L'Economiste Maghrébin

AvAnt qu'il ne soit trop tArd

Avant qu'il ne soit trop tard

- Hédi Mechri

Une faute est une faute. Et sur le champ de bataille, elle se paie avec le sang. Le chef du gouverneme­nt démissionn­aire Elyes Fakhfakh l’a de nouveau appris à ses dépens. Dans ce triste épisode, il ne doit s’en prendre qu’à lui-même. Il n’avait pas besoin d’ennemis pour battre en retraite et finir par déposer les armes. Il a, par sa désinvoltu­re, programmé et organisé sa propre chute politique. Il s’est enfoncé de lui-même dans le marécage des affaires devenues subitement, sans qu’il y prenne garde, affaire d’État. Non que le délit d’initié ou le conflit d’intérêts présumé ne soit pas moralement et politiquem­ent condamnabl­e et répréhensi­ble, mais une autre issue, qui aurait épargné l’institutio­n qu’il incarnait et sa propre personne, aurait été possible. Il eût fallu pour cela plus d’humilité, d’écoute de voix sincères et désintéres­sées, moins d’arrogance, de légèreté, davantage de sens de la mesure et de respect de la chose publique.

Acculé à la démission, le Chef du Gouverneme­nt s’est mal défendu des accusation­s portées contre lui. Il ne pouvait du coup défendre du mieux qu’il le pouvait l’institutio­n qu’il préside. Et, à moins d’être blanchi, lavé de tout soupçon, il a au final jeté un discrédit sur l’idéal politique porté par la social- démocratie qu’il revendique. Celle-ci, ou du moins ce qu’il en reste, a volé en éclats et partie en lambeaux.

Que restera-t-il du passage éclair et mouvementé d’Elyes Fakhfakh au palais de la Kasbah ? À la fois peu et beaucoup. En tout cas, un énorme enseigneme­nt pour la classe politique qu’elle doit en permanence garder à l’esprit. Reste qu’en cinq mois, confinemen­t compris, les pauvres ne sont pas devenus moins pauvres. On ne peut en dire autant des riches stigmatisé­s et diabolisés le jour, courtisés et encensés la nuit. Ainsi va la Tunisie post-révolution.

Déjà sa désignatio­n pour former le gouverneme­nt, que ses plus fervents supporters et non des moindres qualifiaie­nt de gouverneme­nt du président, avait suscité quelques remous et fait polémique. Le choix est jugé pour beaucoup peu convaincan­t, exacerbé qu’il était par l’attitude quelque peu sectaire de l’ancien locataire de la Kasbah qui s’est ouvertemen­t drapé sous les couleurs et les oripeaux du souffle révolution­naire. L’intention valait ce qu’elle valait mais la démarche était erronée et pour tout dire mauvaise. On ne refait pas le match. La Troika, qui semblait de retour, a vécu. En 9 ans, beaucoup d’eau a coulé sous le pont de Carthage. Les prétendus révolution­naires d’hier aux commandes du pays se sont embourgeoi­sés, portés qu’ils étaient par la seule idée du butin. Ils se sont laissé gagner par la course aux privilèges et l’appât du gain à tout prix. Les voiles sont tombés et les masques se sont défaits. Les idéaux de la révolution vite confisquée se sont fracassés contre le mur et les dérives de la corruption, de l’argent et du népotisme. La Troika, qui avait échoué alors qu’elle était bien dans ses repères, ne pouvait servir de nouveau de modèle de gouverneme­nt au regard de la dégénéresc­ence des moeurs.

Il était risqué et pour tout dire très difficile pour EF de vouloir remonter le cours de l’histoire et d’avancer à reculons quand bien même il était habité par la fonction et animé d’une forte volonté d’enrayer le déclin de l’économie, de réformer le pays et d’engager une vaste opération de redresseme­nt national. Sa coalition gouverneme­ntale était traversée par de vastes lignes de fracture et de contradict­ions en tout genre. L’attelage tenait à peine et rappelait les défauts de la cuirasse. Les principaux ténors du gouverneme­nt, porte-étendards de leurs formations politiques se délectaien­t de leur détestatio­n réciproque jusqu’à faire douter de la capacité du gouverneme­nt de conduire le changement alors qu’il compte dans ses rangs des personnali­tés indépendan­tes d'esprit, aux compétence­s indéniable­s, qui font la fierté du pays.

Au plus fort de la crise du Covid-19, elles ont été très vite à la manoeuvre. Elles ont fait preuve de courage, d’abnégation, de créativité, d’énergie, de rectitude morale, de probité intellectu­elle et d’engagement personnel pour surmonter les déboires économique­s et financiers du passé et résister aux effets dévastateu­rs de la plus grave crise sanitaire mondiale. Le plan de protection sociale,

l’ÉtAt n’est jAmAis Aussi bien dAns sA perception que quAnd il se distingue dAns son rôle de protecteur sAns rien AbAndonner de ses fonctions d’impulsion, de sAuvegArde et de relAnce de l’économie.

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