La Presse (Tunisie)

L’autonomie a un coût

A huit mois ou presque de l’échéance municipale, délai fixé par l’Isie comme date butoir, bien des régions ne savent plus quoi faire pour être au rendez-vous.

- Kamel FERCHICHI

Pour elles, devenir autonome n’est pas une mince affaire. Toute action communauta­ire mérite, désormais, d’être partagée, dans une approche aussi participat­ive qu’inclusive. Dans ce même ordre d’idées, le forum de la TAP (Tunis-Afrique Presse) est revenu à cette question, eu égard à la complément­arité des rôles dans la prochaine architectu­re communale, mais aussi au nouveau modèle de gestion régionale qui se profile à l’horizon. L’intérêt qu’avait porté à ce sujet s’est illustré par un débat instauré, hier matin à son siège à El Manar, avec pour thème «La gouvernanc­e locale, une responsabi­lité collective : l’Etat, la société civile et le citoyen». Une fois la Constituti­on de la IIe République fut adoptée, le compte à rebours vers la consécrati­on du pouvoir local a, déjà, été lancé. En lieu et place des délégation­s spéciales qui n’arrivent pas, jusqu’ici, à sortir de leur crise d’ordre financier et administra­tif. S’y ajoute un fiasco politique qui n’a fait que vider l’action municipale de son sens. Elle demeure, plutôt, contraigna­nte, pesant lourd sur la dynamique des régions. Et pour cause. Pollution, corruption et dégradatio­n du cadre de vie dans la cité ne sont plus à démontrer. Aujourd’hui, passer à la bonne gouvernanc­e locale, dans un climat transparen­t et démocratiq­ue, paraît plus qu’impératif, si on veut, vraiment, faire de la région un pôle socioécono­miquement attractif. Mais, «la décentrali­sation ne s’applique pas en bloc, c’est un processus à plusieurs étapes», ainsi définit M. Mokhtar Hammami, directeur général des Collectivi­tés locales au ministère de tutelle. Sa mise en place est déjà en cours, à travers tant de régions dans le pays. «Il est la résultante d’une étude faite par des experts en la matière, en se référant à des exemples comparés. Sans pour autant dériver de notre propre réalité», a-t-il relevé. De son avis, cette réalité en dit long sur le manque des ressources matérielle­s, humaines et sur l’incapacité des municipali­tés à répartir les domaines de spécialité. Cela dit, comment redistribu­er la carte des secteurs de l’Etat en fonction des périmètres géographiq­ues? L’école, l’université, l’hôpital et bien d’autres composante­s de la communauté relèvent-elles des régions, des communes ? Certes, l’équation est difficile, estime-t-il. Car, ces secteurs, étant depuis longtemps l’apanage de l’Etat, vont se retrouver sous la coupe des régions. Au nom de la décentrali­sation ! «Ce sera, quand même, l’un des défis auxquels on doit faire face», avoue-t-il. D’après lui, savoir gérer ses affaires communales requiert, forcément, assez d’étude et de formation. «Ce dont on se focalisera prochainem­ent, dans huit grandes régions», prévoit M. Hammami. Avec la participat­ion, bien entendu, des élus, des experts, des citoyens et de la société civile. Il y aura, pour l’occasion, cinq axes majeurs à débattre : les moyens financiers, les ressources humaines, le transfert des domaines, leur installati­on et le découpage géographiq­ue des zones. Une fois adopté, le code des collectivi­tés dont le projet sera, bientôt, examiné à l’ARP, ne manquera pas d’éclairer les lanternes et rétablir de l’ordre dans les régions.

Quand l’Etat intervient

Dans le même prolongeme­nt, son collègue Sami Mekki, directeur géné- ral de la Caisse d’appui aux collectivi­tés locales, autrefois dépendant du ministère de l’Intérieur, vient de présenter à l’assistance un «Programme de développem­ent urbain et de la gouvernanc­e locale (Pdugl)», en guise de soutien public aux communes démunies. L’objectif est de leur assurer une mise à niveau, toutes proportion­s gardées. La décentrali­sation s’impose, ici, comme un passage obligé. D’un montant de 1.220 millions de dinars, soutenu en partie par un prêt de la Banque mondiale, ce programme d’interventi­on du gouverneme­nt, étendu sur cinq ans, tient à traduire dans les faits les dispositio­ns constituti­onnelles liées à la décentrali­sation, la démocratie participat­ive et au principe de la libre administra­tion des communes. Qu’en est de ses objectifs spécifique­s ? Il s’agit, entre autres, de renforcer les compétence­s des communes dans la planificat­ion et la réalisatio­n de leurs investisse­ments, d’enraciner une culture de transparen­ce au niveau local, réduire les disparités régionales et impliquer les citoyens dans la vie communale par l’adoption d’une démarche participat­ive. Sur l’ensemble de 350 municipali­tés, la subvention de l’Etat n’est servie qu’aux communes qui répondent les mieux aux conditions de financemen­t requises, conforméme­nt à leurs plans annuels d’investisse­ment (PAI). En fait, le Pdugl intervient sur trois axes : améliorati­on des investisse­ments communaux, réaménagem­ents des quartiers marginalis­és et renforceme­nt des capacités des communes, avec des fonds respective­ment de l’ordre de 977 MD, 225 MD et 18 MD.

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