Utiles mais non contraignantes
« Il y a une certaine carence quelque part qui fait sentir le besoin d’un nouveau cadre normatif», lance Mme Assia Laâbidi, vice-présidente de la Haica
La Haica, instance, provisoirement, régulatrice de l’audiovisuel, en vertu des dispositions du décret-loi 116-2011 l’organisant, a tenu, hier matin à Tunis, un atelier de travail au cours duquel les règles de conduite relatives à la publicité dans les médias audiovisuels ont été relevées en tant que référence de base en matière de communication commerciale. Mais, ce document n’est qu’un premier jet, censé être sujet à d’autres modifications et propositions. Et pour cause. Le projet tel que présenté aux journalistes semble donner encore du grain à moudre. Pourtant dotée, dans l’article 16 du décret-loi, des attributions de contrôle et de veille sur le respect des modalités de pratique de la publicité télévisée et radiophonique, la Haica ne possède pas suffisamment de pouvoir décisionnel dans ce domaine. Et encore moins d’autorité discrétionnaire, susceptible de sanctionner toute infraction ou dépassement lié à l’usage abusif de la publicité. « Il y a une certaine carence quelque part qui fait sentir le besoin d’un nouveau cadre normatif», lance Mme Assia Laâbidi, vice-présidente de l’instance. D’après elle, cela est dû, pour partie, à la grande mue qu’a connue le secteur après la révolution et à la pluralité du paysage médiatique et sa diversité visiblement remarquée. Mais aussi, ajoute-t-elle, à un certain vide juridique en mesure de fixer les règles publicitaires. De par son apport financier indéniable destiné à renflouer les caisses des chaînes de télévision en particulier, de nature à promouvoir leur contenu médiatique et à même de hausser le taux d’audience qu’elles ambitionnent, la publicité demeure ainsi une véritable source nourricière. D’où l’importance de la soumettre aux règles du jeu, dans l’objectif de la préserver de tout message manipulatoire et de la protéger contre son image trompeuse.
Trop d’infractions !
D’ailleurs, les exemples des spots excessifs et hors normes sont édifiants sur un tel état de fait. L‘exemple le plus édifiant à cet égard est la grille du ramadan 2016, ainsi rapporte Mme Samira Hammami, de l’unité de monitoring à la Haica. Soit infractions et dépassements de trop, au niveau aussi bien quantitatif que qualitatif. Qu’il s’agisse de la durée des spots en prime time et de la façon d’être filmé, de la manière de présenter le produit annoncé, de son placement en plein écran, du logo de l’annonceur, de la publicité déguisée, les techniques utilisées sont jugées mal pensées et loin d’être dans les règles de l’art. Et là, à l’en croire, sont pointées du doigt les chaînes nationales privées en particulier. Et plus précisément «Nessma TV, « Al Hiwar Ettounsi et « Tounessna » sont les médias qui ont commis le plus de transgressions au cours du dernier mois saint. C’est qu’il y avait, immanquablement, superflu de spots et confusion avec la matière information : «Non-respect du temps limite alloué aux spots, soit 12 mn pour chacun pendant ramadan (8 mn en temps ordinaire), fausse répartition des plages publicitaires par émissions et programmes diffusés, désynchronisation musique de fond, recours fréquent à des formes de publicité masquée».
De la pub à nuances près
Et partant, il est impératif de mettre en oeuvre de nouvelles directives, préconise M. Hichem Snoussi, membre de la Haica. Cela dit, une sérieuse réflexion sur le devenir du secteur a abouti à la mise en place des règles de conduite relative à la publicité dans l’audiovisuel. Une sorte de charte en 25 articles visant à organiser la pratique de la communication commerciale. Tout d’abord, le volet définition tient à faire la part des choses, clarifiant les différentes formes publicitaires. Toujours à but lucratif et à vocation purement promotionnelle, la publicité est un mode de marketing et de vente soit des produits ou des services, revêtant parfois un aspect de propagande. Ainsi, « parrainage», «placement de produit», «écran partagé», « téléachat» et «publireportage» sont autant de manières pour faire de la publicité, à différences près. Explications et détails y afférents se trouvent dans le troisième chapitre auquel l’on consacre tout seul 23 articles, soit presque la totalité des dispositions réglementaires que contient le document. Alors que le second chapitre s’intéresse aux principes généraux qui régissent l’opération de communication commerciale. Mais, aux yeux des journalistes, universitaires et autres acteurs sociaux présents, ce manuel de bonnes pratiques, si l’on peut le qualifier ainsi, ne prend guère un caractère contraignant. Voire sans aucune légitimité répressive ou dissuasive.