Le Temps

Peter Kernel en concert à Nyon, à l’origine était le rythme

Le duo canado-tessinois présente ce soir, dans le cadre des Hivernales, l’album «Drum To Death», composé à partir de sons enregistré­s par 11 batteurs et batteuses différents

- STÉPHANE GOBBO @stephgobbo Drum To Death,

Eeoo… Une onomatopée comme un appel à la transe. Eeoo est le premier titre de Drum To Death, nouvel album de Peter Kernel, un duo canado-tessinois qui écume les scènes depuis une bonne quinzaine d’années. Loin de son tropisme punk rock, ce morceau entremêle blues touareg et transe chamanique, porté par une étonnante mélodie percussive imaginée par le Tessinois Giacomo Bastianell­i (Tam Bor), et qui lui préexistai­t. Drum To Death est en effet un album concept né de l’envie de Barbara Lehnhoff et Aris Bassetti de demander à des batteurs des rythmes à partir desquels ils ont ensuite élaboré des chansons.

«On a eu cette idée durant le premier confinemen­t de 2020, lorsqu’on devait rester à la maison, confie Barbara Lehnhoff. Comme le live nous manquait énormément, on a eu envie de travailler à partir de quelque chose qui nous donnait le sentiment d’être vivants. Et pour nous, la batterie est comme un coeur qui bat.» C’est ainsi que le duo décide de lancer un appel à 11 batteurs. «Il y en a plusieurs avec lesquels on avait envie de travailler, comme par exemple Julian Sartorius, mais ça ne fonctionna­it jamais car ils sont souvent sur la route.»

La pandémie comme déclencheu­r

La pandémie aura donc servi de déclencheu­r à ce projet atypique prenant aujourd’hui la forme d’un album singulier, explorant de multiples pistes musicales sur lesquels Peter Kernel ne s’était guère aventuré. «Les invités ont été libres de nous proposer ce qu’ils voulaient. Mais en même temps, si tu donnes une liberté totale à un batteur, il va créer les rythmes les plus improbable­s, rigole Barbara Lehnohff. Bernard Trontin [The Young Gods] nous a par exemple envoyé un beat sur 8-9 temps sur lequel personne ne peut jouer!» Au final, le morceau qui en résulte (Amen) pose une voix aérienne évoquant Thom Yorke sur un mille-feuille technoïde à base de guitare, synthé et – donc – batterie.

«Trop physique à jouer»

Le reste est à l’avenant, surprenant et hypnotique, avec notamment parmi les invités les Genevoises Simone Aubert (Hyperculte) et Beatrice Graf ou l’Américain Kevin Shea, figure de l’avant-garde jazz. «Pour certains morceaux, on a enregistré cinq-six versions différente­s avant de trouver quelque chose qui fonctionne vraiment, poursuit celle qui a grandi en Ontario. Mais on a vraiment toujours gardé ce que les batteurs nous avaient envoyé, sans rien changer.»

Ne pensant jamais porter Drum To Death sur scène, Barbara et Aris ne se sont mis aucune limite, utilisant notamment beaucoup de synthétise­urs.

Mais voici que le projet est dorénavant joué live. Collaborat­eur régulier de Peter Kernel, le batteur jazz Hannes Prisi s’est parfaiteme­nt approprié les morceaux, pour des shows également composés d’anciens titres du duo. «On a construit un set très punk et puissant sans se rendre compte qu’il serait trop physique à jouer, alors qu’on devient un peu vieux», s’amuse Barbara Lehnhoff, qui tourne en parallèle Lullabies, nouvel album de Camilla Sparksss, son projet solo.

(On the Camper Record), Peter Kernel. En concert aujourd’hui à Nyon (La Parenthèse, 22h30) dans le cadre du festival Les Hivernales, qui se déroule jusqu’au 3 mars. Puis le 15 mars à Saignelégi­er (Festival des vieilles barriques).

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