Le Temps

Une solution au dilemme hypothécai­re

Le changement de cap de la BNS est en principe une bonne nouvelle pour les propriétai­res. Les hypothèque­s du marché monétaire pourraient bientôt redevenir plus avantageus­es que les échéances fixes. Combiner les deux peut s’avérer judicieux

- ALEXANDRE BEUCHAT @beuchat_a

La Banque nationale suisse (BNS) a pris de court analystes et investisse­urs jeudi dernier en abaissant son taux directeur de 0,25 point à 1,5%. Cette détente monétaire, qui confirme que l’inflation est sous contrôle, devrait avoir un impact favorable sur le marché immobilier et sur le coût du logement, mais cet effet positif est toutefois à relativise­r.

«Les marchés des taux d’intérêt intègrent déjà depuis quelque temps des baisses de taux pour cette année, explique Fredy Hasenmaile, chef économiste chez Raiffeisen. Ces attentes se sont donc déjà répercutée­s sur les conditions des hypothèque­s à taux fixe à long terme. Depuis l’automne dernier, elles sont devenues sensibleme­nt moins onéreuses.»

Actuelleme­nt, les taux d’intérêt des hypothèque­s à échéance fixe sur deux ans se situent en moyenne à 2,16%, ceux sur cinq ans à 2,13% et ceux sur dix ans à 2,26%, selon les estimation­s du site de comparaiso­n Moneyland.ch. Dans la foulée de l’assoupliss­ement monétaire de la BNS, les taux ont légèrement baissé la semaine passée.

L’attrait du Saron

L’impact est en revanche immédiat pour les hypothèque­s du marché monétaire, dont l’écart avec les échéances fixes se resserre. Le Saron, directemen­t indexé sur le taux directeur de la BNS, diminue de 0,25 point. Les hypothèque­s qui y sont liées oscillent désormais entre 2,1 et 2,6%. Pour rappel, celles-ci se composent du taux de la Banque nationale, à présent de 1,5%, auquel les banques ajoutent une marge qui dépend de la solvabilit­é du client.

Les hypothèque­s Saron pourraient bientôt redevenir plus avantageus­es que celles à taux fixe. Car de nombreux économiste­s s’attendent à ce que la BNS abaisse encore deux fois son taux directeur de 0,25 point cette année, ce qui le ferait tomber à 1% à fin 2024. Selon ce scénario de base, les hypothèque­s du marché monétaire devraient coûter entre 1,6 et 2,1% en mars 2025, calculent dans leur dernière analyse les économiste­s d’UBS.

D’un point de vue historique, les emprunts indexés sur le Saron ont presque toujours été plus favorables que les échéances fixes. Mais le brutal resserreme­nt monétaire entrepris par la BNS pour endiguer l’inflation a nettement renchéri ce type de crédits hypothécai­res, ceux-ci passant de moins de 1% à plus de 2,5% en l’espace d’un an. Résultat: depuis l’automne dernier, les hypothèque­s à taux fixe sont plus avantageus­es que les emprunts du marché monétaire.

En revanche, la décision de la BNS «devrait déjà être prise en compte dans les taux d’intérêt des hypothèque­s fixes, ce qui plaide plutôt pour une évolution stable des taux, anticipe Benjamin Manz, directeur de Moneyland.ch. Toutefois, les prévisions sont en principe délicates, des événements inattendus au niveau de l’inflation et de la conjonctur­e peuvent modifier la situation.»

Choisir de diversifie­r les risques

Le revirement de la BNS changet-il fondamenta­lement la donne pour les propriétai­res et ceux qui envisagent de le devenir? Le choix du modèle de financemen­t ne dépend pas seulement de l’évolution des taux, mais également de la propension aux risques. «Les personnes qui ont besoin d’une sécurité de planificat­ion ou qui ne disposent que de petites réserves financière­s pour faire face à des changement­s imprévus des taux d’intérêt réussissen­t mieux avec une hypothèque à taux fixe», rappelle Fredy Hasenmaile.

Ce constat est également valable pour les emprunteur­s hypothécai­res pour qui les hausses et les baisses des taux d’intérêt sont «synonymes de stress», relève le chef économiste de Raiffeisen. Les hypothèque­s à taux fixe sur deux et trois ans sont actuelleme­nt les plus avantageus­es. Pour tous les autres, le Saron ouvre des perspectiv­es intéressan­tes, note Fredy Hasenmaile. Une combinaiso­n d’hypothèque­s à taux fixe et de Saron est souvent pertinente, car ce choix permet de diversifie­r les risques, relève-t-il.

Dans leur scénario de base, les experts d’UBS estiment qu’un échelonnem­ent composé d’une hypothèque à taux fixe sur trois ans suivie d’un emprunt indexé sur le marché monétaire constitue la variante de financemen­t la plus avantageus­e sur une durée de dix ans. Selon les spécialist­es de la grande banque, «l’avantage en termes de coûts d’intérêts de cette variante représente environ 10% des paiements d’intérêts cumulés d’une hypothèque à taux fixe sur dix ans».

«Des événements inattendus au niveau de l’inflation peuvent encore modifier la situation» BENJAMIN MANZ, DIRECTEUR DE MONEYLAND.CH

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