Les sécuritaires, les militaires et les terroristes…
Pour la quatrième fois consécutive, le projet de loi relatif aux élections municipales est de nouveau reporté, faute d’un consensus autour de l’article relatif à la possibilité pour les sécuritaires et les militaires d’avoir droit d’élire lors des municipales. Ainsi, ce projet a peu de chance d’être adopté avant le 27 janvier, date limite fixée par la Constitution (un délai de trois ans). Les avis des coalitions parlementaires sont divergents. Si certains sont pour le droit des sécuritaires et des militaires à élire les conseils municipaux, d’autres — comme Ennahdha — sont contre, invoquant le fait que ces deux corps constituent les remparts de la sécurité du pays et devaient, de ce fait, être tenus à l’écart de toute allégeance et de tout parti pris, c’est-à-dire au-dessus des luttes partisanes.
Un argument qui ne résiste pas à l’examen, dès lors que ces deux corps sont tenus au strict rôle de vote et non de participation aux élections ni aux campagnes. Car en fin de compte, les militaires et les sécuritaires sont tenus au-dessus des enjeux politiques, n’en demeurent pas moins des citoyens à part entière vivant dans la cité et exprimant, à travers leur vote, une participation citoyenne pour la gestion du quotidien et des problèmes de leur cité. Ils sont, de ce fait, tenus à accomplir leur devoir et leur droit d’habitants de la cité.
On saisit, dès lors, cette crainte injustifiée de certains partis politiques de la participation de l’armée et des sécuritaires à un simple droit de vote qui plus est se limite au choix des édiles pour la gestion des affaires de la cité.
Il y a là un amalgame grave entre la participation à l’activité publique et à la vie publique et un simple droit de vote.
Pourtant, ces mêmes partis politiques n’ont pas été prompts à réclamer la dissolution du parti Ettahrir, proche des extrémistes, et qui a proféré des menaces claires à l’endroit des sécuritaires et de tous ceux qui défendent le pays contre le terrorisme. Et seule la voix des sécuritaires s’est élevée pour demander des poursuites à l’encontre de ce parti, à la suite des menaces proférées et réclamé sa dissolution.
Cela nous rappelle un peu cette attitude, aussi paradoxale, des Tunisiens qui rendent hommage aux sécuritaires martyrs et qui, le lendemain, lancent des pierres à ceux qui essaient de maintenir l’ordre et de protéger les institutions publiques et les lieux privés contre toute tentative de casse et de déprédations.
Il y a là matière à interrogation sur la confusion dans les esprits des politiciens — et aussi des citoyens — quant à la place réelle des sécuritaires dans le paysage national : aujourd’hui portés aux nues et le lendemain jetés aux gémonies.