Le Temps

Le titre de champion de Suisse de hockey va-

Samedi débutent les play-off. Qui succédera à Genève-Servette? Trois équipes romandes sont en lice: Fribourg, Lausanne et Bienne. son excellente saison régulière. Etat des lieux avec deux experts: l’ancien joueur Michael Ngoy et l’entraîneur et consultant

- VINCENT BOURQUIN @bourquvi

L’an dernier, le monde du hockey romand était en transe. La finale, en sept matchs, entre Genève-Servette et Bienne a passionné et déchiré tout un pays. Les Grenat se sont finalement imposés, devenant la première équipe romande à remporter le titre depuis l’introducti­on des play-off. Aujourd’hui, le sort des Genevois est moins glorieux: ils sont déjà en vacances, avec une médaille de champions d’Europe autour du cou en guise de consolatio­n. Quant au HC Bienne, il s’est hissé de justesse en quarts de finale grâce à une victoire face à Ambri-Piotta.

Du coup, trois équipes romandes sont toujours en lice pour succéder à Genève-Servette. Et l’effervesce­nce de l’an dernier s’étend désormais à Fribourg et Lausanne qui ont terminé deuxième et troisième de la saison régulière, derrière des ZSC Lions jusqu’ici irrésistib­les. Le titre peut-il rester en Suisse romande? Réponses de deux experts du hockey suisse: l’ancien joueur du LHC, de Gottéron et d’Ambri Michael Ngoy, aujourd’hui consultant pour les Puckaliste­s, Radio Fribourg et Tele Ticino, ainsi que Laurent Perroton, qui a notamment entraîné Forward Morges et Martigny et qui distille ses analyses sur Léman Bleu et Planète Hockey.

L’année de Gottéron?

Zurich-Bienne, Fribourg-Lugano, Lausanne-Davos et Zoug-Berne: voilà les affiches du premier tour des play-off, une phase pendant laquelle tout est possible. Blessures, bagarres et erreurs d’arbitrage peuvent tout bouleverse­r, et il n’est pas rare que des favoris s’effondrent. Fribourg-Gottéron fait partie de l’histoire du hockey suisse, mais il n’a jamais été champion, même lorsqu’il était emmené par la fameuse paire Bykov-Khomutov. Quatre fois finalistes (1992, 1993, 1994 et 2013), les Dragons espèrent enfin aller au bout. L’ensemble du canton est derrière l’équipe de Christian Dubé. Tous les billets pour les quarts de finale contre Lugano sont partis en quelques secondes. Et donc la très belle BCF Arena, toute en verticalit­é comme la Post-Finance Arena de Berne, fera patinoire comble (9009 places) comme lors de chaque match de la saison. Passion et tension sur les bords de la Sarine. La dramaturgi­e est à son comble avec la décision d’Andreï Bykov de ranger ses patins au terme de la saison après le non-renouvelle­ment de son contrat. «Ces éléments extérieurs peuvent jouer un rôle très important, comme l’année dernière avec l’annonce que l’entraîneur biennois Antti Törmänen souffrait à nouveau d’un cancer. Cela avait motivé encore plus l’équipe», soutient Laurent Perroton. Le Français insiste aussi sur l’identité forte du club qui compte plusieurs joueurs clés formés maison. «Pour eux, c’est l’année où jamais pour remporter ce titre.»

Un succès final n’est pas exclu aux yeux de Michael Ngoy qui a porté à 378 reprises le maillot de Gottéron. Celui qui travaille désormais aux RH du CHUV considère toutefois Zurich comme le grand favori. «Une victoire fribourgeo­ise est possible, mais le chemin est semé d’embûches. Le jeu est très différent durant les play-off, beaucoup moins offensif, nettement plus défensif.» Cela pourrait prétériter Fribourg-Gottéron et ses deux attaquants suédois Lucas Wallmark et surtout Marcus Sörensen. «Il marche sur l’eau», ne cesse de répéter le capitaine fribourgeo­is Julien Sprunger. «Sur quatre tirs, il en marque un, c’est phénoménal, il joue la saison de sa vie», lance admiratif Michael Ngoy. Toutefois, il craint que son ancienne équipe soit trop dépendante de ses deux stars. «L’équipe s’est beaucoup reposée sur ce duo.» Un avis qui n’est pas partagé par Laurent Perroton qui

«Il manque au LHC des joueurs qui tirent l’équipe et savent gérer la pression» MICHAEL NGOY, ANCIEN JOUEUR DU LHC, DE GOTTÉRON ET D’AMBRI

Le gardien fribourgeo­is Reto Berra, lors du match du Championna­t suisse de hockey sur glace de National League entre le HC Fribourg-Gottéron et le SC Rapperswil-Jona Lakers.

considère que «les Dragons ont trois lignes d’attaque de très bon niveau».

Avant de rêver à ce titre, les Fribourgeo­is devront tout d’abord éliminer Lugano qui a la meilleure ligne d’attaque du pays (Joly, Carr et Thürkauf ). Michael Ngoy avertit: «Si l’adversaire marque en premier à Fribourg, il y a un vent de panique. Gottéron n’est pas une équipe de play-off, elle peine à gérer les moments de forte pression.» Laurent Perroton craint aussi cette fragilité, d’autant que Lugano et son jeune coach Luca Gianinazzi – «je l’ai eu comme joueur à Forward Morges», glisse-t-il avec fierté – ont retrouvé du rythme. Pour le Lausanne Hockey Club, c’est l’année de la renaissanc­e. Les Lausannois ont su rebondir après l’ère Svoboda qui a été marquée par des échecs sportifs et financiers. Cette nouvelle stabilité a aussi évité des limogeages successifs d’entraîneur­s «Les fans ont été tellement frustrés ces dernières années… Aujourd’hui, le club est en train de reconquéri­r son public», se réjouit Laurent

Perroton, ancien membre du staff des Lions.

Au premier tour, les joueurs de Geoff Ward affrontero­nt Davos. Qui sera favori? Les deux experts sont en désaccord. Pour Michael Ngoy, ce sont les Grisons, pour Laurent Perroton, les Vaudois. «Le LHC n’a pas la culture de la gagne, contrairem­ent à Davos, il lui manque des joueurs qui tirent l’équipe et savent gérer la pression. Je ne sais pas comment ils vont passer de l’ombre à la lumière», analyse l’ancien défenseur. Laurent Perroton contre-attaque: «L’équipe a été crescendo tout au long de la saison, elle joue très bien à 5 contre 5. Davos est une formation qui lui convient bien. Elle peut compter sur une bonne défense et de bonnes lignes d’attaque comme celle composée de Bozon, Raffl et Jäger.» Sur un point, les deux hommes se retrouvent: la formation de la Vaudoise Arena dispose de deux très bons gardiens avec Connor Hugues et le jeune Kevin Pasche, révélation de la saison.

Les Lions espèrent faire au moins aussi bien qu’en 2019, la seule fois de leur histoire où ils sont parvenus en demi-finale des play-off.

Bienne, toujours là

Les Biennois sont des survivants. Leur saison a été marquée par de très nombreuses blessures et un entraîneur, Petri Matikainen, qui n’a jamais gagné la confiance de son vestiaire. Malgré les nombreuses critiques, l’autoritair­e finlandais a conservé (trop) longtemps son poste. Juste avant le terme de la saison régulière, le directeur sportif Martin Steinegger lui a enfin succédé. «Stoney» a réussi l’exploit de qualifier les siens pour les quarts de finale où ils affrontero­nt Zurich, auteur jusqu’à présent d’une saison parfaite. Le très expériment­é, mais aussi parfois explosif, Marc Crawford dispose notamment du meilleur gardien du championna­t, Simon Hrubec, et des deux attaquants suisses Sven Andrighett­o et Denis Malgin, toujours très redoutable­s. Par ailleurs, les Zurichois seront avides de revanche, eux qui avaient été surclassés l’an dernier par les Seelandais, vainqueurs en quatre matchs.

Michael Ngoy et Laurent Perroton ne croient pas aux chances des rouge et jaune. «Les Biennois n’ont plus rien à perdre, mais ils sont fatigués», estime le Français. De son côté, le Vaudois les considère comme «fragiles».

Alors, une équipe romande peut-elle remporter le championna­t? Laurent Perroton parle d’une «petite chance»: si Fribourg et Lausanne remportent leur première série, ils s’affrontera­ient au tour suivant en demi-finale ce qui assurerait une place en finale à une équipe de ce coin de pays. Et ensuite tout peut arriver…

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(FRIBOURG, 26 JANVIER 2024/ ADRIEN PERRITAZ/ KEYSTONE)

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