Rationaliser le recours à l’emprunt extérieur
Compte tenu des crédits alloués, la dette publique devrait atteindre 62.660 MD à la fin de cette année, ce qui représente 63.8% du PIB. Ce taux est considéré comme élevé, surtout si l’on sait qu’au début des années 2000, il était entre 50 et 53% du PIB. Le féficit budgétaire de l’exercice de 2017 a été estimé à 8.505 millions de dinars. Les privatisations et les dons devraient rapporter si tout va bien un montant estimé à 4.895 MD. Le remboursement du principal de la dette publique au cours de cette année s’élèverait à 3.610 MD. L’Etat compte sur l’emprunt intérieur dans une limite de 2.460 MD et sur l’emprunt extérieur pour une valeur de 6.045 MD. La mobilisation des ressources financières à l’intérieur sera basée essentiellement sur les bons de trésor. Quant à l’emprunt extérieur, il tient compte des crédits alloués et qui sont répartis entre la Banque mondiale avec 3.958 MD, le Fonds monétaire international (FMI) avec 1.435 MD, l’Union européenne avec 1.125 MD, la Banque africaine de développement (BAD) avec 300 MD. Ces crédits vont consolider le budget. Par ailleurs, le marché financier devrait rapporter 1.262 MD. Les besoins ont été définis sur la base d’un report du remboursement du crédit qatari d’une valeur de 1.125 MD. Compte tenu des crédits alloués, la dette publique devrait atteindre 62.660 MD à la fin de cette année, ce qui représente 63.8% du PIB. Ce taux est considéré comme élevé, surtout si l’on sait qu’au début des années 2000, ce taux était entre 50 et 53% du PIB. Aujourd’hui, la marge de manoeuvre de la Tunisie sur le marché financier international est bien limitée. Il a fallu la garantie des Etats-Unis d’Amérique pour que notre pays puisse sortir sur le marché et mobiliser de nouvelles ressources financières par les crédits des bailleurs de fonds.
Recommandations du FMI en question
Le FMI a formulé des recommandations pour dynamiser l’économie nationale et assurer les équilibres financiers généraux. Parmi ces recommandations, celles qui concernent les réformes à engager et qui concernent notamment le secteur financier, la restructuration de l’administration et de la Fonction publique pour les rendre plus efficaces et rentables. Une délégation du FMI a visité la Tunisie pour assurer le suivi de ces recommandations et accompagner notre pays dans sa démarche réformatrice. La Tunisie a commencé effectivement à effectuer les réformes dans le secteur financier en conférant plus d’indépendance à la Banque cen- trale de Tunisie et en assainissant la situation financière des banques publiques, à savoir la Banque de l’Habitat, la Société tunisienne de banque et la Banque nationale agricole. Des fonds ont été injectés à ces banques pour équilibrer leur situation financière après avoir effectué la restructuration d’usage. Ces banques doivent continuer à jouer leur rôle premier concernant le soutien de l’économie nationale, mais en faisant preuve de plus de prudence pour éviter les dérapages par l’octroi de crédits à des clients non solvables ou à ceux qui veulent lancer des projets non rentables. Les réformes ont concerné aussi les prix du carburant à la faveur d’un nouveau mécanisme de régulation, ainsi que les produits subventionnés, l’administration et bientôt la sécurité sociale. Autant de réformes qui devraient, à terme, participer à équilibrer les finances publiques et à réduire un tant soit peu le recours aux crédits extérieurs. Il va sans dire que la Tunisie opte, en sortant sur le marché financier international, pour les bailleurs de fonds qui offrent le plus d’avantages. Le taux d’intérêt du crédit occupe une place de choix dans cette alternative. Un taux variant de moins de 5% permettrait à notre pays de faire des économies lors du remboursement du crédit. Mais ce taux devient plus élevé quand la situation économique du pays emprunteur est précaire comme c’est le cas, actuellement, pour la Tunisie. Il est question également de diversifier les sources d’emprunt en s’orientant davantage vers les bailleurs de fonds situés dans les pays asiatiques — comme le Japon et la Chine — et dans les pays du Golfe. Certains pays vont jusqu’à offrir des dons avec les crédits octroyés dans le but de soutenir le développement durable.
Emprunter pour les projets
Les crédits contractés ne sont pas destinés à payer les salaires des fonctionnaires, rassurent les autorités publiques. Il s’agit d’orienter ces financements vers les projets de développement programmés dans toutes les régions. L’essentiel est de rentabiliser ces investissements publics pour qu’ils génèrent des richesses, font travailler de la maind’oeuvre et stimulent les activités socioéconomiques. Les pistes agricoles et les autoroutes, les ports et aéroports, à titre d’exemple, constituent des éléments essentiels pour les entreprises industrielles qui ont besoin d’une infrastructure moderne et solide afin de pouvoir commercialiser leurs produits. Les habitants sollicitent, quant à eux, des dispensaires, des écoles proches de leur lieu d’habitation, des lieux de loisirs, des hôpitaux et d’autres commodités susceptibles de leur garantir un bon niveau de vie similaire à celui qui prévaut dans les grandes villes. A noter que 33% de la dette publique se compose de l’emprunt intérieur à hauteur et 67% de l’emprunt extérieur. Les dépenses de fonctionnement pour cette année sont estimées à 20.240 MD dont 2.700 MD pour les subventions contre 2.230 MD en 2016. Quant aux dépenses de développement, elles seront de 6.210 MD cette année contre 5.295 MD une année plus tôt. L’Etat va consacrer aussi 5.825 MD contre 5.250 MD en 2016 pour le service de la dette publique. Les estimations ont été définies compte tenu d’un prix moyen du pétrole durant toute l’année de 50 dollars le baril et un taux de change du dollar égal à 2,250 dinars. Une subvention de 500 MD est allouée à la Caisse nationale de retraite et de prévoyance sociale (Cnrps) qui passe par des difficultés financières. Quant aux subventions, elles concernent essentiellement les produits de base (1.600 MD), le carburant et l’électricité (650 MD) et le transport (450 MD).
Renforcer les ressources propres
Le souci de l’Etat pour les années à venir est de réduire, autant que faire se peut, le recours à l’endettement extérieur et de se tourner davantage vers le marché intérieur pour renforcer ses ressources propres. Les recettes non fiscales pour cette année sont estimées à 2.195 MD contre 2.506 MD en 2016, soit une diminution de 12.4%. Ainsi, 500 MD proviendront de la commercialisation de la part de l’Etat dans le pétrole. La redevance sur le gaz naturel algérien transitant par la Tunisie vers l’Italie devrait rapporter 300 MD. A note que les quantités de gaz passant par le territoire tunisien sont près de 12.5 milliards de m3, alors que les quantités soustraites par la Steg sont de 397 mille tonnes équivalent pétrole. En fin de compte, les ressources propres de l’Etat pour cette année représentent 74%, dont 67% représentent les recettes fiscales et 7% les recettes non fiscales. Quant aux ressources de l’emprunt et les bons de trésor, elles représentent 26%. Les crédits demeurent une composante essentielle dans le budget de l’Etat. En effet, il est utile de recourir au marché financier international pour renforcer les ressources financières, mais il est temps de rationaliser l’emprunt extérieur. La Tunisie est appelée à compter davantage sur le marché intérieur en incluant les ressources de l’épargne d’une façon plus significative pour renforcer les ressources propres de l’Etat. Certes, la Tunisie s’est toujours distinguée par le remboursement dans les délais impartis de ses crédits, ce qui lui a valu le respect des bailleurs de fonds qui sont toujours prêts à lui octroyer des crédits, notamment pour les projets de développement. Cependant, il est nécessaire de rationaliser le recours à l’emprunt. La multiplication des investissements public et privé dans les régions est de nature à dynamiser la vie socioéconomique et à créer des richesses. Les privatisations ne constituent qu’un apport d’appoint pour l’Etat. Des projets viables et rentables dans des secteurs stratégiques peuvent changer la donne et faire de la Tunisie un pays développé qui compte dans une large mesure sur ses ressources pour financer son budget.