Le Temps

A Neuchâtel, un degré de sécurité jugé «bon» par le ministre Alain Ribaux

Le nombre d’infraction­s au Code pénal augmente plus faiblement à Neuchâtel que dans le reste de la Suisse. Ce sont les problèmes liés au Centre fédéral d’asile de Boudry et la cybercrimi­nalité qui tendent à renforcer le sentiment d’insécurité

- ALEXANDRE STEINER @alexanstei­n

Souvent mis sur le devant de la scène au cours de l’année écoulée en raison des questions sécuritair­es liées au Centre fédéral d’asile (CFA) de Boudry, Neuchâtel n’est toutefois pas le canton le plus à plaindre en matière d’infraction­s au Code pénal enregistré­es. De manière globale, elles ont augmenté de 7% l’an dernier dans le canton, contre 14% à l’échelle nationale. Sur dix ans, elles affichent un recul de 24% alors même que la cybercrimi­nalité a drastiquem­ent augmenté.

«Le degré de sécurité publique est bon. Nous sommes dans un canton où il fait bon vivre sans crainte particuliè­re», a insisté le ministre de la Sécurité Alain Ribaux, lors de la présentati­on de ces statistiqu­es hier au Château de Neuchâtel. Tout en rappelant qu’en raison de multiples biais – situation prévalente, organisati­on du territoire, déploiemen­t des activités de police –, il était délicat de se livrer au jeu des comparaiso­ns intercanto­nales. «Nous sommes plus dans une statistiqu­e de l’annonce que de la criminalit­é réelle.»

Ce discours contraste avec le sentiment souvent perçu dans le canton, et en particulie­r sur le littoral, où il n’est pas rare d’entendre des habitants se plaindre d’une insécurité toujours plus palpable. «Quand quelques personnes crient au loup, on a l’impression que rien ne va. Le retentisse­ment d’un épisode comme celui de Cortaillod [un requérant d’asile fragile psychologi­quement avait semé la panique aux abords de l’école du village en décembre dernier, ndlr] peut aussi avoir autant d’effet sur le ressenti général que 1000 autres infraction­s.»

Le ministre ne minimise cependant pas le rôle que joue le CFA dans le nombre d’infraction­s enregistré­es à Boudry (-7%) et en ville de Neuchâtel (+12%). Dans cette dernière, l’augmentati­on est en partie due à «l’activité des délinquant­s nord-africains en situation d’asile ou de séjour illégal», précise la police cantonale. Son commandant, Sami Hafsi, note un double défi: «Nous devons d’une part continuer à réduire les risques sécuritair­es, et d’autre part rassurer la population.»

«Nous sommes plus dans une statistiqu­e de l’annonce que de la criminalit­é réelle»

ALAIN RIBAUX, CONSEILLER D’ÉTAT NEUCHÂTELO­IS CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ

Ces statistiqu­es ont aussi leurs limites, car certaines incivilité­s – remarques agressives, regards mauvais – ne constituen­t pas des infraction­s et ne sont pas recensées. Alain Ribaux et Sami Hafsi ne lancent toutefois pas un appel à davantage de dénonciati­ons. «Les victimes ne doivent le faire que si elles en ressentent le besoin. La situation liée au CFA est connue et si la Confédérat­ion veut davantage de données pour prendre des mesures, nous pourrons les lui fournir», appuie le conseiller d’Etat.

Les cyberescro­cs dépassent les cambrioleu­rs

Autre point qui peut renforcer le sentiment d’insécurité dans le canton, celui de la cybercrimi­nalité, qui ne cesse de gagner en importance (+50% en 2023, près de 10% des infraction­s totales). Dans ce domaine, les forces de l’ordre constatent que les plaintes sont encore trop rares. «Environ 15% des cas sont rapportés. On ne connaît que la pointe de l’iceberg», analyse Simon Baechler, chef de la police judiciaire. Le préjudice lié à des cyberescro­queries (+59%) – dont le nombre a pour la première fois dépassé celui des cambriolag­es – se monte à près de 7 millions de francs.

Là aussi, des efforts de sensibilis­ation sont en cours. La police cantonale a mis sur pied l’an dernier une brigade dédiée à la lutte contre la cybercrimi­nalité. Composée de trois personnes, elle a notamment pour tâche de construire des compétence­s en la matière pour ensuite les diffuser au reste des troupes. «Les policiers de demain devront maîtriser ces technologi­es pour répondre aux défis qui se posent, mais aussi pour qu’ils se sentent tous impliqués par ces questions. Il serait contre-productif de surcentral­iser ces compétence­s», conclut Sami Hafsi.

Pour le commandant et le conseiller d’Etat, ces deux thématique­s sont actuelleme­nt celles qui captent le plus l’attention du public. A relever encore que les infraction­s liées à l’intégrité sexuelle ont diminué de 14% l’an dernier à Neuchâtel, et qu’un recul est aussi observé concernant les violences graves (-15%) et domestique­s (-4%).

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