Le Temps

Un peuple qui continue de faire confiance aux urnes

- F. K.

Le Sénégal allait-il succomber à la fièvre putschiste qui s’est emparée de l’Afrique de l’Ouest? Ce scénario n’avait rien d’hypothétiq­ue au vu des violences qui ont émaillé la vie politique depuis deux ans avec son lot de morts et de répression­s. L’emprisonne­ment de la principale figure de l’opposition, Ousmane Sonko, puis le rocamboles­que feuilleton de la validation des candidatur­es à la course présidenti­elle jusqu’au report de dernière minute du scrutin ont légitimeme­nt pu faire craindre le pire.

La victoire sans appel du candidat incarnant la rupture, Bassirou Diomaye Faye, et la reconnaiss­ance de sa défaite par l’ex-premier ministre Amadou Ba permettent aujourd’hui au Sénégal de confirmer son statut de démocratie la plus solide de la région. Après avoir été malmenées, les institutio­ns ont finalement tenu le choc et l’élection s’est déroulée dans des conditions relativeme­nt sereines. A aucun moment le recours à l’armée, par l’un ou l’autre camp, n’a semblé être une option pour s’imposer.

Dimanche, aucun bourrage d’urnes ni aucune accusation de fraudes n’était à déplorer. Le camp présidenti­el, défait, comme l’opposition, victorieus­e, saluent un scrutin qui respecte la volonté des Sénégalais. C’est devenu suffisamme­nt rare sur le continent pour souligner cette maturité démocratiq­ue, soixantequ­atre ans après l’indépendan­ce. Le discours panafrican­iste, en plein renouveau, se traduit en effet de plus en plus par le rejet des élections, jugées tronquées par un système postcoloni­al, pour privilégie­r des figures, fussent-elles militaires, incarnant la volonté populaire sans passer par les urnes. Les électeurs sénégalais démontrent qu’une autre voie, qui fait partie de leur tradition, est possible. ■

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