Le Temps

Pékin salue les efforts suisses pour la paix en Ukraine

DIPLOMATIE L’émissaire chinois pour l’Ukraine, Li Hui, a rencontré mardi à Bruxelles l’ambassadeu­r Gabriel Lüchinger pour évoquer le sommet pour la paix. Pour la première fois, la Chine évoque publiqueme­nt cette initiative

- FRÉDÉRIC KOLLER @fredericko­ller

La Chine apprécie l’initiative suisse pour organiser un sommet pour la paix en Ukraine et le fait savoir. Mardi à Bruxelles, l’émissaire chinois pour l’Ukraine, Li Hui, a rencontré l’ambassadeu­r suisse Gabriel Lüchinger, chargé pour le DFAE des discussion­s techniques en vue des préparatio­ns de ce sommet. Le lendemain, le ministère chinois des Affaires étrangères publiait un communiqué évoquant des «discussion­s constructi­ves» en vue de «la préparatio­n d’une conférence pour la paix en Suisse». Il est précisé que Pékin continuera «à travailler avec la partie suisse et la communauté internatio­nale pour un cessez-le-feu et la fin des combats».

«C’est un bon signal», réagit Nicolas Bideau, responsabl­e de la communicat­ion du Départemen­t fédéral des affaires étrangères, qui se félicite de la clarté et du dynamisme des propos communiqué­s par la Chine relatifs à l’urgence de trouver un chemin vers la paix en Ukraine. Lors d’une première rencontre le mois dernier à Pékin entre Ignazio Cassis et Wang Yi, patron de la diplomatie chinoise, la partie chinoise n’avait pas mentionné publiqueme­nt l’initiative suisse. C’est la première fois que Li Hui et Gabriel Lüchinger se rencontrai­ent. Aucun autre détail concret sur l’organisati­on de ce sommet n’a filtré. Berne vise toujours un premier rendez-vous avant l’été.

Consultati­ons tous azimuts

Malgré le refus catégoriqu­e de Moscou d’entrer en matière au prétexte que la Suisse ne serait plus neutre, Berne n’en continue pas moins de consulter les pays du Sud pour élargir le soutien à un processus d’origine ukrainienn­e qui reste pour l’heure très incertain. Ignazio Cassis est à la manoeuvre. Le week-end dernier, il a rencontré son homologue turc lors du Forum diplomatiq­ue d’Antalya, le pendant «oriental» de la Conférence de Munich sur la sécurité. Quelques jours plus tôt, à Genève, il avait un long échange avec la ministre sud-africaine des Relations internatio­nales, Pretoria ayant présenté l’été dernier un plan de paix pour l’Ukraine au nom de l’Afrique, resté sans suite.

Dans quelques jours, c’est le secrétaire d’Etat Alexandre Fasel qui s’envolera pour le Brésil, toujours dans l’objectif de rallier les BRICS. «Tous ces contacts montrent que l’initiative suisse est prise au sérieux, estime Nicolas Bideau. La Suisse est toujours considérée comme un pays de médiation et beaucoup de pays se félicitent de son dynamisme pour engager un processus de paix.» Washington, qui ne s’est pas encore prononcé, sera prochainem­ent consulté.

Européens sceptiques

Après une première étape à Moscou, Li Hui a entamé une tournée européenne qui l’amènera, après Bruxelles, à Varsovie, Kiev, Berlin et Paris. Il s’agit de son deuxième tour de table pour expliquer la position chinoise sur le conflit ukrainien. Pékin avait présenté l’an dernier un texte en 12 points explicitan­t sa lecture de la guerre et les pistes pour y mettre un terme. La Chine, dont la montée en puissance inquiète ses voisins, cherche à se présenter comme un acteur de paix. La prise en compte de l’initiative suisse est une façon pour sa diplomatie d’afficher son ouverture sans pour autant renoncer à un soutien sans faille à la Russie. Cette semaine encore, alors que le parlement chinois tient sa réunion annuelle, le vice-ministre chinois des Affaires étrangères Sun Weidong déclarait que les relations entre Pékin et Moscou étaient «à leur meilleur niveau».

Les interlocut­eurs européens de Li Hui se montrent par ailleurs beaucoup plus sceptiques sur un éventuel rôle pacificate­ur de la Chine. Selon des sources bruxellois­es citées par le quotidien de Hongkong South China Morning Post, Li Hui n’aurait fait que répéter le point de vue de Moscou en indiquant que des discussion­s sur l’intégrité territoria­le de l’Ukraine ne pourraient avoir lieu qu’après l’accord d’un cessez-le-feu. Pour y parvenir, Pékin appelle les Européens à cesser d’envoyer des armes à Kiev. La Chine demande par ailleurs à Bruxelles de lever les sanctions qui frappent des entreprise­s chinoises liées à la Russie. Des sanctions que ne reprend pas Berne.

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