Le CEO était fâché avec les chiffres
Cinquante. Cinq cents. Cinq. Ce ne sont que des chiffres, mais ils peuvent avoir leur importance. Lors de la présentation de ses résultats, Lyft a précisé le 13 février que l’un de ses indicateurs de marge bénéficiaire allait progresser de 500 points de base en 2024. Soit 5%, un bond considérable lorsque l’on parle de marges. La publication de ce chiffre, à 16h05 précisément le 13 février, a déclenché une frénésie d’achat sur l’action du site de réservation de véhicules avec chauffeur. En une demi-heure, le titre a progressé de 67%. Avant de chuter presque aussi rapidement.
Pourquoi? A cause d’un simple zéro. Lyft prévoit en réalité que cette marge augmente de 50 points de base cette année, c’est-à-dire 0,5%. La responsable des finances de la société californienne a corrigé cette erreur à 16h47, apportant la véritable prévision durant une discussion avec les analystes financiers qui suivent le titre Lyft.
Les marchés n’ont pas tardé à réagir. Après avoir augmenté de 3,2 milliards de dollars, la capitalisation boursière a chuté de 2,9 milliards à la suite de la correction du fameux chiffre. Des investisseurs exigent maintenant d’être dédommagés.
Bien sûr, tous les actionnaires ne sont pas partie prenante à la plainte déposée contre Lyft mardi dernier en Californie. Seulement ceux qui avaient acheté l’action Lyft à des «prix gonflés» entre 16h05 et 16h51, le 13 février. Et qui n’ont pas vendu leur titre avant que le cours ne reparte vers le bas.
L’épisode les a certainement appauvris, mais il a aussi stimulé leur verve. «La fausse déclaration était si évidente qu’elle allait au-delà de la simple négligence et équivalait à une indifférence téméraire à l’égard de la vérité», peut-on lire dans la plainte, révélée par l’agence Reuters.
Un de leurs arguments est qu’après la correction apportée par la directrice des finances, à 16h47, Lyft a attendu ou mis sept minutes pour officiellement admettre son erreur. Le lendemain, le patron de l’entreprise a reconnu qu’il s’agissait d’une grossière erreur et qu’il en endossait la responsabilité.
Cela n’a pas suffi pour les actionnaires regroupés dans cette plainte. Au contraire, ils estiment que le directeur général et la directrice financière étaient motivés à prendre leur temps pour rectifier ce fameux chiffre, de manière à gonfler leur bonus basé sur la performance boursière de l’action. L’idée étant que plus le cours restait élevé longtemps, plus leur rémunération variable augmenterait.
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