Pour Israël, l’enjeu est existentiel
Plusieurs lecteurs m’ont interpellée sur le conflit entre Israël et le Hamas, surpris que je n’aie pas encore parlé de ce sujet qui occupe les esprits depuis bientôt six mois. Force est de constater que l’opinion suisse et européenne penche majoritairement pour la Palestine. En outre, l’ONU, en la personne de son secrétaire général Antonio Guterres, a clairement choisi son camp.
Pourtant, c’est elle qui, en 1947, sur sollicitation des Anglais, officialisait la partition des terres palestiniennes en deux territoires indépendants, un juif et un arabe. Le 11 mai 1949, Israël devenait le 59e membre de l’Organisation des Nations unies, marquant le début de conflits incessants, car les Arabes ne l’entendaient pas ainsi. Des guerres se sont succédé, toutes perdues par ses voisins, ce qui permit à Israël d’étendre son emprise.
Du côté palestinien, la situation est cruelle. Une terre occupée, sans cesse grignotée par les colons, des populations déplacées et une vie misérable, aussi parce que ses responsables politiques poursuivent d’autres buts que son bien-être et sa survie. Le Fatah et le Hamas s’étant livré une guerre fratricide, la Palestine est gérée par deux instances opposées. Le flot continu des millions versés depuis longtemps par le monde occidental pour aider les Palestiniens sont détournés par le clan corrompu de Mahmoud Abbas en Cisjordanie et par les objectifs militaires du Hamas à Gaza, où ils ont permis d’armer les terroristes et de construire des tunnels.
Récemment, que s’est-il passé? Au petit matin du 7 octobre, le Hamas s’introduit en Israël pour perpétrer un véritable pogrom. Les commandos filment les atrocités, profèrent des injures et se revendiquent d’Allah, plaçant le conflit sous un angle que l’on refuse de voir ici, celui d’une guerre de religion sans pitié. Israël, frappé au tréfonds de son existence, réagit méthodiquement pour éradiquer le Hamas. Ce même Hamas qui se cache derrière des boucliers humains, s’avérant ainsi terroriste à la fois vis-à-vis de l’ennemi et vis-à-vis de sa propre population. S’ensuivent des morts civils, des bombardements massifs, l’exode, la famine.
Bien sûr, la proportionnalité de la riposte interpelle. Le massacre abject de 1200 juifs vaut-il la destruction de la bande de Gaza? Tsahal se montre sans pitié et un cessez-le-feu doit rapidement mettre fin au carnage. Mais, avant de condamner unilatéralement Israël, il faut considérer que le Hamas ne désire pas seulement l’instauration d’un Etat palestinien viable mais la disparition pure et simple de l’Etat hébreu. Il est soutenu par les musulmans à travers le monde, par le Hezbollah libanais, par l’Iran.
Les juifs, depuis le 7 octobre, vivent donc le retour d’une peur existentielle, dont la mémoire s’inscrit dans la sédimentation historique, avec la perspective d’un nouvel Holocauste. Disserter depuis nos confortables salons helvétiques sur la proportionnalité de la riposte frise l’indécence, même si tout doit être entrepris pour faire cesser le conflit car nous compatissons avec les civils palestiniens.
Face au dilemme que posent les guerres, et celle-ci plus que toute autre, face à deux parties qui s’opposent d’excellentes raisons de se haïr, face aux indicibles souffrances de part et d’autre, face aux informations contradictoires et subjectives, la seule voie n’est-elle pas d’en revenir à la loyauté des appartenances? Nous partageons avec le peuple juif un patrimoine historique et culturel commun dont nous devrions nous souvenir. Il nous a offert les plus grands savants, philosophes, artistes. Historiquement, nous l’avons ostracisé pendant des siècles, la Shoah marquant le sommet de l’ignominie, ce qui devrait interdire de le traiter de nazi et de génocidaire. En laissant s’installer l’antisémitisme le plus crasse et en manifestant unilatéralement pour la Palestine, l’Occident trahit son camp et renie ses racines. Alors, de notre fait, Israël disparaîtra et les juifs reprendront leur éternelle errance. ■