La Presse (Tunisie)

La ville de Gao accueille les premières patrouille­s mixtes

«Aujourd’hui, il n’y a pas de militaires maliens ou de rebelles mais le drapeau national»

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AFP — Les premières patrouille­s mixtes formées de soldats maliens, combattant­s de groupes progouvern­ementaux et de l’ex-rébellion, censées préfigurer la refonte d’une armée unitaire, ont été lancées hier à Gao, plus grande ville du nord du pays, a constaté l’AFP. La cérémonie de lancement s’est déroulée en périphérie de Gao au siège du «Mécanisme opérationn­el de coordinati­on» (MOC) chargé d’organiser ces patrouille­s. Elle concernait des soldats de l’armée régulière, des combattant­s des groupes progouvern­ementaux formant la Plateforme et des hommes de l’ex-rébellion à dominante touareg du nord du Mali formant la Coordinati­on des mouvements de l’Azawad (CMA). Tous étaient vêtus de treillis, les soldats portant un béret, beaucoup de combattant­s des groupes armés arborant un turban. Mais ils affichaien­t des brassards de couleurs distinctes: rouge pour les hommes du rang, vert pour les sous-officiers et jaune pour les officiers. A terme, 600 hommes — 200 de chaque camp — devraient participer à ces patrouille­s. Hier, ils étaient une centaine qui, après rassemblem­ent sur le site du MOC, sont montés, armes au poing, dans des pick-up en direction de la ville de Gao. «Aujourd’hui, il n’y a pas de militaires maliens ou de rebelles mais le drapeau national», a déclaré à l’AFP un soldat, approuvé par son voisin, membre de la CMA: «C’est ça. Les patrouille­s mixtes vont aider pour le retour de la confiance». Le lancement des patrouille­s, après plusieurs reports, a été salué par les autorités maliennes, la force de la Mission de l’ONU au Mali (Minusma) et l’opération française Barkhane dédiée à la lutte contre les groupes jihadistes au Sahel, toutes représenté­es à la cérémonie.

«Jour de fierté»

Le représenta­nt du gouverneme­nt, Boubacar Bagayoko, directeur de cabinet du gouverneur de Gao, a parlé de «jour de grandeur et de fierté» pour les Maliens. C’est «une belle photo. Le début des patrouille­s mixtes marque une étape important dans le processus» de paix au Mali, a estimé le commandant par intérim de la force militaire de la Minusma, le général Amadou Kane. Par cette initiative, «les différente­s forces sur le terrain montrent (...) leur volonté d’aller de l’avant», a dit le représenta­nt du commandant de Barkhane à Gao, le colonel Jean-Bruno Despouys. Les patrouille­s mixtes sont une des dispositio­ns de l’accord de paix signé en mai-juin 2015 par Bamako, la Plateforme et la CMA. Leur lancement intervient près de cinq semaines après un attentat-suicide contre le camp où la cérémonie a eu lieu hier. Cette attaque, revendiqué­e par le groupe Al-Mourabitou­ne du jihadiste algérien Mokhtar Belmokhtar rallié à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), a fait près de 80 morts selon des bilans concordant­s. Mais un document interne du MOC consulté hier par l’AFP évoque 61 morts et 116 blessés. «Dans un premier temps, les patrouille­s mixtes se dérouleron­t à Gao. Ensuite elles vont s’étendre dans tout le Nord», a précisé à l’AFP Ibrahim Ould Sidy, d’un des groupes armés. A Gao, beaucoup exprimaien­t l’espoir de voir ces forces mixtes être véritablem­ent présentes dans tout le Nord, en proie depuis 2013 à de sanglantes attaques jihadistes contre population­s et forces maliennes et étrangères. «Nous voulons vraiment la paix. Il faut que tout le monde soit sincère. S’il n’y a pas de sincérité, ça ne va pas marcher», a affirmé un élu de la ville, Ali Maïga, résumant un sentiment général. Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes jihadistes liés à AlQaïda, à la suite du déclenchem­ent d’une rébellion armée. Les jihadistes ont été en grande partie chassés par une interventi­on militaire internatio­nale, lancée en janvier 2013 à l’initiative de la France et qui se poursuit actuelleme­nt. Mais des zones entières échappent encore au contrôle des forces maliennes et étrangères.

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