Trois condamnations dans le scandale 1MDB
Dans l’affaire du pillage du fonds souverain malaisien, un ex-banquier de la BSI et la banque elle-même ont été condamnés pour blanchiment. Pictet écope d’une amende
Un ancien banquier star de la BSI a été condamné à 6 mois de prison avec sursis par le Ministère public de la Confédération pour avoir blanchi 2,4 milliards de dollars détournés du fonds souverain malaisien 1MDB, entre 2010 et 2014. Révélée jeudi par le site Gotham City, une ordonnance pénale qui vient d’entrer en force montre que le banquier gérait six comptes ayant abrité des capitaux issus du pillage de 1MDB.
Selon le parquet fédéral, il a intentionnellement fait transférer cet argent vers d’autres comptes contrôlés notamment par son client Jho Low, le cerveau présumé de la fraude, de manière à compliquer la recherche ou la confiscation de ces fonds. L’ex-employé de la BSI, apparemment réfugié en Chine, avait écopé de 18 mois de prison à Singapour et d’une amende équivalente à 16000 francs, en 2016.
C’est la première condamnation d’un banquier en Suisse dans le cadre de cette affaire tentaculaire, qui porte sur le détournement dans les années 2010 de près de 5 milliards de dollars au détriment de ce fonds souverain
La banque Pictet avait décidé de ne pas dénoncer un client dont elle s’était séparée
malaisien. Dès le 2 avril, deux gérants de la société genevoise Petrosaudi seront jugés par le Tribunal pénal fédéral de Bellinzone pour escroquerie et blanchiment aggravé notamment. Les deux hommes sont soupçonnés d’avoir détourné au moins 1,8 milliard de dollars entre 2009 et 2015.
Après six ans d’enquête, le MPC a aussi condamné le 11 janvier la BSI à 4,5 millions de francs d’amende, pour blanchiment aggravé et répété entre 2010 et 2014. Le parquet fédéral précise à Gotham City que la BSI souffrait d’un déficit d’organisation. Deux filiales de 1MDB, parties civiles à la procédure, ont fait recours contre cette ordonnance pénale. Le scandale avait provoqué la chute de l’ex-première banque du Tessin en 2016, et sa reprise par le groupe zurichois EFG.
Pas de procès-verbaux
Toujours selon Gotham City, Pictet a été condamnée à 40000 francs pour n’avoir pas dénoncé un client impliqué dans l’affaire 1MDB, selon un mandat de répression rendu le 15 janvier 2024 par le Département fédéral des finances (DFF). Ayant menti sur l’origine de sa fortune (sa prétendue clinique privée londonienne n’était qu’une «modeste échoppe» inactive, et située dans un quartier populaire), cet homme d’affaires originaire de Malaisie avait alimenté son compte via son autre activité: apporteur d’affaires pour une société de production anglaise qui réalisait des documentaires complaisants sur des hommes politiques. Il a ainsi reçu 2,35 millions de dollars en 2011, de la part d’une société offshore contrôlée par un associé de Jho Low.
Fin 2012, Pictet a décidé de se séparer de ce client, avant de choisir début 2013 de ne pas le dénoncer au Bureau de communication en matière de blanchiment d’argent. Erreur, selon le DFF, qui regrette également que les employés à l’origine de cette décision n’aient pas pu être sanctionnés. Les séances du comité concerné n’ont en effet pas fait l’objet de procès-verbaux contrairement aux exigences de la loi sur le blanchiment.
Contactée, Pictet n’a pas souhaité faire davantage de commentaires que celui envoyé à Gotham. En substance, déclare la banque, la réglementation sur la gestion des risques et de la conformité s’est considérablement renforcée depuis les faits décrits dans ce dossier, qui remontent à dix ans. Pictet se conforme à cette évolution et répond aux normes en vigueur. ■