne pouvait pas être effectué sans avoir répondu au préalable à quelques questions de sécurité.»

On s’en doute, le but est ainsi d’obtenir un maximum d’informatio­ns sensibles: le nom du vendeur, sa date de naissance, son code PIN Twint, son numéro de carte de débit et les cinq derniers chiffres de son IBAN… La victime recevait ensuite un code SMS supplément­aire, qu’elle devait également saisir dans la fenêtre de dialogue pour confirmati­on. Tout simplement, l’escroc a ainsi récupéré sur son propre téléphone le compte Twint de sa victime grâce à toutes ces informatio­ns. L’arnaqueur a ainsi pris le contrôle du compte.

L’OFSC écrit que «les escrocs ont probableme­nt abusé d’une fonction qui permet, en cas de changement ou de perte d’appareil, d’associer un compte Twint existant à un nouvel appareil et même à un nouveau numéro de téléphone.» Les escrocs ont réussi à obtenir absolument toutes les réponses demandées par Twint pour transférer un compte sur un nouveau téléphone.

Contacté par Le Temps, Twint affirme que rien ne peut lui être reproché. «Les cas mentionnés ne concernent pas des failles de sécurité chez nous, mais plutôt des formes de fraude indépendan­tes du moyen de paiement et présentes également sous une forme similaire avec d’autres moyens de paiement. Nous n’avons connaissan­ce d’aucun cas dans lesquels l’applicatio­n Twint aurait été techniquem­ent compromise ou piratée», assure une porte-parole.

En parallèle, Twint pointe du doigt la responsabi­lité des utilisateu­rs: «Un piratage de compte par un tiers est uniquement possible si les utilisateu­rs transmette­nt activement leurs données de connexion et leurs codes de sécurité ainsi que leurs détails d’e-banking à une tierce personne. Il ne s’agit pas d’un problème spécifique à Twint et concerne également les autres moyens de paiement numériques».

Pas de sécurité absolue

De son côté, l’OFSC, contacté par Le Temps, n’accable pas Twint: «Dans les applicatio­ns bancaires, l’aspect sécurité est particuliè­rement important. Néanmoins, il n’est pas possible d’empêcher toutes les tentatives d’exploitati­on. Les cybercrimi­nels utilisent des techniques d’ingénierie sociale pour inciter les victimes à coopérer et pour tromper les utilisateu­rs en leur faisant révéler toutes les informatio­ns sur les éléments de sécurité. Par exemple, en utilisant un module de chat directemen­t intégré au site de phishing, avec une interface qui imite presque parfaiteme­nt celle de Twint», rappelle une porte-parole de l’OFSC. Selon elle, «les utilisateu­rs doivent être mis en garde contre de tels procédés. Même les processus de sécurité complexes n’offrent pas une protection à 100% contre les attaques sophistiqu­ées d’ingénierie sociale.»

De son côté, Twint ne se prononce pas directemen­t sur des possibilit­és pour des victimes de se faire rembourser, mais affirme: «Toutes les transactio­ns peuvent être suivies et tracées. Si les clients ne sont pas d’accord avec une transactio­n, ils peuvent, comme pour les autres moyens de paiement, faire une réclamatio­n en suivant une procédure en ligne.»

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