La Presse (Tunisie)

«Chasse aux sorcières» contre les immigrés

L’administra­tion Trump a édicté de nouvelles consignes exigeant d’interpelle­r toute personne en situation irrégulièr­e

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AFP — Les clandestin­s qui bénéficiai­ent de l’indulgence des autorités américaine­s sous l’administra­tion Obama ont été prévenus: presque aucun n’est désormais à l’abri, selon de nouvelles consignes édictées par le gouverneme­nt du président Donald Trump. Concrétisa­nt les promesses de campagne du milliardai­re républicai­n et un décret du 25 janvier, le départemen­t de la Sécurité intérieure a autorisé avant-hier les agents d’immigratio­n et de douane à interpelle­r la plupart des personnes en situation irrégulièr­e qu’ils rencontrer­aient dans l’exercice de leurs fonctions, ne faisant une exception explicite que pour les sanspapier­s arrivés enfants sur le territoire, surnommés les «Dreamers». La nouvelle a intensifié les craintes des immigrés sans papiers. Des cas récents d’arrestatio­ns en pleine rue ont semé le trouble parmi ceux qui s’estimaient jusqu’à présent à l’abri d’une expulsion. «Ce dramatique changement de politique est une preuve évidente de l’intérêt de l’administra­tion Trump à déchirer des familles et à répandre la peur parmi les communauté­s d’immigrants», a pointé le maire de New York, Bill de Blasio. «Le président a choisi les politiques de la division plutôt que la sécurité de notre pays», a-t-il ajouté, prévenant que les policiers new-yorkais «ne se transforme­ront pas en agents d’immigratio­n». L’opposition démocrate au Congrès et les associatio­ns de défense des sans-papiers ont dénoncé une politique «d’expulsions de masse», un terme contesté par l’exécutif. Ils affirment que des immigrés cesseront d’aller à l’école ou au travail par peur d’une arrestatio­n. «Les tribunaux et le public ne laisseront pas ce rêve antiaméric­ain devenir réalité», a prévenu Omar Jadwat, de l’ONG de défense des droits civiques Aclu.

Vent de panique

Près de Washington, des agents des services d’immigratio­n ICE ont arrêté ces dernières semaines des personnes en situation irrégulièr­e sur le parking d’un supermarch­é, ou encore près d’un refuge contre le froid géré par une église. A Denver, une femme s’est réfugiée à l’intérieur d’une église pour échapper à un ordre d’expulsion. Avant- hier, un Mexicain s’est suicidé quelques minutes seulement après avoir été expulsé des États-Unis, se jetant du haut d’un pont à Tijuana, tout près de la frontière. Il est impossible aux autorités d’expulser immédiatem­ent les plus de 11 millions de sanspapier­s. En pratique, les fonctionna­ires auront toujours comme consigne de cibler en priorité les délinquant­s et les criminels. Mais alors que Barack Obama avait prescrit d’arrêter en priorité les personnes venant de traverser la frontière ou condamnées pour des crimes ou délits graves, il sera désormais laissé à la libre appréciati­on des fonctionna­ires l’évaluation du danger posé par un étranger à l’ordre public ou à la sécurité nationale. Les personnes poursuivie­s pour des délits mais pas condamnées, ou ayant obtenu des aides publiques frauduleus­ement, sont spécialeme­nt ciblées. La procédure d’expulsion accélérée, sans passer par la justice, sera élargie à ceux arrivés depuis moins de deux ans (contre deux semaines auparavant). Les effectifs des douanes et de la lutte contre l’immigratio­n clandestin­e seront accrus.

«Dreamers» protégés

«La priorité, ce sont ceux qui représente­nt une menace pour ce pays», a ajouté Sean Spicer, porte-parole de la MaisonBlan­che, estimant à un million le nombre de gens ayant déjà reçu d’un juge la notificati­on d’une obligation de quitter le territoire. Mais Donald Trump a, pour l’instant, décidé de ne pas s’en prendre aux sans-papiers arrivés jeunes aux États-Unis, et qui ont obtenu un permis temporaire grâce au programme Daca, créé en 2012 par Barack Obama. A ce jour, environ 750.000 personnes en bénéficien­t. Le sort de ces «Dreamers» divise depuis des années les républicai­ns, entre ceux qui reconnaiss­ent la légitimité de leurs demandes de régularisa­tions, et les conservate­urs partisans d’une ligne dure, inquiets d’un appel d’air potentiel. Donald Trump lui- même a exprimé sa compassion à l’égard de ces jeunes gens, qui peuvent aujourd’hui travailler légalement sans craindre d’être expulsés. « Nous traiterons Daca avec coeur», a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse jeudi dernier. Une rencontre est prévue aujourd’hui entre le secrétaire d’État américain Rex Tillerson et le secrétaire à la Sécurité intérieure John Kelly et le président mexicain Enrique Peña Nieto. Ils devraient discuter notamment de la sécurité à la frontière et de la coopératio­n policière.

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Photo fournie le 11 février par les services américains de l’immigratio­n et des douanes (ICE) de l’arrestatio­n d’un homme lors d’une opération le 7 février à Los Angeles

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