Le docteur Jivago en Ukraine
En réaction à la chronique de Marie-Hélène Miauton «Guerre ou paix en Ukraine» (LT du 01.03.2024). Mme Miauton préfère comparer la guerre en Ukraine à la Première Guerre mondiale plutôt qu’aux années 1930, ce qui est militairement correct, mais géopolitiquement faux. Politiquement, la comparaison avec la situation autour des Accords de Munich en 1938 a plus de sens. Mme Miauton laisse les Accords de Minsk (2014), que nous pouvons considérer comme un «Munich bis», de côté. Avec ces accords, la mainmise par M. Poutine sur le Donbass d’abord et sur la Crimée ensuite a été acceptée de fait par le monde occidental avec Mme Merkel dans le rôle de M. Chamberlain. Tout comme le premier «Munich» de 1938 a accordé l’annexion de l’Autriche et des Sudètes à Hitler. Après Minsk, Poutine a attaqué l’Ukraine en 2022 comme Hitler l’a fait avec la Tchécoslovaquie en 1939. De plus, Munich 1938 a donné la voie libre à l’URSS pour s’emparer impunément des morceaux de la Pologne et de la Finlande ainsi que les pays Baltes en 1939-1940.
Des accords de paix forcés à l’Ukraine ne seraient donc pas un 2e mais plutôt un 3e «Munich». Hormis stimuler l’appétit de la Russie pour ses pays voisins, ce 3e «Munich» signifierait une invitation pour toute autre autocratie d’attaquer un pays voisin. Les autocraties n’aiment pas les voisins libres et démocratiques. Soit ils les séparent avec un mur, soit ils tentent de les soumettre. Mieux vaut les en empêcher.
Certes, comme le dit Mme Miauton, il faudra penser l’après-guerre. Il serait en effet hasardeux de mettre la Russie à genoux, car le traité étranglant de Versailles, imposé à l’Allemagne vaincue en 1919, a fait naître le revanchisme dont Hitler a pu profiter. Or, depuis 1945 l’Allemagne de l’Ouest ainsi que le Japon ont bénéficié d’un autre traitement. Indéniablement cela a été une réussite. Ceci aussi devrait démontrer que l’on peut apprendre de ses erreurs, sur la façon d’éviter une grande guerre ou sur celle de gagner la paix. ▅