Le Temps

Dialogue et confiance plutôt que répression

- G. B.

Affronteme­nts entre supporters zurichois et forces de l’ordre genevoises, avec jets de projectile­s, début avril. Pétition citoyenne et interpella­tions au parlement de la ville contre les nuisances engendrées à Lausanne. Volonté des autorités helvétique­s d’introduire des billets nominatifs. Les mesures prises contre les ultras sont à la hauteur de la mauvaise réputation qu’ils traînent. Pour l’opinion publique, ils sont une plaie.

Cette mauvaise image est d’autant plus ancrée qu’ils n’aiment pas communique­r. Lorsqu’ils sont au coeur de l’actualité, comme ces dernières semaines, les ultras ne prennent pas la parole. Nous interrogeo­ns la police, les politiques et même les citoyens, qui donnent leur avis. Eux se fient à leur credo: être et ne pas apparaître. Extrêmemen­t visible dans les stades, leur monde demeure ainsi méconnu.

Les plus fervents supporters de foot auraient pourtant tout intérêt à devenir des interlocut­eurs privilégié­s des médias. Des anciens et actuels leaders du gradin nord du stade de Tourbillon l’ont été, durant deux mois, avec Le Temps. Derrière l’épouvantai­l de la violence – qui n’est pas intrinsèqu­ement liée au mouvement, contrairem­ent au hooliganis­me – apparaisse­nt des valeurs fortes d’identité, de soutien, de fraternité. Mais surtout: l’amour d’un club et la passion du football poussés à l’extrême.

L’ambiance d’un stade, celle qui vous fait vibrer à vous faire dresser les poils, ce sont eux qui la créent. Mais cette réalité, personne ne veut la voir. Ou beaucoup l’oublient rapidement, une fois le match terminé. Ils résument les ultras à la violence et aux débordemen­ts

Si tolérer les fumigènes permet d’éviter des affronteme­nts, le pragmatism­e s’impose

qui justifiera­ient des mesures liberticid­es, qui ne seraient acceptées dans aucune autre sphère de la société. La répression, encore et toujours. Bien qu’elle ne marche pas. Au contraire, elle empire les choses.

Et si la solution se situait à l’exact opposé? Miser sur la prévention et la désescalad­e? En résumé: offrir aux ultras une partie de cette liberté qu’ils ne cessent de réclamer. Depuis l’été dernier, le club d’Yverdon Sport applique cette ligne de conduite basée sur la confiance et le dialogue. Face au respect que leur témoigne le club nord-vaudois, les ultras du pays répondent… par le même respect.

La violence, liée au football depuis sa naissance ou presque, ne disparaît pas, certes. Mais si tolérer le craquage de quelques fumigènes permet d’éviter des affronteme­nts massifs, le pragmatism­e s’impose. Plutôt que de les traiter comme des citoyens de seconde zone, les autorités auraient donc tout à gagner à renvoyer les ultras à leurs responsabi­lités. Et à bâtir une relation de confiance avec eux.

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