«En 24 ans, la BCGE a compensé le coût de son sauvetage»
En faillite virtuelle lorsque l’Etat l’a renflouée à la fin des années 1990, la Banque cantonale de Genève vaut actuellement 2 milliards. De quoi compenser le dommage infligé aux finances publiques à l’époque, estime le directeur Blaise Goetschin, qui pre
L’heure était aux bilans, hier à la Banque cantonale de Genève (BCGE), avec les derniers résultats annuels présentés par Blaise Goetschin. Après vingt-quatre ans à la tête de la Banque cantonale genevoise, le Vaudois entame officiellement aujourd’hui sa retraite professionnelle. Le banquier de 67 ans compte ne pas rester complètement inactif, puisqu’il souhaite siéger dans des conseils d’administration, probablement dans le secteur bancaire – mais pas dans celui de la BCGE, nous a-t-il précisé. Durant ce petit quart de siècle, la BCGE est passée d’un établissement en quasi-faillite, plombé par la crise immobilière, à une banque qui vaut 2 milliards et se distingue de ses consoeurs par sa présence hors de ses frontières.
«On s’intéresse davantage à Singapour qu’à se développer sur Vaud ou ailleurs en Suisse» BLAISE GOETSCHIN, DIRECTEUR DE LA BCGE
«Compenser», «rééquilibrer», plutôt que rembourser
La BCGE a maintenant «pratiquement compensé le dommage subi par l’Etat» à la fin des années 1990, a pointé Blaise Goetschin durant la conférence de presse organisée hier matin. «La banque ne valait alors plus rien et elle affiche maintenant des fonds propres dépassant 2 milliards de francs; cette valeur créée au fil du temps a permis de rééquilibrer la perte de 1,7 milliard de francs qu’avait subie l’Etat de Genève» lors de la déconfiture de la banque à la fin des années 1990, détaille le banquier, qui a choisi ses mots avec soin.
Celui de remboursement n’a jamais été prononcé, hier, pour une bonne raison. En 2018, Ensemble à gauche avait déposé une initiative exigeant que la BCGE rembourse les 3,2 milliards que l’Etat lui avait prêtés dans le cadre de son renflouement. Pour la banque, il ne s’agissait pas d’un prêt mais d’une injection de capitaux par l’Etat en tant qu’actionnaire d’une entreprise en difficulté, sans remboursement prévu. Sa vision a fini par l’emporter devant la justice, l’invalidation de l’initiative au niveau genevois étant confirmée par le Tribunal fédéral en août 2020.
Plutôt qu’avoir été remboursés, résume la BCGE, l’Etat, la ville et les communes genevoises sont donc propriétaires, à 73%, d’une banque qui vaut 2 milliards et qui leur verse des dividendes. Soit un peu moins de 34 millions au total pour 2023 (sur un bénéfice net record de 231 millions, +31% par rapport à 2022), et un total de 317 millions de francs depuis 2000.
L’internationalisation a été un autre élément marquant de son développement depuis 2000. Avec ses 917 emplois (+43 employés l’an dernier), la BCGE réalise un petit quart de son chiffre d’affaires en euro ou en dollar, parce qu’elle finance le commerce de matières premières et les exportations d’entreprises suisses. Sa filiale française, ouverte à Lyon en 1993 et disposant aussi de succursales à Paris, octroie des financements à des entreprises et particuliers tricolores (dans l’immobilier notamment)et génère une dizaine de millions de bénéfices par an, avec 80 collaborateurs et un bilan proche du milliard d’euros.
Plus étonnant, la BCGE compte aussi des présences à Dubaï et Hongkong depuis une quinzaine d’années. Le rôle principal de ces bureaux de représentation, qui emploient chacun trois ou quatre personnes? «Entretenir le contact avec les autorités locales, on a besoin d’être matérialisé sur le terrain sinon on n’existe pas dans ces zones où l’on fait des affaires depuis Genève», détaille Blaise Goetschin, pour qui l’internationalisation a été l’un des sujets les plus importants au sein de la banque durant son mandat.
Ces entités, qui accompagnent aussi des acteurs du commerce des matières premières ou des clients de la gestion de fortune, génèrent suffisamment de revenus pour compenser leurs coûts, sans plus, selon le grand patron.
L’après-Credit Suisse
Et l’avenir? La BCGE se dit prête à reprendre certaines affaires que menait Credit Suisse avec des entreprises suisses, selon ses capacités. Sur ce terrain, la banque genevoise entre en concurrence avec les autres banques cantonales qui se sont déjà positionnées, à commencer par la plus grande d’entre elles, celle de Zurich. La ZKB a ainsi décidé d’étendre sa présence sur le territoire suisse, annonçant notamment l’ouverture d’une succursale dans le canton de Vaud en janvier dernier. Quid de la BCGE, déjà présente à Lausanne, Bâle et Zurich? «On s’intéresse davantage à Singapour qu’à se développer sur Vaud ou ailleurs en Suisse», glisse Blaise Goetschin dans ce qui restera sa 93e et dernière conférence de presse. Son successeur est déjà dans la maison depuis deux mois, Nicolas Krügel, un ancien cadre de Credit Suisse.
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