Le Temps

A Paris, Sciences Po s’embrase aussi

Plusieurs mobilisati­ons pro-palestinie­nnes dans les différents immeubles de la grande école française ont nécessité l’interventi­on de la police. Un mouvement qui monte en parallèle de différente­s interventi­ons de La France insoumise

- PAUL ACKERMANN, PARIS @paulac

«Tout le monde déteste Netanyahou!» «Netanyahou casse-toi! La Palestine n'est pas à toi!» Ce vendredi, au pied des barricades de poubelles et de Vélib', entre les lectures de témoignage­s palestinie­ns et les minutes de silence, les chants se succédaien­t devant le bâtiment historique de Sciences Po, rue Saint-Guillaume, dans les beaux quartiers du VIIe arrondisse­ment de Paris. Sur les mêmes airs que dans toutes les habituelle­s manifestat­ions syndicales françaises, ces slogans et ces actions faisaient aussi écho aux mobilisati­ons spectacula­ires dans plusieurs grandes université­s américaine­s, dont certaines sont partenaire­s de la grande école française. A Paris hier, les forces de l'ordre ont dû intervenir pour empêcher des échauffour­ées avec des militants pro-israéliens. En conséquenc­e, le préfet a demandé l'évacuation des lieux par la police.

Plusieurs élus de la gauche radicale

«On est une université leader en sciences politiques, sans même penser en termes de valeurs et d'humanité, en pensant rationnell­ement au droit internatio­nal, on se doit de poser des termes sur ce qu'il se passe à Gaza, comme nous l'avons fait pour l'Ukraine.» Sarah, en master gouvernanc­e et diplomatie faisait partie des dizaines voire des centaine d'étudiants, dont plusieurs coiffés de keffiehs, qui bloquaient le campus ce vendredi. Elle a été en contact avec l'administra­tion de la grande école même si «le mouvement est autogéré, sans représenta­nt» officiel. «On vit les choses à court terme, sans se projeter, nous explique-t-elle. Plusieurs facteurs peuvent nous faire arrêter ou continuer, selon ce que nous déciderons en assemblée générale.»

Un message de soutien de Jean-Luc Mélenchon a été diffusé et attentivem­ent écouté par la foule

Les étudiants demandent un townhall sur le modèle américain avec l'ensemble du corps étudiant de Sciences Po et l'encadremen­t pour débattre de la position de l'institutio­n sur le conflit israélo-palestinie­n. «Nous voulons aussi une investigat­ion sur les université­s partenaire­s de Sciences Po en Israël, continue Sarah. Quand la Russie a attaqué l'Ukraine, on a coupé les partenaria­ts avec les université­s russes. Nous demandons que la même chose soit faite. Par ailleurs, certains partenaire­s privés de Sciences Po comme Carrefour ou Axa sont impliqués dans l'occupation illégale du territoire palestinie­n. Il faut que ça cesse.»

Une position qui dépasse donc la situation actuelle à Gaza. «Nos prises de position pro-palestinie­nnes ne datent pas du 7 octobre, cela fait longtemps que nous dénonçons l'occupation.» Et pourquoi spécifique­ment sur la Palestine? Personnell­ement, Sarah répond que plusieurs sujets lui tiennent à coeur. «Je me suis beaucoup mobilisée pour l'Ukraine, par exemple», conclutell­e.

Cette mobilisati­on faisait suite à l'occupation de l'autre grand campus de l'institutio­n à Paris, toujours dans le quartier de Saint-Germain-des-Prés. Dans la nuit de mercredi à jeudi, une dizaine de tentes y avaient été installées avant que la police ne vienne déloger les manifestan­ts.

Plusieurs élus de La France insoumise étaient par ailleurs présents sur place ce vendredi rue Saint-Guillaume, ceints de leur écharpe tricolore. Un message de soutien de Jean-Luc Mélenchon, en déplacemen­t hors de Paris, a même été diffusé et attentivem­ent écouté par la petite foule.

C'est justement à Sciences Po Paris que le leader de la gauche radicale avait livré lundi ses explicatio­ns sur ses déclaratio­ns polémiques qui avaient suivi l'interdicti­on d'une conférence prévue à Sciences Po Lille la semaine précédente. En campagne pour les élections européenne­s, La France insoumise mise en effet sur les université­s pour se relancer avec une ligne pro-palestinie­nne bien plus dure que celle du Parti socialiste, parti sur les chapeaux de roues dans les sondages et dominateur à gauche. Ce vendredi rue Saint-Guillaume, la militante franco-palestinie­nne Rima Hassan, dont la présence sur la liste insoumise a fait beaucoup de vagues, a d'ailleurs été accueillie sous les «Rima, Rima, Sciences Po est avec toi». ■

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