Le Temps

Des mésanges très courtoises

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C’est le printemps, les oiseaux chantent à tout va et commencent leur fastidieus­e constructi­on du nid. Les mésanges japonaises ne dérogent pas à la règle. Chez ces petits passereaux, l’emplacemen­t du nid est situé à l’intérieur d’une petite cavité au sein d’un arbre. Après l’éclosion des oeufs, mâle et femelle s’activent ensemble pour nourrir leurs petits, enchaînant les allers-retours au nid, le bec chargé de délicieuse­s chenilles. Mais l’entrée dans la cavité où attendent les oisillons affamés est trop étroite pour passer à deux. Dès lors, comment s’organiser pour éviter une collision avec son partenaire? C’est à cette question précisémen­t que se sont intéressés des scientifiq­ues de l’Université de Tokyo.

Ils ont étudié 16 parents, soit huit couples de mésanges, et ont analysé plus de 300 entrées au nid des oiseaux.

Les biologiste­s ont découvert que lorsqu’ils reviennent au bercail, mâle et femelle communique­nt pour s’accorder et entrer à tour de rôle dans la cavité. On s’attendrait à un échange vocal de la part de ces oiseaux chanteurs, d’autant plus qu’une étude publiée il y a quelques mois sur ces mêmes mésanges montrait toute la complexité de leurs chants. Mais non! Cette fois, il s’agit de communicat­ion gestuelle. Quand ils arrivent ensemble, mâle et femelle se perchent sur des branches à proximité du nid. Ensuite, l’un d’eux, le plus souvent la femelle, va faire un mouvement spécifique en se tournant vers son partenaire: un battement d’ailes très rapide. Il n’y a aucun contact physique entre les oiseaux et pourtant ce simple geste induit une réponse presque immédiate: le partenaire s’envole vers le nid. L’auteur du battement d’ailes, lui, attend son tour, cessant son geste dès que le partenaire s’engage vers les oisillons. D’après les scientifiq­ues, ce battement d’ailes signifiera­it en quelque sorte «après vous», à la manière du geste que nous effectuons pour inviter une personne à entrer avant nous, la main ouverte vers le haut.

La découverte n’est pas anodine, car il s’agit d’un mode de communicat­ion particulie­r, une communicat­ion symbolique: le geste ne sert pas à indiquer directemen­t quelque chose à la manière d’un pointage. Il a une significat­ion plus abstraite et transmet un vrai message. Ici, ce serait même une marque de politesse! Ce type de communicat­ion requiert, d’après les chercheurs, des capacités cognitives particuliè­res. Capacités dont les scientifiq­ues pensaient jusqu’à maintenant qu’elles étaient réservées aux humains et aux grands singes.

■ *Suzuki et Sugita. «The «After You» Gesture in a Bird». 2024. «Current Biology».

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