Votre enfant vole un objet. Vous le sanctionnez ou vous le couvrez?
C’est peut-être de la lâcheté. Ou de la paresse. Ou alors une forme de confiance dans l’idée que tout cela n’était pas si grave. En tout cas, lorsqu’un de mes garçons, adolescent, a, avec ses copains tout aussi adolescents, volé des bouteilles d’alcool dans un supermarché pour fêter la fin d’un camp, j’ai plus souri que hurlé lorsque j’ai appris l’épisode, bien après les faits.
Je ne pouvais de toute façon rien réparer puisque le vol avait eu lieu il y a longtemps, mais je me souviens ne pas avoir frémi à l’évocation de ce délit. J’ai mis ça sur le compte de la jeunesse et des défis. Pas très moral, quoi, faut bien avouer.
Dès lors, je suis très admirative des parents qui confrontent leurs enfants sans délai. Comme cette amie qui, constatant récemment que son fils de 5 ans avait dérobé des pièces d’un jeu à l’école, lui a demandé de les ramener et de s’excuser auprès d’un des enseignants. L’enfant a été penaud, je dis «chapeau».
Ou, il y a des années, cet ami dont la fille âgée de 8 ans avait dérobé des perles sur un stand du marché aux puces, à Genève. Pareil, il l’a accompagnée audit stand et la fillette a dû rendre son butin avant de présenter ses excuses au marchand. Un grand moment de contrition, pour ne pas dire d’humiliation, destiné à servir de leçon. J’admire. L’équation est simple. Soit vous êtes du côté de la loi et vous l’appliquez quelle que soit votre proximité avec le fauteur du trouble. Soit vous êtes du côté du sang et vous couvrez votre enfant. On peut finasser et dire qu’il y a des circonstances plus graves que d’autres – voler à un proche versus voler à un anonyme, voler à un artisan versus voler dans un grand magasin, voler un boeuf versus voler un oeuf – on peut, oui.
Mais au fond, la vraie question, c’est: quel type de rapport à la loi veut-on transmettre à sa progéniture? Un rapport de respect inconditionnel et de déférence ou un rapport d’indifférence, voire de surplomb? «La loi, c’est la loi», oui, bien sûr, on en reparlera…
Dans un registre nettement plus grave, celui du meurtre accidentel, je me souviens avoir été soufflée par la réaction de Bree Van de Kamp, une des quatre drôles de dames de Desperate Housewives, quand elle avait caché le forfait de son fils, qui conduisait la voiture ayant tué, de nuit, la mère d’un de leurs amis. Là, je me suis dit: «Non, elle abuse». Mais très vite, j’ai pensé: «En même temps, accuser son fils ne fera pas revenir la vieille dame et ce jeune a toute sa vie à vivre»…
Il est bien possible que je sois plus pragmatique qu’éthique. Ce qui n’est pas génial, dirait Kant ou saint Augustin, deux grands piliers de la morale. D’autant que dans le cas de la série, il y a une donnée psychologique, la culpabilité, qui s’est retournée contre le jeune homme trop vite exempté. Punir, c’est cadrer. Cadrer, c’est éduquer. Eduquer, c’est aider. Je connais l’enchaînement, mais, face à un vol bénin, je me dis aussi que ne pas dramatiser est une manière de gérer…
Sur ce, je vous laisse avec votre conscience en vous posant cette question toute simple: et vous, avez-vous toujours sanctionné votre enfant (votre conjoint·e, un·e ami·e) quand vous avez découvert qu’il ou elle avait commis un délit?
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