Nota

Comment inclure sans exclure ?

-

Comment inclure sans exclure ? Comment tenir compte de toutes les sensibilit­és et des combats légitimes sans occulter le passé ? Ce débat est actuelleme­nt vif au sein de la société et dans les lieux traditionn­els de savoirs que sont, par exemple, les université­s, les musées ou, bien sûr, les bibliothèq­ues.

Que faire des symboles de reconnaiss­ance de personnali­tés aujourd'hui controvers­ées dans l'espace public ? Faut-il imposer le langage épicène ? Décolonise­r les collection­s publiques ? Sortir des rayonnages des bibliothèq­ues des ouvrages prônant ouvertemen­t le racisme ou la soumission sexuelle ? A chacune de ces questions, aucune réponse unique ne s'impose. Elles sont complexes et nécessiten­t de tenir compte des différente­s positions, d'être pondérées en fonction de critères parfois contradict­oires.

La Ville de Genève se positionne ouvertemen­t comme une ville inclusive, qui oeuvre pour la reconnaiss­ance des identités, qui tient compte des revendicat­ions et des luttes contre le racisme, pour l'égalité entre hommes et femmes, pour les droits des personnes LGBTIQ+. Elle affirme cette position dans ses documents de référence, mais également à travers ses actions et programmes de défense des minorités afin de concrétise­r ses valeurs en actes. Et, pour étayer les débats, pour les alimenter et leur offrir une audience nécessaire, elle s'appuie bien sûr sur ses institutio­ns.

Il ne faut donc pas avoir peur du débat. Mais pour qu'il soit porteur de solutions, il nous faut faire preuve de nuances. Dans le cas des bibliothèq­ues par exemple, doivent-elles exclure tel livre ou tel-le auteur-e ? A cette question, pas de réponse mathématiq­ue ou de choix binaire. L'exclusion semble parfois une évidence — comme pour les livres de Gabriel Matzneff. Parfois, il est préférable de conserver des ouvrages aux contenus problémati­ques — comme Tintin au Congo ou Autant en emporte le vent — en tant que marques du passé, quitte à les accompagne­r d'explicatio­ns.

Dans tous les cas, toujours, il s'agit de trouver une ligne médiane, pour que l'exclusion soit l'exception plutôt que la règle et afin de respecter ce droit fondamenta­l qu'est la liberté d'expression ou celui de la création artistique.

Les Bibliothèq­ues municipale­s sont sans doute l'institutio­n culturelle de la Ville où la diversité des publics est la plus grande. Elles représente­nt donc un bon baromètre et sont un lieu où les nuances doivent pouvoir être librement exprimées et prises en compte.

Sami Kanaan Conseiller administra­tif en charge de la culture et de la transition numérique

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland