Trop différents pour faire commerce?
Hier, Bernard Rüeger, ancien vice-président d’Economiesuisse, a mis en garde les PME intéressées par l’accord de libre-échange entre l’AELE et l’Inde sur les ondes de la RTS. Dans un langage qu’il a qualifié d’«imagé», il affirme que «les Indiens» sont «plutôt tordus»
Quelle mouche a donc piqué Bernard Rüeger? L’ancien vice-président d’Economiesuisse, actuel président de l’assurance maladie CSS, intervenait hier matin dans l’émission La Matinale de la RTS suite à la signature de l’accord de libreéchange entre l’AELE et l’Inde. Après s’être réjouie de l’aboutissement de seize ans de négociations, cette figure de l’économie a concentré son propos sur les difficultés que pourraient rencontrer les PME dans leurs relations avec des partenaires indiens en raison de différences culturelles.
«Pour imager ça ici en Suisse: les Chinois sont des gens assez joviaux, des gens qui ont de l’enthousiasme, beaucoup de fantaisie, je les comparerais à des Italiens […], les Indiens ont une culture totalement différente. Ce sont des gens très cordiaux, mais derrière ce sont des gens – je ne sais pas, j’ose pas… maintenant j’ai les cheveux gris, je peux en parler – plutôt tordus», a-t-il exposé, avant d’inviter les PME à la plus grande prudence – «la morale de paiement indienne n’est certainement pas leur plus grande caractéristique».
Des propos «pas assez nuancés», estime Ariane Curdy, dont la société CTRL Culture Relations intervient précisément au sein d’entreprises pour développer des compétences interculturelles. «L’Inde n’est pas un pays facile à appréhender – il y a 22 langues nationales, 28 Etats et une immense diversité religieuse. Je suis d’accord sur ce point, mais c’est bien le seul. Pour y travailler, il faut investir du temps dans la relation. Les stéréotypes de ce genre n’aident absolument pas», précise-t-elle.
«Faites vos devoirs, préparez-vous bien»
Entre autres différences culturelles, la Valaisanne d’origine souligne «une culture de la négociation, que nous n’avons pas en Suisse» et des modes de communication parfois divergents. «Au niveau du style de management indien, c’est une culture où ils n’aiment pas dire non et vont le faire de façon détournée, alors qu’en Suisse, nous sommes très portés sur la précision dans la parole. Si on négocie sans en avoir conscience, on entend les mots mais sans en saisir le sens, au risque de passer à côté du message», estime-t-elle.
«Je trouve navrant de mettre les PME en garde. Au lieu de dire: «ne vous faites pas rouler», je trouverais bien plus judicieux de dire: «Faites vos devoirs, préparez-vous bien. Soyez courageux, soyez ouverts, investissez du temps.» Il y a une manière d’entrée en contact qui est très importante et si on y arrive, ça peut être de très belles histoires», conclut Ariane Curdy.
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