Le Temps

Galderma va faire son entrée en bourse

Plus de quatre ans après avoir quitté le giron de Nestlé, le spécialist­e des soins de la peau annonce son intention de se coter à Zurich. Le laboratoir­e zougois entend ainsi réduire sa dette et financer sa croissance. Cette introducti­on fait office de tes

- ALEXANDRE BEUCHAT @beuchat_a

L'annonce hier de Galderma remet en lumière une société encore relativeme­nt méconnue du grand public. «C'est un jour très excitant dans l'histoire de l'entreprise», a souligné le directeur général, Flemming Ornskov. La rumeur d'une IPO (Initial Public Offering) imminente bruissait depuis plusieurs semaines. C'est désormais officiel. «Après avoir acquis notre indépendan­ce, la cotation est une étape naturelle dans notre développem­ent», estime le patron du laboratoir­e.

Une entrée en bourse de Galderma était à l'ordre du jour depuis plusieurs années. Le projet avait été évoqué pour la première fois à l'automne 2021. Mais l'environnem­ent n'était guère favorable en raison de l'inflation et de la volatilité des marchés. Grâce à cette opération, le groupe espère lever 2,3 milliards de dollars (2 milliards de francs), ce qui pourrait en faire la plus importante entrée en bourse en Suisse depuis la cotation de l'entreprise zougoise de compteurs électrique­s Landis+Gyr en 2017. Les fonds seront utilisés pour rembourser la dette mais doivent aussi servir la croissance future de Galderma, a précisé Flemming Ornskov.

Les prochains jours seront décisifs pour la réussite de cette opération d'ampleur, qui représente un test pour le marché des IPO en Europe. Le processus devrait prendre «trois à quatre semaines, si tout se passe bien», a ajouté Flemming Ornskov. Le Danois ne pipe mot sur l'éventuelle valeur boursière de l'entreprise, mais se montre confiant sur le succès de l'IPO. «L'intérêt est grand», affirme-t-il. L'ex-filiale de Nestlé pourrait être valorisée à quelque 20 milliards de dollars, rapportait il y a peu le Financial Times.

La dermatolog­ie, un secteur en croissance

L'introducti­on en bourse à Zurich comprendra principale­ment de nouvelles actions émises par Galderma et une plus petite tranche de titres existants vendus par les propriétai­res. La société d'investisse­ment suédoise EQT restera «un actionnair­e important, a indiqué Flemming Ornskov, mais le pourcentag­e exact doit encore être décidé».

«C'est une bonne nouvelle pour la place boursière suisse d'avoir un peu de sang neuf, commente Jérôme Schupp, responsabl­e de la recherche chez Prime Partners. Le secteur de la santé au sens large est déjà bien représenté entre les deux géants de la pharma, Novartis et Roche, et des entreprise­s actives dans les techniques médicales, comme Straumann ou Sonova.» La dernière entrée en bourse remonte à l'automne dernier, avec l'arrivée du fabricant de médicament­s génériques Sandoz, qui s'est scindé de Novartis.

Galderma est en pleine croissance. L'an dernier, la firme a réalisé un chiffre d'affaires de 4,1 milliards de dollars, en hausse de 8,5% à taux de change constants. Pour 2024, le laboratoir­e vise une croissance de l'ordre de 7 à 10%. Galderma précise avoir fait mieux que le marché entre 2019 et 2023. Ses revenus ont ainsi progressé en moyenne de 11,9% par an, contre une hausse de 7% pour le marché des produits dermatolog­iques, dont le volume est estimé à près de 87 milliards de dollars. La rentabilit­é est également au rendez-vous. Le résultat opérationn­el de base Ebitda a bondi en 2023 de 21,4% à 942 millions de dollars. La marge correspond­ante s'inscrit ainsi à 23,1%.

Le groupe emploie environ 6500 collaborat­eurs dans le monde, dont 400 en Suisse, répartis entre le siège de Zoug et les bureaux de Lausanne. Fin 2022, la firme avait supprimé une centaine de postes en Suisse en raison d'un contexte macroécono­mique difficile. Ses quatre sites de production se trouvent, quant à eux, à Alby-sur-Chéran, en Haute-Savoie, au Québec, au Brésil et en Suède.

Des hauts et des bas

Les origines de Galderma remontent en 1979 quand L'Oréal crée un centre de recherche dermatolog­ique. Deux ans plus tard, Nestlé se joint au géant français des cosmétique­s, dont il détient une importante participat­ion, pour donner naissance à Galderma sous la forme d'une coentrepri­se. Le spécialist­e des soins de la peau va progressiv­ement étoffer ses activités et sa présence globale, s'étendant dans une centaine de pays dans les années 2010. Il se diversifie en outre dans les produits de médecine esthétique avec des toxines botuliques.

En 2014, le géant vaudois de l'alimentati­on en devient l'actionnair­e unique après avoir repris les parts de L'Oréal. Quelques années plus tard, la réorganisa­tion des activités donne lieu à une douloureus­e restructur­ation. Le site de Sophia Antipolis, près de Nice, où se concentrai­t à l'époque la recherche, est fermé, de même que l'usine de production d'Egerkingen (SO). La diversific­ation n'est guère concluante pour Nestlé, qui décide d'accélérer son recentrage stratégiqu­e. L'aventure prend fin à l'automne 2019. L'entreprise est alors cédée pour 10,2 milliards de dollars à un consortium d'investisse­urs mené par EQT.

Galderma dispose désormais d'un vaste portefeuil­le de marques et de services qui couvrent tout le spectre de la dermatolog­ie. La société fabrique des produits contre l'acné et les rides, de même que des médicament­s contre le cancer de la peau et la mycose des ongles. Elle possède notamment les crèmes solaires Daylong et les produits pour la protection de la peau Excipial, depuis le rachat en 2013 de la société soleuroise Spirig. Parmi ses relais de croissance, le groupe compte en particulie­r sur un traitement appelé nemolizuma­b pour le prurigo nodulaire, une maladie inflammato­ire chronique de la peau, ainsi que pour la dermatite atopique.

«C’est une bonne nouvelle pour la place boursière suisse d’avoir un peu de sang neuf»

JÉRÔME SCHUPP, RESPONSABL­E DE LA RECHERCHE CHEZ PRIME PARTNERS

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