Le Temps

«La Ligue nationale A? Pas à n’importe quel prix»

Le VBC Colombier fonce vers son deuxième titre de champion consécutif en deuxième division, mais après des phases d’excitation puis de négociatio­n, Thomas Gutknecht et son comité ont renoncé à une possible promotion. Le président s’en explique

- PROPOS RECUEILLIS PAR LIONEL PITTET

XLe VBC Colombier est à une victoire, contre STV Saint-Gall samedi à 18h30, de remporter un deuxième titre consécutif de champion de Ligue nationale B masculine de volleyball. Le public sera bouillant et prêt, le cas échéant, à faire la fête toute la nuit. Mais c’est sûr: l’équipe neuchâtelo­ise ne se réveillera pas en première division. Après avoir sérieuseme­nt planché sur une éventuelle promotion, le club a décidé d’y renoncer, comme le président Thomas Gutknecht le détaille au Temps.

«On avait un peu peur de perdre notre âme»

Comment s’explique le succès sportif actuel de Colombier? Il résulte d’un travail de longue date: un même entraîneur depuis six ans, la formation de jeunes du club et de la région, un joueur américain, Roy

Powell, qui amène son expérience depuis cinq ans… Notre but a toujours été de nous maintenir en LNB, simplement, mais petit à petit, nous avons acquis une bonne réputation d’équipe sympa, ce qui a attiré des joueurs suisses d’un calibre supérieur, dont Joël Bruschweil­er, un ancien junior du club qui a fait carrière à l’étranger. Avec lui, et quelques autres, nous avons changé de dimension sur le plan des résultats, jusqu’à ce titre de Ligue nationale B l’an dernier.

Et vous n’êtes pas montés. Quand on s’est posé la question, nous étions en mars, en plein play-off, rien n’avait été anticipé, c’était trop tard. Mais en vue de la saison actuelle, tout l’effectif est resté, donc nous avons pu nous préparer à ce que l’éventualit­é se présente à nouveau. Dès novembre 2023, nous avons constitué un comité spécial pour envisager une promotion. En décembre, nous avons manifesté notre intérêt à Swiss Volley et les discussion­s officielle­s se sont ouvertes au sujet de notre équipe, de notre budget, de nos objectifs. Un processus très stimulant. Même si, en février, lorsque le moment est arrivé de confirmer notre volonté de monter, sans possibilit­é ultérieure de faire marche arrière, nous avons renoncé. Avant d’avoir le verdict de la commission des licences, qui aurait dû se prononcer sur notre cas.

Pourquoi cette décision? Notre position a toujours été de dire: la LNA, oui, mais pas à n’importe quel prix. Nous étions prêts à faire beaucoup d’efforts, à nous plier à quasi toutes les contrainte­s, mais il y a un aspect sur lequel nous ne voulions pas céder: on voulait bénéficier d’une dérogation pour évoluer au moins une saison à

Colombier même. Nous le devions à notre public, incontesta­blement le meilleur de toute la Ligue nationale B, même si notre salle des Mûriers ne correspond pas aux standards de l’élite, pour différente­s raisons. Nous n’avons pas reçu de décision définitive, mais Swiss Volley nous préparait à un refus de la commission des licences, nous n’avons pas souhaité nous retrouver dans cette situation.

Où auriez-vous pu jouer, sinon aux Mûriers? Dans le Val-de-Travers ou le Val-de-Ruz, il y a des salles adaptées, mais il aurait fallu se mettre d’accord avec les communes, prévoir non seulement les matchs mais aussi des entraîneme­nts, et on avait un peu peur de perdre notre âme. Même si notre public nous avait suivis, 300 personnes dans une salle qui peut en accueillir 300 ou 1000, ce n’est pas la même ambiance… Par ailleurs, il y a des exemples récents de clubs qui ont tenté l’aventure LNA, ça a duré une saison ou deux, puis ils sont retombés plus bas que ce qu’ils étaient. C’est un risque que nous ne souhaition­s pas prendre, d’autant que nous n’avons pas l’équipe la plus jeune du pays. Certains joueurs ne vont pas continuer au-delà d’une ou deux saisons supplément­aires. Au final, c’est un ensemble de considérat­ions qui nous a amenés à ne pas vouloir monter.

L’an prochain, la LNA masculine ne comptera que six clubs. Estimez-vous que les exigences sont trop hautes? Ces dernières années, le volleyball suisse a misé sur la profession­nalisation de l’élite. Je ne suis effectivem­ent pas sûr que cela marche aussi bien qu’imaginé. Un championna­t un peu plus ouvert, avec un peu moins de contrainte­s, serait peut-être préférable, ne serait-ce que pour rendre possibles des aventures purement sportives, sans que les clubs aient besoin de bouleverse­r leurs structures d’une saison à l’autre. Mais il y aura des discussion­s ces prochains mois entre tous les clubs des trois ligues nationales et la fédération, c’est sûr, car personne n’est heureux d’une première division masculine ne regroupant que six équipes.

Mais c’est acté? Colombier n’y montera jamais? Là, nous arrivons à la fin d’un cycle. Nous allons en relancer un, avec des jeunes, et qui sait ce qui peut advenir dans cinq ans… Les conditions d’accès à l’élite pourraient évoluer, à moins que ce ne soient les infrastruc­tures à notre dispositio­n.

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