Le Temps

La Cour des comptes épingle l’Unil

Un audit mené par l’instance de contrôle de l’Etat de Vaud sur l’Université de Lausanne conclut à des manquement­s administra­tifs. La procédure de recrutemen­t des cadres, notamment, n’est pas suffisamme­nt formalisée

- AÏNA SKJELLAUG

L’Université de Lausanne (Unil), financée à hauteur d’environ 50% par la subvention du canton de Vaud, et à 25% par les contributi­ons de la Confédérat­ion et des autres cantons, vient de faire l’objet d’un audit de la Cour des comptes, sur ses activités entre 2019 et 2022, présenté ce jour au grand public.

Au moment de son lancement, l’objectif était de confirmer que l’Unil n’acquiert que les biens et services nécessaire­s à la réalisatio­n de ses prestation­s. Les aspects relevant de la gestion des ressources humaines étaient initialeme­nt exclus de l’audit.

Toutefois, la Cour a jugé utile d’ajouter des procédures complément­aires à l’audit initial sur le processus achat. En effet, à l’issue de l’analyse effectuée sur plusieurs achats, des doutes subsistaie­nt sur le bon usage de l’argent public, notamment sur des mandats de services octroyés pour le recrutemen­t de cadres. Ces éléments recoupaien­t aussi des faits reportés par les signalemen­ts reçus par la Cour.

Le recrutemen­t d’un candidat pour un poste de cadre peut actuelleme­nt se faire sans avoir recours à une commission de recrutemen­t ou à une évaluation externe, faute de règlement contraigna­nt. Le risque existe donc que des décisions d’embauche soient prises sur des bases insuffisan­tes, voire que les engagement­s pris par la direction de l’Unil, comme dans le plan d’intention sur la diversité et la parité femmes-hommes, ne soient pas respectés, avertit l’audit.

Très peu de pouvoir de contrainte

Les pratiques en termes d’entretiens de fin de période d’essai et d’évaluation périodique sont hétérogène­s. Lorsqu’elles sont documentée­s, la qualité formelle et substantie­lle des entretiens, évaluation­s ou fixations d’objectifs ne correspond­ent pas toujours aux standards.

Le service des ressources humaines ne procède à aucune analyse critique des pièces enregistré­es dans le dossier et n’intervient pas.

En l’état actuel, il ne remplit donc pas entièremen­t les missions qui lui sont assignées afin d’assurer la mise en oeuvre des politiques de ressources humaines de l’Unil, en l’absence notamment de contrainte pour les services de faire appel à lui et de son manque de légitimité formelle à imposer des pratiques dans les politiques des ressources humaines auditées.

A ce jour, la position institutio­nnelle du service des ressources humaines n’est pas assez solide, conclut l’audit. Elle n’est pas en mesure d’assurer la qualité des dossiers du personnel, ni la traçabilit­é des pièces essentiell­es, il ne supervise pas non plus les pratiques courantes de gestion des ressources humaines, par exemple en confirmant la bonne organisati­on des entretiens d’évaluation et en procédant à une revue des rapports émis à la suite de ces entretiens. Cela lui permettrai­t, par exemple, d’anticiper et tenter de prévenir d’éventuels problèmes, comme le départ probable d’un cadre ou la survenance d’une crise à l’interne d’un service.

L’audit brandit encore une facture d’un consultant externe pour un montant important en lien avec la réorganisa­tion d’un service de la direction et le soutien fourni pour le recrutemen­t de deux postes de cadres dans ce même service. Le fait d’acquérir de tels services à l’externe, au lieu de faire appel au soutien du service des ressources humaines, questionne.

Toujours des factures papier

Pour un autre service de la direction, un coût de consultant externe sur plusieurs mois a été requis afin de pallier l’absence d’un adjoint, en raison des difficulté­s à recruter un candidat pour ce poste.

Si les frais de personnel représente­nt de loin la charge d’exploitati­on la plus élevée pour l’Unil (plus de 411 millions pour l’année 2022), les achats de biens et services demeurent une dépense importante. Ces derniers se sont élevés à près de 105 millions pour l’année 2022, soit 15% des charges totales selon les comptes annuels publiés.

Or l’Unil ne dispose d’aucun outil informatiq­ue spécifique­ment dédié aux achats. Ce processus offrirait pourtant de larges possibilit­és de dématérial­isation, selon l’audit, avec de nombreux avantages: gain d’efficience dans le traitement des commandes et des factures, simplifica­tion et accélérati­on des procédures, renforceme­nt de la transparen­ce et de la traçabilit­é et sécurité accrue des transactio­ns.

Le traitement des factures fournisseu­rs, y compris leur approbatio­n, repose encore entièremen­t sur la facture papier avec tous les inconvénie­nts que cela implique. Une partie significat­ive de la charge de travail de l’équipe du service financier est constituée de tâches de saisie chronophag­es qui s’effectuent au détriment d’activités à plus forte valeur ajoutée, comme l’analyse et le contrôle, pointe encore le rapport.

La direction de l’Unil n’a pas montré de volonté à ce jour d’instaurer plus de centralisa­tion en matière d’achats, du fait de la grande autonomie laissée aux facultés, déplore encore la Cour des comptes.

Les engagement­s pris par la direction risquent de ne pas être respectés, notamment en termes de parité femmes-hommes

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland