UDC opposée, socialistes sceptiques, Le Centre et PLR dans une attente positive
Les fronts n’ont pas changé dans le dossier européen. Le parti souverainiste étant catégoriquement contre les négociations, le succès de l’accord dépend toujours d’un compromis entre la gauche et le centre droit
Au moment des réactions politiques, aucune surprise de taille n’émerge: les milieux opposés, sceptiques et favorables sur le principe restent grosso modo les mêmes. L’UDC conservatrice et souverainiste ne veut rien savoir des démarches du Conseil fédéral. Elle conteste le fait même de négocier avec l’Union européenne. «L’UDC reste catégoriquement opposée à ce mandat de négociation, et pour cinq raisons principales: nous refusons la reprise automatique du droit européen et le fait de ne pas être d’égal à égal avec l’UE. Nous ne voulons pas nous soumettre à la Cour de justice de l’UE, et pas davantage supprimer la démocratie directe ou verser des milliards régulièrement à l’UE pour sa cohésion», énumère Thomas Aeschi (ZG), chef du groupe parlementaire. «Nous rejetons aussi clairement la possibilité donnée à l’UE de sanctionner la Suisse, si celle-ci décide par exemple de limiter l’immigration massive.»
En l’absence de l’UDC, l’accord n’aura une chance de passer que si une alliance se forme de la gauche au centre droit. A gauche justement, le Parti socialiste ne lève pas encore les bras au ciel et épouse les critiques appuyées des syndicats. «Nous sommes satisfaits de cette volonté d’aller de l’avant et espérons vraiment que les négociations se concluront positivement. Mais il faut être honnête, il y aura des efforts à faire sur le plan de la protection des salaires pour que cette votation ait une chance», déclare d’emblée Samuel Bendahan (VD), cochef du groupe aux Chambres. «Si nous devons défendre cet accord devant la population, il faudra le faire avec la conviction intime qu’il améliore la vie des gens. Collaborer avec l’UE crée de la valeur, mais celle-ci doit aussi revenir au plus grand nombre, y compris les salariés à bas revenus. Quelqu’un qui perd son emploi à cause de la concurrence européenne ne voudra bien évidemment pas soutenir cet accord.»
«Trop vague encore»
Le conseiller national vaudois relaie les mécontentements des siens. «Sur les frais des travailleurs détachés, le Conseil fédéral dit qu’il veut trouver une solution, mais cela reste trop vague. De même, les négociations avec l’UE et celles entre les partenaires sociaux en Suisse doivent se conclure en même temps, pour que le résultat global puisse être évalué.»
Le patronat en prend pour son grade. «Soit les fédérations économiques comprennent l’importance du dossier et font en sorte que le résultat soit bon, soit cela échouera et nous ne nous rallierons pas. Il est exclu de faire un accord qui soit dans la seule logique des grandes organisations économiques patronales. Le gouvernement doit écouter toutes les parties, les syndicats et la gauche aussi. L’économie a déjà obtenu tout ce qu’elle voulait sans avoir besoin de lever le petit doigt.»
«Nous ne voulons pas nous soumettre à la Cour de justice de l’UE» THOMAS AESCHI, CHEF DU GROUPE PARLEMENTAIRE UDC AU CONSEIL NATIONAL
«Il faudra travailler pour convaincre la population dans tout le pays» ÉLISABETH SCHNEIDER-SCHNEITER, CONSEILLÈRE NATIONALE (LE CENTRE/BL)
Nécessaire au succès des négociations, l’assentiment des deux grandes formations de centre droit, Le Centre et le Parti libéral-radical, n’est pas acquis, même si les réactions laissent transparaître une attitude plutôt positive.
Au Centre, la conseillère nationale Elisabeth Schneider-Schneiter (BL) se dit «satisfaite et sereine. Je suis convaincue par ce bon départ dans les négociations. Le Conseil fédéral a pris au sérieux les inquiétudes exprimées lors de la consultation, notamment sur la libéralisation du marché de l’électricité, l’immigration et les mesures de compensation.» Elue de la Commission de politique extérieure, elle plaide pour la recherche d’un compromis avec la gauche. «Sur le plan interne, des solutions doivent être trouvées sur la réglementation pour les frais professionnels. C’est faisable, car d’autres pays européens ont aussi des problèmes avec ce système, comme l’Allemagne.» In fine, «il faudra travailler pour convaincre la population dans tout le pays», en prévision de la votation populaire.
Le PLR, pour sa part, maintient le soutien de principe communiqué à la fin de janvier. Il juge que «les bilatérales III sont une chance pour notre pays. Avec l’approche par paquet, le Conseil fédéral a obtenu des améliorations substantielles.» Ce n’est toutefois que lorsque le résultat définitif des négociations sera connu que le parti arrêtera sa position.
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