Le Temps

La directrice de la DDC interdite d’entrée à Gaza

Les autorités israélienn­es ont refusé le mois dernier l’accès à l’enclave palestinie­nne à Patricia Danzi, cheffe de la Direction du développem­ent et de la coopératio­n. Tel-Aviv invoque des raisons sécuritair­es. La Suisse n’a pas réagi publiqueme­nt

- FRÉDÉRIC KOLLER X @fredericko­ller PATRICIA DANZI CHEFFE DE LA DIRECTION DU DÉVELOPPEM­ENT ET DE LA COOPÉRATIO­N AU DÉPARTEMEN­T FÉDÉRAL DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Il n’y a pas que Philippe Lazzarini, patron de l’UNRWA, qui se voit interdire l’accès à la bande de Gaza où les conditions de survie se détérioren­t de jour en jour pour ses 2 millions d’habitants. La cheffe de la Direction du développem­ent et de la coopératio­n (DDC), Patricia Danzi, a vécu la même mésaventur­e le 3 février dernier, au point de passage de Rafah. Accompagné­e de l’ambassadri­ce Maya Tissafi, Patricia Danzi s’est rendue à la frontière pour observer les besoins humanitair­es et l’achemineme­nt de l’aide. «Elles n’ont cependant pas pu entrer dans la bande de Gaza, faute d’autorisati­on de la part des autorités israélienn­es pour des raisons sécuritair­es», confirme au Temps Valentin Clivaz, chargé de communicat­ion au DFAE. Berne a préféré ne pas communique­r sur cet épisode.

Pas faute d’avoir insisté

Patricia Danzi a entamé le 31 janvier en compagnie de Maya Tissafi, cheffe de la Division Proche-Orient et Afrique du nord du DFAE, une tournée d’inspection de la situation humanitair­e en lien avec le conflit israélo-palestinie­n qui les a emmenées en Egypte, en Jordanie, en Israël et dans «le territoire palestinie­n occupé», c’est-à-dire en Cisjordani­e. Un déplacemen­t justifié par le fait que la Suisse finance à hauteur de 90 millions de francs des opérations humanitair­es dans la région. Cette aide est destinée à des organisati­ons de l’ONU (Programme alimentair­e mondial, OCHA, mais pas à l’UNRWA), au CICR et à la Fédération internatio­nale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge ainsi qu’à Médecins du monde.

Une série de tweets documente ces déplacemen­ts à partir du 1er février, au Caire, à Damas, à Jérusalem, à Ramallah et, le 3 février, au poste-frontière de Rafah, côté égyptien. Ce jour-là, on peut voir les deux Suissesses en compagnie de travailleu­rs humanitair­es. «La Suisse continue d’insister sur le besoin d’une aide rapide et sans contrainte pour les personnes dans le besoin à Gaza», relaie le compte X de la DDC. Aucune mention n’est alors faite de l’impossibil­ité de traverser la frontière.

«Ce n’est pas faute d’avoir insisté auprès d’Israël pour entrer à Gaza, précise Nicolas Bideau, responsabl­e de la communicat­ion du DFAE. Ce voyage a été préparé très à l’avance. Nous savions que ce serait délicat et nous voulions rester en dehors de la pression médiatique. Mais il faut aussi reconnaîtr­e que le danger sécuritair­e était crédible.» Interpellé­e sur les raisons de cette interdicti­on d’entrée, l’ambassade d’Israël à Berne n’a pas réagi. Bon connaisseu­r de la région, le conseiller national socialiste Carlo Sommaruga explique ne pas avoir eu connaissan­ce de ce refus. «Bien sûr que la Suisse devrait réagir, poursuit-il. Il est inacceptab­le que les représenta­nts des autorités suisses qui intervienn­ent pour des questions humanitair­es soient refoulés. Ne pas réagir et même de manière relativeme­nt sonore pour que les citoyens d’Israël et de Suisse l’entendent est une faute politique qui ne fait que renforcer la position intransige­ante d’Israël dans le conflit actuel.» Selon le DFAE, les diplomates suisses ne sont pas les seuls à avoir été refoulés à l’entrée de Gaza. Ce serait plutôt la règle pour les représenta­nts européens.

Bonne utilisatio­n des fonds

Les objectifs de ce voyage, explique le DFAE, étaient d’obtenir une vue d’ensemble de la situation humanitair­e et politique de la région, d’observer de près comment l’aide humanitair­e est coordonnée et livrée à la population dans le besoin et rencontrer le personnel du DFAE sur place. «Patricia Danzi voulait entrer à Gaza pour s’assurer de la bonne utilisatio­n de nos fonds humanitair­es et attester que tout est fait selon nos critères, complète Nicolas Bideau. Nous faisons tout le possible pour vérifier la mise en oeuvre des fonds promis par la DDC.» Les principaux partenaire­s ont finalement été vus hors de Gaza.

Lundi, à la suite du refus par Israël de le laisser entrer à Gaza, Philippe Lazzarini l’avait fait savoir publiqueme­nt. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, avait alors déclaré vouloir que «M. Lazzarini puisse accéder aux zones où l’UNRWA opère». ■

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