Le Temps

«Bad guys» contre «good guys», vraiment?

- JOËL GUÉLAT, BIENNE ÉCRIVEZ-NOUS! HYPERLIEN@LETEMPS.CH

Monsieur Nordmann, dans sa chronique parue dans Le Temps (20.03.2024), déclare que certains pays «veulent remplacer le système démocratiq­ue fondé sur le respect du droit internatio­nal par l’autoritari­sme». Cette vision «noir ou blanc» ou «bad guys vs good guys» du monde me paraît totalement irréaliste. Si le respect des droits humains et de la justice dans les 4 pays mentionnés, Russie, Chine, Iran et Corée du Nord, est un instrument politique qui ne donne aucune garantie, il est important de mentionner que les pays occidentau­x, de tout temps, ne respectent le droit internatio­nal et les valeurs que lorsque cela les arrange. Sans vouloir entrer dans les détails, on peut se remémorer les tragiques colonisati­ons et l’esclavage qui ont laissé des séquelles indélébile­s, comme le montre l’exemple actuel d’Haïti.

On prend souvent les Etats-Unis comme un modèle de démocratie. Permettezm­oi d’en douter. Ce pays a massacré une grande partie de sa population indigène, a soutenu des coups d’Etat contre des dirigeants élus démocratiq­uement et a ainsi soutenu des dictatures militaires très meurtrière­s. Les Etats-Unis ont aussi envahi des pays tels l’Irak et l’Afghanista­n sur la base de mensonges ou pour défendre leurs intérêts et cela au mépris des intérêts des population­s locales. Encore aujourd’hui, comment justifier le blocus économique et commercial des Etats-Unis contre Cuba depuis 1960? Chaque année, l’Assemblée générale de l’ONU vote une résolution demandant d’abandonner cet embargo. En 2023, 187 Etats ont voté cette résolution. Seuls les Etats-Unis et Israël ont voté contre.

Que penser aussi du système électoral des Etats-Unis? Dans la plupart des Etats, c’est le système majoritair­e qui prévaut. Lorsqu’un parti arrive en tête, tous ses candidats (grands électeurs) sont élus. C’est la règle du «winner-takes-all». Ainsi, seuls les deux grands partis historique­s peuvent gagner une élection, et pour certains Etats l’issue est courue d’avance car ils sont historique­ment ancrés dans la mouvance d’un parti. Au Capitole, seuls deux partis sont face à face, ce qui est plus facile pour trouver un compromis que de devoir composer avec une ribambelle de petits partis. Mais cela ne s’apparente-t-il pas à une sorte de dictature?

Quant à nous, Européens et Suisses, nous ne sommes pas toujours cohérents dans l’applicatio­n des droits humains. Nous n’avons aucun scrupule à faire du commerce avec des régimes autoritair­es et qui abusent des droits humains et fermons volontiers les yeux si nous pouvons exporter notre production et acheter des marchandis­es à moindre coût car, si nous prenions des sanctions de manière isolée, nous nous retrouveri­ons aussi isolés et notre standard de vie en souffrirai­t. En conclusion, nous devrions montrer plus de courage dans l’applicatio­n des droits humains et du droit internatio­nal tout en continuant à critiquer la manière de fonctionne­r des pays qui nous font peur et de ceux qui se disent démocratiq­ues. ▅

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