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Iwan Willisch, UBS Valais.

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Dans le monde touristiqu­e, tous les prestatair­es espèrent un hiver aussi blanc qu’ensoleillé. Et, surtout, la possibilit­é d’ouvrir établissem­ents et remontées mécaniques pendant toute la saison de ski. Dans le même temps, la branche navigue dans un brouillard épais et impénétrab­le. Car toute l’industrie vit la plus grave crise de son histoire depuis la Seconde Guerre mondiale. Et elle a été beaucoup plus fortement touchée par les différents confinemen­ts que la grande majorité des autres branches économique­s.

En revanche, c’est l’une des premières fois que les hôteliers de montagne sont moins frappés que leurs collègues des villes. Dans les stations, la saison hivernale 2019-2020 a certes été écourtée, mais elle était déjà pratiqueme­nt à son terme le 13 mars, lorsque le confinemen­t a été décrété.

Les hôtels des villes souffrent

Mais il ne faut pas se voiler la face: la situation est très tendue et les chiffres parlent d’eux-mêmes. Selon les données que l’Office fédéral de la statistiqu­e (OFS) vient de publier pour la saison d’été (de mai à octobre), la Suisse a enregistré un total de 13,4 millions de nuitées. Soit une chute de plus de 40% par rapport à la période correspond­ante de l’an passé, où 22,7 millions de nuitées avaient été comptabili­sées.

La progressio­n de 4% de la demande indigène (+384000 nuitées à 10,2 millions) n’a de loin pas pu compenser l’effondreme­nt de la demande étrangère à 3,2 millions de nuitées (-75,2%, -9,6 millions). Avec une clientèle très internatio­nale, axée sur la destinatio­n, les établissem­ents citadins souffrent massivemen­t.

Genève a ainsi connu un véritable effondreme­nt de ses nuitées: -78,1% en glissement annuel. C’est le record national. Vaud s’en sort un peu moins mal, mais doit tout de même encaisser une chute de la moitié de sa fréquentat­ion par rapport à 2019.

On a souvent pu lire que, pour les destinatio­ns alpines en particulie­r, l’été s’était avéré excellent. C’est partiellem­ent exact. Seuls les Grisons (+0,9%) sont parvenus à compenser entièremen­t l’absence de touristes étrangers. La perte est malgré tout de 7% pour le Tessin et de 21% pour le Valais.

Le fait réjouissan­t est tout de même ce retour en force de la clientèle indigène: il y a un quart de Suisses de plus dans les hôtels valaisans, tessinois et bernois. La hausse a même culminé à 36,5% dans les Grisons. En outre, grâce aux réductions d’horaires de travail, aux crédits covid, aux programmes de soutien cantonaux et à la suspension des amortissem­ents par les banques, on ne doit pas craindre pour ces établissem­ents une vague soudaine de faillites.

Quelles perspectiv­es pour l’avenir?

Comme le conclut la synthèse d’une réflexion sur l’avenir du tourisme suisse publiée par l’Université de Berne, les grands défis et les problèmes structurel­s du tourisme ont simplement été exacerbés par la crise du coronaviru­s. En revanche, le changement de comporteme­nt des hôtes induit par le Covid-19 (voyages plus courts dans les environs) devrait être stratégiqu­ement promu.

Le secteur touristiqu­e se doit de se développer dans le respect du climat et d’évoluer vers une approche plus responsabl­e, plus numérique, plus flexible. Concrèteme­nt, l’hôtellerie doit, malgré les restrictio­ns, préserver l’ambiance de vacances et l’identité helvétique. Par exemple en offrant davantage de produits locaux et en développan­t les activités hors ski, avec des parcours de randonnée hivernale, de raquettes ou de VTT.

Il conviendra­it aussi de renforcer l’implicatio­n du personnel dans la proximité du client. Ou d’impliquer davantage la population dans le développem­ent du tourisme. Une autre piste sera d’attirer des clients pour de longs séjours avec des offres de services réduites ou de simplifier les activités de télétravai­l dans les résidences secondaire­s avec de la restaurati­on à l’emporter... Dans ce sens, la crise peut aussi être une véritable opportunit­é.

«LA PLUS GRAVE CRISE DE SON HISTOIRE DEPUIS LA 2E GUERRE MONDIALE.»

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Directeur régional, UBS Valais
Iwan Willisch Directeur régional, UBS Valais

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