Le Maghreb au centre de l’option sécuritaire de l’Union Européenne
L’UE n’a pas trouvé mieux, au cours de son récent mini-sommet sur l’immigration, que d’ordonner la création de centres de « contrôle » et de plateformes de « débarquement ». Privilégiant de nouveau une voie qui n’a pas donné de résultats probants.
Déplacement à Tripoli, le 15 juillet 2018, de la cheffe de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, pour l’inauguration des locaux de la Délégation de l’Union Européenne (UE) d’assistance et de surveillance des frontières (Eubam).
Une visite qui ne peut beaucoup surprendre après le mini-sommet houleux des pays de l’UE, qui s’est tenu, fin juin 2018, à Bruxelles. Quatre pays (la Hongrie, la Pologne, la République Tchèque et la Slovaquie) ont boycotté un minisommet qui devait trouver une solution au déferlement continu de migrants sur les côtes européennes.
Un mini-sommet qui a une fois de plus adopté une politique on ne peut plus séculaire : « Mieux protéger les frontières européennes et renforcer les règles d’accueil des migrations ».
Deux décisions qui en disent long du reste sur cette inquiétude européenne concernant la question de l’immigration et qui s’est exprimée notamment par le refus de l’Italie, fin juin, d’accueillir un vaisseau, l’« Aquarius », chargé de migrants pour l’essentiel soudanais et érythréens.
Vagues et théoriques
La première ? La création de « centres contrôlés » en Europe pour mieux gérer les flux de migrants. La seconde ? Le lancement de « plateformes de débarquement » hors de l’UE pour gérer à l’avance les migrants et séparer ceux qui pourront entrer sur le Vieux continent de ceux qui devront en être expulsés.
Deux mesures vagues et pour ainsi dire théoriques. On ne sait pas en effet dans quelle mesure ces décisions pourraient être acceptées par les pays de la région
méditerranéenne. Et certains pays ont clairement annoncé qu’ils ne pourraient pas accueillir ni ces « centre contrôlés » ni encore moins ces « plateformes de débarquement ». Les querelles et les divisions qui ont accompagné le mini-sommet de Bruxelles donnent toute la mesure du reste des clivages d’une Union Européenne où des pays, comme l’Italie, la Hongrie ou encore l’Autriche, tombées dans l’escarcelle de l’extrême droite, veulent imposer des diktats anti-immigration. L’Autriche, qui assume pour six mois la présidence tournante de l’UE, souhaite, par exemple, qu’ « il ne soit plus possible, à l’avenir, déposer une demande d’asile sur le sol européen ».
Autant dire que l’option sécuritaire reste dominante dans le traitement de la question de l’immigration. Avec cette fois-ci une volonté de voir les pays du Maghreb faire le sale boulot. Un proverbe tunisien résume bien cette situation. On dit en effet dans le cas d’espèce qu’on « souhaite manger le marron grâce à la main du chat ».
Les Européens qui ont quelquefois la mémoire courte ou s’entêtent à ne pas voir la vérité en face, négligent, à ce propos, le fait que si le problème de l’immigration à partir de la Libye se pose aujourd’hui avec acuité c’est parce qu’un pays européen, qui s’appelle la France, a oeuvré sans ménagement à détruire la Libye en 2011.
Le régime de Kadhafi tombé, la Libye a été livrée à des bandes rivales sans foi ni loi qui s’enrichissent sur le dos d’immigrés illégaux. Certains ont utilisé une formule qui décrit bien l’oeuvre de la France en Libye : elle n’a pas fini le sale boulot ! Une façon de dire que faire tomber Kadhafi n’était pas suffisant