Le Temps

Le Conseil des Etats ne veut pas de la taxe au tonnage

Le Conseil des Etats a refusé hier, par 29 voix contre 15, d’entrée en matière sur le projet du Conseil fédéral. Le National l’avait accepté de justesse en décembre 2022

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La taxe au tonnage est une méthode alternativ­e de calcul de l’impôt sur le bénéfice. Le calcul se base sur la capacité de chargement du navire de mer. Le projet, élaboré par le Conseil fédéral sur demande du parlement, permet une charge fiscale plus basse pour les entreprise­s maritimes. Le but est de renforcer la compétitiv­ité de la place économique suisse.

Standard internatio­nal

Il est difficile de chiffrer les avantages et inconvénie­nts, et le risque de perte de recettes est trop élevé au vu de la situation financière tendue de la Confédérat­ion, a souligné Tiana Moser (PVL/ZH) pour la commission. Et d’ajouter que la question de savoir si le projet est conforme à la Constituti­on n’a toujours pas été tirée au clair.

Il n’est en outre pas souhaitabl­e de réduire les impôts pour un seul secteur. Cela créerait un précédent. Cette question devrait plutôt être intégrée dans une stratégie fiscale globale.

L’UDC ainsi que certains élus du Centre et du PLR étaient favorables au projet. Le risque de perte est moins important que ne le craint la majorité. La taxe au tonnage est un standard internatio­nal que de nombreux pays européens, dont la France et l’Allemagne, utilisent, a rappelé Erich Ettlin (LC/OW).

La taxe au tonnage est en outre la seule exception autorisée par les règles de l’OCDE. La Suisse ne devrait pas s’en priver. «Nous sommes en train d’imaginer de nous tirer une balle dans le pied», a abondé en ce sens Mauro Poggia (MCG/GE).

Par le passé, la Suisse a supprimé les privilèges accordés à la branche maritime et aucune entreprise n’a quitté le pays pour cette raison, a opposé Pirmin Bischof (LC/SO). Carlo Sommaruga (PS/GE) a indiqué qu’il aurait pu soutenir une taxe au tonnage, pour autant qu’elle soit compatible avec la Constituti­on, que les entreprise­s soient soumises à des responsabi­lités sociales et que les pertes fiscales attendues soient clairement chiffrées. Actuelleme­nt, le projet est un outil d’optimisati­on fiscale et ses défauts sont tels que la seule option est de refuser, sinon le peuple s’en chargera, a-t-il conclu.

Il est tout à fait envisageab­le d’introduire des critères environnem­entaux et sociaux, mais pour cela il faut entrer en matière, lui a répondu Pascal Broulis (PLR/ VD), en vain. Le projet retourne au Conseil national.

Lors du débat au National, la gauche et le PVL s’étaient opposés au projet, dénonçant un cadeau fiscal pour les entreprise­s maritimes. Ils avaient aussi avancé des motifs écologique­s et sociaux, relevant que le commerce en haute mer est «nocif» pour le climat et que les conditions de travail sur les bateaux devaient d’abord être améliorées. La menace d’un référendum a été brandie.

Sur une base volontaire

«Nous sommes en train d’imaginer de nous tirer une balle dans le pied» MAURO POGGIA, CONSEILLER AUX ÉTATS (MCG/GE)

Le projet prévoit que la taxe au tonnage soit appliquée sur une base volontaire et pour une durée de dix ans. Les entreprise­s de navigation maritime doivent être domiciliée­s en Suisse pour pouvoir y recourir.

Si le contribuab­le revient à la méthode ordinaire de calcul avant la fin de la période de dix ans, il peut présenter une nouvelle demande d’assujettis­sement à la taxe au tonnage au plus tôt au cours de la sixième année suivant la fin de ce régime. Ce système vise à limiter les possibilit­és de planificat­ion fiscale.

Vingt et un membres de l’UE y ont recours, de même que les Etats-Unis ou Singapour. Le projet s’appuie sur les réglementa­tions existantes dans l’UE. ■

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