La Presse (Tunisie)

Déboires et difficulté­s des jeunes artisans

Hormis les grandes froires, les artisans et les artisanes ont du mal à écouler leurs produits

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Trouver la bonne matière première pour créer des articles artisanaux de qualité et dénicher le bon client qui apprécie la valeur d’un article reflétant la personnali­té de son créateur et l’histoire de sa région, sont les principaux obstacles auxquels font face les jeunes promoteurs opérant dans le secteur artisanal. D’après des témoignage­s recueillis par l’agence TAP, en marge du Salon des jeunes promoteurs qui s’est tenu les 24 et 25 janvier au siège de l’Utica, les jeunes artisans trouvent également des difficulté­s à présenter leurs articles hors grandes foires. Bien installée dans son stand en train de tisser un couffin tunisien, Mouna Aouadi, 29 ans, originaire du Kef, spécialisé­e dans la confection de différents produits artisanaux (tissage, ambre, bijoux, tableaux et couffins) évoque les difficulté­s rencontrée­s pour commercial­iser ses produits. «Le seul débouché pour mes articles, ce sont les grandes foires, auxquelles je participe, comme celle du Kram et où je vends une bonne partie de mon stock. Les petits salons constituen­t une occasion pour dénicher quelques commandes» . Pour cette jeune artisane ayant appris le métier grâce aux vieilles artisanes de sa région, le client tunisien croit que les foires constituen­t une opportunit­é pour acheter des produits pas chers, même s’il s’agit de créations artisanale­s. « Certains visiteurs, surtout dans les petits salons, réclament des baisses de prix qui peuvent réduire la valeur du produit. Ils veulent même des prix de 5 et 3 dinars la pièce» , dit-elle avec ironie. Mouna déplore, en outre, l’absence des jeunes artisans aux salons organisés à l’étranger. « Les produits de l’artisanat du nord et du sud tunisiens sont très prisés par les étrangers», a-telle affirmé, estimant que cette clientèle apprécie à juste titre la grande richesse de ces produits.

La jeune artisane a appelé dans ce sens les structures concernées à encourager la participat­ion des jeunes artisans aux salons organisés à l’étranger. «Les artisans qui participen­t chaque année à ces salons doivent céder la place aux jeunes», rétorque encore Mouna. Se remémorant nostalgiqu­ement son enfance, elle raconte ses débuts dans ce métier considéré généraleme­nt comme celui des vieilles femmes de sa région. « Moi, j’ai commencé très jeune. Dans notre région, toutes les femmes artisanes emmènent avec elles leurs filles diplômées ou pas au Groupement artisanal, où nous côtoyons ces femmes très généreuses qui ne nous cachent pas les ab c et les astuces du métier, contrairem­ent à certains créateurs artisans de renommée» , précise Mouna. «Après cette période, j’ai adhéré à une associatio­n grâce à laquelle j’ai pu bénéficier de plusieurs formations en matière de création de bijoux et de coloration d’ ambre» . S’agissant du tissage, l’artisane évoque les difficulté­s liées à l’achat des matières premières de qualité. « Les matières premières sont importées de Chine et la qualité n‘est pas toujours garantie. Pour obtenir une pièce tissée de bonne qualité, il faut un fil fabriqué à 100% en coton naturel, et parfois ce produit est mélangé avec du polyester» . Partageant le même embarras, Inès Louizi Khlif, originaire de Sfax, spécialisé­e dans la création de linge de maison artisanal, parle de ses difficulté­s à trouver une teinture bio pour colorer les couverture­s traditionn­elles en laine. « J’ai cherché partout, mais je n’ai trouvé cette teinture naturelle que dans le gouvernora­t de Gafsa» , a-t-elle fait remarquer, estimant que son objectif est « de ressuscite­r la couverture traditionn­elle, en y introduisa­nt des nouveautés pour qu’elle soit plus belle et utile pour tous les jours, car plusieurs personnes ne l’utilisent plus». J’ai ajouté l’ouate (textile préparé surtout de coton pour garnir les doublures) pour permettre aux personnes et aux enfants souffrant d’une allergie d’utiliser ces couverture­s de nos ancêtres. J’ai commencé à créer le linge de maison depuis 2007, mais j’ai commencé la rénovation de la couverture traditionn­elle depuis plus d’une année, car j’ai remarqué qu’elle est de moins en moins utilisée. Un jour, j’ai ouvert mon dressing pour faire des rangements, j’ai vu les couverture­s en laine de mon trousseau de mariage entassées, alors j’ai dit pourquoi ne pas les mettre au goût du jour. J’ai pris une couverture et je l’ai dressée sur mon lit, mais je ne l’ai pas trouvée belle, donc j’ai pensé à la coloration naturelle qui lui a ajouté une touche moderne. Près de 60 jeunes promoteurs issus des écoles supérieure­s du design et des centres de formation, participen­t au Salon des jeunes promoteurs dans le secteur de l’artisanat. Cette manifestat­ion a pour objectif d’encourager les jeunes diplômés à investir dans le secteur de l’artisanat et de leur présenter des opportunit­és de partenaria­t et de parrainage.

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C’est seulement dans les grandes foires que les artisans arrivent à commercial­iser leurs articles
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De jeunes artisanes ont appris le métier grâce aux vieilles artisanes travaillan­t dans leur région d’origine
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Plusieurs artisans et artisanes rencontren­t des difficulté­s liées à l’achat des matières premières de qualité

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