Le projet des conteneurs une nouvelle fois enterré
ASILE Relancée conjointement cette année par le conseiller fédéral Beat Jans et les cantons, l’idée d’hébergements mobiles est déjà éliminée. Les autorités devront gérer autrement un possible afflux de migrants au second semestre
Il est en fonction depuis moins de trois mois, mais a dû démarrer son mandat au quart de tour. Nouveau ministre de Justice et police, Beat Jans a déjà du travail et de la pression politique plein les bras, notamment avec la migration et l’asile. L’afflux élevé de demandeurs d’asile, qu’ils viennent d’Ukraine, d’Afghanistan ou de Turquie, pose sans arrêt la question des places d’hébergement.
C’est pourquoi le socialiste bâlois a relancé en début d’année des réflexions sur de possibles «villages de conteneurs». Bien que sa prédécesseure Elisabeth Baume-Schneider se soit cassé les dents sur leur financement, il a remis l’ouvrage sur le métier avec les cantons, rapportait le SonntagsBlick. Mais l’idée a fait long feu. Elle a déjà été abandonnée, a appris Le Temps. L’aspect financier aurait pesé dans la balance, relèvent des connaisseurs. La Berne fédérale étant freinée par ses exigences d’équilibre budgétaire, les cantons auraient dû en effet passer à la caisse et participer aux coûts. Ils n’en avaient aucune envie, puisque le premier accueil des demandeurs d’asile incombe à la Confédération, sous la houlette du Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM).
Un SEM qui s’applique à calmer le jeu: «Il n’y avait pas de projet concret. Le SEM a examiné s’il devait demander à titre préventif un crédit au Conseil fédéral pour la réalisation de constructions mobiles dans le cadre du crédit supplémentaire 2024. Il a toutefois renoncé à une telle demande pour diverses raisons; notamment parce que différents acteurs politiques s’y sont opposés.»
A première vue, le manque de lits ne saute pas aux yeux. «Le SEM dispose actuellement d’environ 9900 places d’hébergement, et le taux d’occupation est actuellement de 50% (état au 14 mars 2024).» Il s’agit néanmoins d’anticiper les mois à venir. «Comme l’expérience montre que le nombre de demandes d’asile augmente au cours du second semestre et que le taux d’occupation des lits est par conséquent plus élevé, entre 9000 et 12 000 places d’hébergement seront nécessaires en fonction de l’évolution.»
Contrairement à la Confédération, chargée des procédures d’asile rapides, les cantons s’occupent des cas plus compliqués, et de l’intégration à long terme. Ils se soucient également des places à disposition dans leurs propres centres, dont le nombre oscille entre 4500 et 5000. «Environ trois cantons sont constamment dans la zone rouge et 11 cantons dans la zone orange. La situation en matière de ressources d’encadrement reste constamment tendue», fait savoir Jris Bischof, responsable pour la migration à la Conférence des directeurs cantonaux des affaires sociales (CDAS). En février 2024, «une enquête sur les capacités d’hébergement pour les mois suivants a révélé un taux d’occupation actuel des centres cantonaux de 90%».
«Trois cantons sont constamment dans la zone rouge et 11 cantons dans la zone orange» JRIS BISCHOF, RESPONSABLE POUR LA MIGRATION À LA CDAS
Le cas Boudry
Même si elle est essentielle, la question du logement ne forme pas l’unique enjeu. Le canton de Neuchâtel, et plus particulièrement la commune de Boudry, en sait quelque chose: une part de sa population et ses autorités expriment depuis des mois leur fatigue face aux délits commis par une frange des requérants d’asile. Le Conseil d’Etat neuchâtelois a même menacé de résilier le bail du centre exploité par la Confédération. Un contexte chauffé à blanc, dont Beat Jans pourra prendre la mesure ce mercredi lors d’une visite très attendue sur place. ■