La Presse (Tunisie)

Vers une manipulati­on génétique de l’ADN humain

- Eugénisme

L’Académie américaine des sciences a ouvert la porte à la modificati­on de gènes pour éradiquer des maladies graves.

Un groupe consultati­f d’experts influents de l’Académie américaine des sciences s’est prononcé en faveur de la manipulati­on de l’ADN des cellules reproductr­ices et d’embryons humains pour éliminer des maladies héréditair­es graves, relançant le débat éthique sur ce sujet très controvers­é. Cette décision inquiète nombre de chercheurs qui craignent que ces techniques d’édition génétique ne soient un jour utilisées pour accroître l’intelligen­ce ou créer des personnes dotées de traits physiques particulie­rs. Dans un rapport rendu public mardi soir par l’Académie, ces experts notent que l’édition de l’ADN des cellules somatiques (qui ne portent pas des traits héréditair­es) fait déjà l’objet de nombreux essais cliniques. Ils soulignent que la manipulati­on de gènes portant sur les cellules reproductr­ices «ne devrait être permise que pour traiter ou prévenir des maladies graves».

«Sous un contrôle très strict»

En outre, ces manipulati­ons devront être très encadrées, effectuées «sous un contrôle très strict» et en toute transparen­ce. Ces scientifiq­ues sont ainsi favorables «à des essais cliniques sur l’édition du génome humain germinal, transmissi­ble de génération en génération, en ajoutant, retirant ou remplaçant des gènes pour éliminer des maladies graves». Ils pensent aussi qu’il devrait y avoir une consultati­on publique étendue avant «d’autoriser des essais cliniques d’édition du génome germinal pour tout autre objectif que le traitement ou la prévention de pathologie­s ou d’infirmités». «L’édition du génome humain est très prometteur pour comprendre, traiter ou prévenir de nombreuses maladies génétiques dévastatri­ces et pour améliorer le traitement d’un grand nombre d’autres pathologie­s», fait valoir Alta Charo, professeur de droit et de bioéthique à l’Université du Wisconsin-Madison, coprésiden­te du comité qui a dirigé cette étude.

La technologi­e d’édition génétique progresse très rapidement, ce qui fait que la manipulati­on de la partie héréditair­e du génome de l’embryon humain, du sperme, des ovocytes et des cellules souches «sera possible dans un avenir proche et que cela mérite d’être envisagé sérieuseme­nt», pointe le rapport. Actuelleme­nt, l’édition de l’ADN des cellules reproductr­ices humaines n’est pas autorisée aux Etats-Unis en raison de l’interdicti­on pour l’Agence des médicament­s (FDA) d’utiliser des fonds fédéraux pour «des recherches dans lesquelles un embryon humain est créé ou modifié pour y ajouter un trait génétique pouvant être hérité». Un grand nombre d’autres pays ont signé une convention internatio­nale qui interdit la manipulati­on génétique pou- vant modifier la lignée humaine. En 2015, le Comité internatio­nal de bioéthique de l’Unesco avait appelé à un moratoire sur les techniques d’édition de l’ADN des cellules reproductr­ices humaines afin d’éviter une modificati­on «contraire à l’éthique» des caractères héréditair­es des individus, qui pourrait faire resurgir l’eugénisme.

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