Le Conseil fédéral soigne le dossier européen
Chargé des Affaires étrangères, Ignazio Cassis devrait annoncer en cette fin de semaine que le gouvernement adopte un mandat de négociations avec l’Union européenne. La présidente de la Confédération, Viola Amherd, sera elle-même à Bruxelles pour les lanc
Est-il avisé de dégoupiller une grenade politique en pleine session parlementaire? Ignazio Cassis est attendu ce vendredi devant la presse à Berne pour annoncer l’adoption du mandat de négociations avec l’Union européenne (UE). Le conseiller fédéral chargé des Affaires étrangères doit confirmer ce que la phase de consultation, qui a pris fin à mi-février, a laissé comprendre: les remarques apportées par les parties ne sont pas de nature à faire reculer le gouvernement dans ce dossier jugé crucial pour le pays.
Le Tessinois devrait se présenter flanqué de plusieurs hauts fonctionnaires chargés des négociations avec l’UE, qui pourraient commencer formellement dans la semaine du 18 mars. Il devrait être le seul ministre à s’exprimer, car le Conseil fédéral tient à ne pas donner une importance démesurée à cette annonce, qui est le développement attendu de celle du 15 décembre 2023. Le Conseil fédéral avait clos l’année en présentant un projet de mandat de négociations très détaillé, qui couronnait un long travail de préparation avec les représentants de l’UE, ces derniers ayant consenti à plusieurs concessions.
Ballet diplomatique
Aborder un dossier si sensible alors que le Palais fédéral grouille d’élus et de journalistes pour une semaine encore, c’est risquer de laisser le champ libre à la mauvaise humeur des sceptiques à tout accord avec l’UE, juge une sénatrice. L’UDC, principale opposante à la stratégie du Conseil fédéral, a profité de chaque communication officielle pour répondre avec ses propres points de presse. Ne vaudrait-il pas mieux attendre une semaine que les élus rentrent dans leur canton? Ce n’est pas l’avis de Carlo Sommaruga. Pour le conseiller aux Etats socialiste genevois, il est important de donner le signal que la Confédération ne veut pas perdre de temps: la fenêtre d’opportunité pour conclure un accord est de six à huit mois, les élections européennes provoquant en fin d’année un changement de personnel européen. La dynamique positive lancée avec le projet de mandat ne doit pas retomber, en quelque sorte. C’est également l’avis de Pascal Broulis. Le conseiller aux Etats PLR vaudois ne voit pas de raison d’attendre, alors que le texte est prêt.
Le ballet diplomatique entre la Suisse et l’UE bat d’ailleurs son plein. Didier Reynders, le commissaire européen à la Justice, était en Suisse ce jeudi et a rencontré Beat Jans, chargé du Département fédéral de justice et police, qui était lui-même deux jours à Bruxelles en début de semaine, pour participer au Conseil des ministres de la justice et de l’intérieur. Mais Didier Reynders a également fait une visite «de courtoisie» à Ignazio Cassis. Au menu des discussions: la guerre en Ukraine et, surtout, les relations bilatérales Suisse-UE.
Autre signe en coulisses: les 6 et 7 mars, Viola Amherd était à Bucarest, en même temps qu’Ursula von der Leyen. La présidente de la Confédération a participé au congrès du Parti populaire européen (PPE, droite), qui a officiellement entériné la candidature de l’Allemande à un nouveau mandat comme présidente de la Commission européenne. Les deux femmes ont pu échanger. Et ce sont bien elles qui se rencontreront, le 18 mars à Bruxelles, pour le lancement officiel du début des négociations entre la Suisse et l’UE, nous confirment plusieurs sources.
A Berne, plus tôt dans la semaine, le mandat de négociations avait occupé le groupe du Centre, qui s’est réuni mardi pour en parler en présence du secrétaire d’Etat Alexandre Fasel et de l’ambassadeur Patric Franzen, chargé des négociations par le Conseil fédéral. Il est notoire que le président et conseiller national zougois Gerhard Pfister fait partie des sceptiques envers l’Europe. Mais selon un participant, plus la réunion avançait, plus les arguments des diplomates rencontraient un écho positif, même chez les réfractaires. Le communiqué qui concluait la journée soulignait que «le Groupe du Centre est favorable à des négociations rapides». Le texte précise qu’il «exige des solutions basées sur un rapport d’égal à égal avec l’UE qui garantissent notre prospérité, mais qui ne mettent en danger ni nos institutions sociales, ni le niveau des salaires».
■