L'Economiste Maghrébin

l’Aïd et l’odeur âcre de brûlé

- Mohamed Fawzi Blout Ancien ambassadeu­r

La raison du plus fort est toujours la meilleure. Qui ne connaît pas la fable et son auteur ? Le méchant carnivore et la gentille petite brebis. lLa morale a traversé les siècles sans prendre une seule ride. Le Loup et l’Agneau ou comment conclure un marché de dupes en introduisa­nt le loup dans la bergerie, et cela s’est passé en Tunisie à la faveur d’un dévoiement comme on en a rarement connu. Après liberté bâillonnée, c’est au tour de la révolution d’être confisquée. Et d’après vous, qui est le loup et qui est l’agneau ? Bien sûr que tout le monde connait la suite…l’Aïd et l’odeur âcre de brûlé. On égorge bien des moutons dont les prix affolent les compteurs : plus de mille dinars, qui dit mieux ? Cher, très cher pour un sacrifice dont je ne suis pas certain qu’on ait retenu la leçon : n’est pas Abraham et Ismaël qui veut. Un bon méchoui en ces temps de disette, tout ce que compte le pays de pauvres, le vaut bien. sadaka jariyah, Dieu vous le rendra. D’un pays presque ruiné et pauvre à pleurer, qui parmi tous ces apprentis politicien­s se soucie du fait que le prix d’un sacrifié, animal fût-il, puisse monter aussi haut ? Entre l’agneau qui bêle de peur, une Abir Moussi diabolisée qui crie au scandale et des islamistes qui jouent encore fois la victimisat­ion, on peut espérer qu’on ne laissera pas la présidente du PDL marcher seule… l’âge est un problème de l’esprit sur la matière. Si vous n’y prêtez pas attention, cela n’a pas d’importance. Je suis sûr que ni le président de la République, ni Rached Ghannouchi n’a lu Mark Twain. En revanche, chaque jour à Dieu ne plaise, ils font comme si, en prenant soin de semer la panique à chaque fois qu’ils ouvrent la bouche. Un peu trop de la part de deux présidents qui se détestent cordialeme­nt.

Au président Saied, je dirais ceci : je sais que vous êtes un homme bien, mais à quoi cela sert-il d’être un homme bien, si le bien-être, la sécurité de vos concitoyen­s et, partant, la stabilité du pays sont desservis ? Avoir le verbe haut, et l’action confuse, cela pose vraiment problème Monsieur le président. Vous ne pensez pas, alors que le pays brûle ? Al oustadh qui voulait être tout à la fois, je lui conseiller­ais de freiner ses ardeurs et de s’assagir, sa survie politique et la cohésion du pays en dépendent.

La Tunisie brûle-telle ? A chaque fois qu’un vent chaud souffle sur Tataouine, c’est la même question qui revient, lancinante : vanne fermée, production de phosphate arrêtée, à qui profite le crime ? Cela ne peut arriver que dans ce pays qui est le mien, le vôtre. Même la force publique ne fait plus peur quand les choses se gâtent. En arriver là, et ne pouvoir stopper l’hémorragie. Je veux bien admettre que là-bas, dans ces coins oubliés de la République, on ne peut plus vivre de sérénades sans lendemain.

Diabolique­s le cheikh et son joujou du moment Nabil Karoui qui n’est tout de même pas le premier venu, tant ce dernier nage dans l’opacité. Aux sources de la religion semble dire le gourou à son poulain, en feignant d’oublier qui l’a fait roi. Tu me renvoies l’ascenseur, je te le renvoie, et advienne que pourra. La politique, c’est comme ça, à prendre ou à laisser. Il y a les fins inavouable­s, et les enfants de coeur. Rallumer le feu dans ce sud aride, déshérité et appauvri. Là-bas, on égorge bien la bête, au figuré bien sûr. Et cela n’a pas d’importance, même si le prix est lourd à payer. Vive la République dévoyée, vive la Tunisie ! J’ai même envie de dire, osez, osez, osez, Abir Moussi, face à tous ces fous à lier. Citadelle inexpugnab­le la Tunisie ? Pas si sûr. Voir les digues de sécurité mises en place par Bourguiba, se rompre, et se dire plus dure sera la chute. Croiser le fer avec les enragés et s’interroger : qui aura le dernier mot, alors que tout autour n’est que faiblesse, compromiss­ion et sujétion ? Scénario à la libyenne en vue ? On en tremble déjà. Bataille existentie­lle impitoyabl­e pour une issue incertaine. Nous, on croise les doigts. Aujourd’hui, c’est Fakhfakh, à qui le tour demain ?

Faire du Abir Moussi sans jamais l’avouer

Quand les certitudes viennent à trembler et que tout le monde veut contre-attaquer. Cela me rappelle « l’Empire contre-attaque »du cinéma. On ne peut pas dire que les

Tunisiens aient été dupés : dupés une fois, deux fois, trois fois, c’est trop. Reprendre les mêmes et recommence­r, est tout sauf une supercheri­e. On ne peut toujours dire que c’est la faute aux politicien­s. Manoeuvres dilatoires pour créer l’illusion, et cela me ramène encore une fois à ce bon vieux Hajej Ibnou Youssef… « Inacceptab­le » nous dit le président de la République très remonté à propos de ce qui se passe au sein de l’hémicycle, n’excluant rien. Prêt à sévir et à tirer à boulets rouges sur les agitateurs. On devine qui il vise. Autant l’avertir tout de suite : ne vous trompez pas d’adresse Monsieur le président ! Abir Moussi au sommet de l’Etat, ce n’est même plus une ineptie ! Qui aurait parié un pécu sur la dame qui voulait avoir la peau des islamistes ? Ah, l’argent, honni soit qui mal y pense, même si cela peut vous coûter votre poste, voire votre carrière, même si tout le monde est dans le même sac. Conflit d’intéréts pour Elyès Fakhfakh, et les autres alors, qu’en fait-on ? Comme vous, j’imagine, je pensais tout bêtement que l’âne était le quadrupède le plus stupide de la planète. Je découvre qu’il y a dans nos murs des bipèdes encore plus stupides que notre pauvre animal et des idiots utiles qui ne se cachent même plus. Thawret sahib al himar. Je crois qu’une replongée dans l’histoire mouvementé­e de ce pays serait d’une grande utilité pour mieux comprendre. On achève bien les moutons. Je ne sais si les habitants de ce pays ont encore foi en quelque chose, mais ce dont je suis sûr, c’est qu’ils n’ont pas perdu l’appétit ! Le pays n’est plus à deux doigts d’un scénario à la libyenne, mais bien à un doigt… Seifeddine Makhlouf, épée de la religion, mon oeil. Dites plutôt son fossoyeur. J’ai beau chercher dans tout ça Bochra BelHaj Hamida, je ne l’ai guère entendue, encore moins vue. Mais où est donc passée Madame COLIBE ? Entre une Abir Moussi qui se bat, une Samira Chaouachi qui n’a pas fini de faire du tourisme parlementa­ire et une Samia Abbou qui, en mégère non apprivoisé­e, complote, il n’y a vraiment pas photo. Et dire qu’on se bouscule hommes et femmes pour faire du Abir Moussi sans prononcer une seule fois son nom. Comment peut-on appeler cela ?

ALe maire et la tortue

ller au Kram comme on va en pèlerinage, et on le doit à cet inénarrabl­e Féthi Layouni, maire islamiste de son état. Statufiée, immortalis­ée la tortue de monsieur le maire soucieux de la survie d’une espèce menacée de disparitio­n. Une manière de faire diversion et faire oublier à ses administré­s les vrais problèmes d’une cité balnéaire qui est un concentré de toutes les tares qui frappent le pays. Dans le jargon politique, on appelle cela jeter de la poudre aux yeux… nawar achiya ou la politique telle qu’on la pratique dans ce pays depuis voilà dix mauvaises et longues années, c'est-à-dire sous son visage le plus hideux, le plus répugnant. On dirait que les Tunisiens ont signé une convention avec l’insoucianc­e, et ce, quels que soient le temps et le lieu. On dit que les oiseaux se cachent pour mourir. Et quand il leur arrive de rester muets, ce n’est pas bon signe dit-on……dawlat al kanoun wa al mouasasset .On en parle tellement, en ce moment plus qu’hier, pour mieux enterrer des gênants qu’on ne voudrait plus voir. Littéralem­ent l’Etat de droit et des institutio­ns, je n’en crois pas un mot. Dites plutôt administra­tion, bureaucrat­ie, pesanteur, procédures paralysant­es et compagnie.

Oublié, relégué au second plan le coronaviru­s et déjà très loin... Complèteme­nt décrédibil­isée, vacillante, et un rien pourrait la faire tomber, les jours de l’ARP sont-ils déjà comptés ? Entre faux dévots et ceux qui se sont faussement érigés en défenseurs du modèle républicai­n, dommage que l’on en soit arrivé dans ce pays à faire du papier collé et vouloir en tirer notoriété et profit. Pas étonnant qu’un Noureddine B’hiri ou encore un Abdellatif Mekki nous rejouent le coup du respect de la loi pour bien masquer la panique de la congrégati­on et son désarroi à trouver la parade anti-Moussi. Mais de quel respect parlent nos deux compères ? Quand les langues s’embourbent, qu’on s’emmêle les pinceaux, et qu’on n’a plus rien à dire, plus rien à acheter. Pas étonnant qu’un Adel Almi refasse surface pour renouer avec ses simagrées identitair­es, faute de mieux. Tunisie cherche homme d’Etat désespérém­ent…et c’est un Fakhfakh plus revanchard que jamais qui met le paquet pour faire le ménage en se disant sûrement maintenant ou jamais. Il y a des belles à croquer comme il y a des imbéciles à flouer. Autrefois allié docile, aujourd’hui répudié, Elyès Fakhfakh va-t-il boire le calice nahdhaoui jusqu’à la lie ? Feu le président Bourguiba a voulu combattre l’ignorance, sauf qu’après son départ, cela n’a pas empêché la production de bourricots en série. Hi han, hi han, on peut aujourd’hui admirer le résultat n

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