Le Temps

Le royaume de Nemo

Après la victoire du Biennois Nemo samedi, la Suisse devra organiser la prochaine édition du télécroche­t. La SSR parle d’une démarche «très coûteuse» et compte sur une «ville forte» – autrement dit, qui ouvrira son porte-monnaie

- @NicoDufour X NICOLAS DUFOUR

«Quelque part entre les zéros et les uns, j'ai trouvé mon royaume», chante Nemo dans «The Code». Samedi, comme Céline Dion en 1988, il a offert un «micro de cristal» à la Suisse

■ Depuis, le pays est un peu différent. L'artiste non binaire porte haut le questionne­ment des codes du genre, et la SSR va devoir organiser la 69e édition de ce télécroche­t géant en 2025

■ Dans cette perspectiv­e se profile déjà une compétitio­n entre les villes – Genève a déjà annoncé sa candidatur­e – et des discussion­s s'amorcent sur le financemen­t de cette grand-messe européenne

Après une édition 2023 en forme de boulevard pour la candidate suédoise Loreen, et sans chichi, la soirée de l’Eurovision, samedi, a eu l’air d’un grand cirque. Dans la journée, quelques milliers de personnes ont manifesté à nouveau dans les rues de Malmö contre la présence de la chanteuse israélienn­e, laquelle a reçu quelques sifflement­s au début de sa performanc­e. L’ambiance a été électrisée un peu plus encore par l’éviction, quelques heures avant le spectacle, du populaire candidat hollandais pour une altercatio­n aux circonstan­ces fumeuses – mais dans ce climat tendu, l’Union européenne de radiodiffu­sion (UER), organisatr­ice, n’a voulu prendre aucun risque.

La concurrenc­e entre le candidat croate Baby Lasagna, l’Israélienn­e Eden Golan et le Suisse Nemo a fait rage jusqu’au bout, un brin troublée par le Français Slimane qui a réalisé un score honorable, en quatrième position. Le Croate a été longtemps donné gagnant, mais le Biennois l’a emporté, en particulie­r grâce aux votes des jurys, très favorables.

Dès lors, le prochain télécroche­t européen aura lieu en Suisse. Il représente­ra «un défi financier» pour la SSR, admet son porte-parole Niklaus Leuenberge­r. Il est trop tôt, plaide-t-il, pour parler de chiffres. Selon certains médias, l’édition 2023 à Liverpool avait coûté au moins 30 millions de francs. La SSR fait remarquer que «nous recevrons une contributi­on financière de l’UER, et il y aura des recettes de billetteri­e et de sponsoring».

A Genève, Palexpo sur les rangs

Mais sans conteste, «l’organisati­on du concours peut être très coûteuse, en particulie­r pour le pays hôte. Cela comprend les coûts liés aux sites, à la sécurité, à la publicité et à d’autres dépenses» note le porte-parole, qui glisse: «Il faut une ville partenaire forte qui prenne en charge une partie considérab­le des coûts et des prestation­s.»

Les candidates sont prévenues. Ainsi, la ville de Malmö a déboursé 2,4 millions de francs pour les frais de la compétitio­n, dont le coût total n’a pas été dévoilé.

Les villes suisses intéressée­s vont donc se porter candidates, pour une décision attendue pendant l’été. A Genève, la direction de Palexpo n’a pas perdu de temps: dimanche matin, moins de neuf heures après le triomphe de Nemo à Malmö, elle a annoncé postuler pour l’accueil de l’Eurovision 2025.

La direction du complexe genevois affirme qu’elle a déjà déposé un dossier de candidatur­e «en vue de l’accueil de cette rencontre qui est l’un des événements télévisuel­s planétaire­s les plus importants». Elle dit oeuvrer «en collaborat­ion avec les autorités genevoises depuis plusieurs semaines pour accueillir l’événement à Genève en 2025».

L’Eurovision étant pilotée par les diffuseurs audiovisue­ls publics, Palexpo joue la carte historique en rappelant que l’Union internatio­nale de radiophoni­e a été créée à Genève en 1925, vingt-cinq ans avant l’Union européenne de radiodiffu­sion, qui possède et opère l’Eurovision.

«Plusieurs millions pour l’économie suisse»

Palexpo représente environ 32 000 m² pouvant accueillir près de 15 000 spectateur­s. Les responsabl­es affirment pouvoir mettre à dispositio­n la totalité des trois centres de congrès de Palexpo pour l’accueil de plus de 2000 journalist­es.

La Malmö Arena, où s’est déroulée la soirée de samedi (comme l’édition de 2013, après la première victoire de Loreen en 2012), affiche une capacité en mode concert de 15 500 personnes. Samedi, elle comptait 9000 spectateur­s. La ville de Malmö s’attendait à accueillir plus de 100 000 personnes.

A ce propos, alors que la période est déjà agitée pour la SSR avec une initiative visant à réduire la redevance et un Conseil fédéral qui penche pour une baisse de son montant, le porte-parole veut souligner qu’«un effet financier positif est certaineme­nt le fait que l’événement générerait des recettes de plusieurs millions de francs pour l’économie suisse». ■

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(MALMÖ, SUÈDE, 9 MAI 2024/IDA MARIE ODGAARD/RITZAU SCANPIX/IMAGO IMAGES)
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(MALMÖ, SUÈDE, 11 MAI 2024/TOBIAS SCHWARZ/AFP) Nemo lors de sa performanc­e scénique samedi soir. La ville de Malmö a déboursé 2,4 millions de francs pour les frais de la compétitio­n, dont le coût total n’a pas été dévoilé.

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