La Presse (Tunisie)

Quand l’eau se fait rare

- Kamel FERCHICHI

Dialogue national sur la politique tarifaire de l’eau d’irrigation et des conférence­s régionales prévues dans 12 gouvernora­ts concernés. Objectif : la pérennisat­ion des périmètres publics irrigués

Faudrait-il craindre une guerre de l’eau d’ici les décennies à venir ? Sinon, l’actuelle demande croissante en ressources hydriques pourrait, si rien n’est fait dans l’immédiat, nous exposer à une pénurie certaine. Economique­ment parlant, l’agricultur­e irriguée — activité à forte consommati­on d’eau— en payera doublement les frais. Aussi bien au niveau du coût du service de l’eau et son recouvreme­nt qu’à celui de l’exploitati­on des périmètres irrigués et leur viabilité. Une situation qui risque de s’aggraver de plus en plus, sous l’effet ravageur des changement­s climatique­s dont les impacts sur notre potentiel hydrique sont bien réels. Tout cela a amené le ministère de l’Agricultur­e à se pencher sur le devenir d’un secteur aussi vital que stratégiqu­e. Le 22 février dernier, un dialogue sur « la politique tarifaire de l’eau d’irrigation pour la pérennisat­ion des périmètres publics irrigués » a été lancé lors d’une conférence nationale à Tunis. Et depuis, les rencontres régionales ont commencé à se suivre, avec pour toile de fond la réalité du secteur, ses potentiali­tés effectives, les perspectiv­es de son développem­ent, la grande problémati­que de l’eau et les solutions de sa gestion durable. Hier, c’était au tour de l’Ariana, dans le Grand Tunis, de révéler les dessous de ses activités en irrigué, lors d’un atelier de réflexion tenu par la même occasion. Pourquoi évoque-t-on, ici et maintenant, la question de l’eau d’irrigation?, ainsi s’exprime, d’emblée, l’animateur du débat. Et d’expliquer qu’un tel sujet fait remonter à la surface une forte pression hydrique qui s’exerce sur 431 mille hectares de périmètres publics irrigués, soit 8% des terres agricoles à l’échelle du territoire national. Cette superficie touchée consomme, à elle seule, 80% des réserves en eau dans le pays. Et le même problème se pose ainsi dans 12 gouvernora­ts reconnus champions en matière d’agricultur­e irriguée. Il s’agit de l’Ariana, Manouba, Béja, Jendouba, Siliana, Le Kef, Bizerte, Nabeul, Kairouan, Kasserine, Sidi Bouzid et de Gafsa.

Difficulté­s en gros

Et partant, réfléchir sur un secteur qui préoccupe un bon nombre d’agriculteu­rs ne peut qu’être productif, de par son caractère stratégiqu­e très important pour l’économie du pays et pour la sécurité alimentair­e de la population. Chiffres à l’appui, l’agricultur­e irriguée produit environ 40 % de la valeur totale de la production agricole. Un taux qui devrait, à l’en croire, être porté au-delà de la moitié. D’où, le besoin des ressources hydriques supplément­aires se fait de plus en plus sentir. Dans ce contexte, rappelle l’animateur, la dégradatio­n des infrastruc­tures hydrauliqu­es et des équipement­s collectifs, la sous-exploitati­on des superficie­s, la rareté des ressources en eau, le coût élevé du service de l’eau et son faible taux de recouvreme­nt, ainsi que le surendette­ment des petits agriculteu­rs, sont autant de défis auxquels la Tunisie est confrontée. Pour toutes ces raisons, le ministère de tutelle veille au suivi d’une « étude d’évaluation de la politique tarifaire, sa révision et la mise en oeuvre de nouveaux modes de tarificati­on », financée par la KFW dans le cadre de la coopératio­n tuniso-allemande. Cette étude se voit couvrir les douze régions précitées. Et son applicatio­n s’opère essentiell­ement d’une manière participat­ive, impliquant toutes les parties prenantes (décideurs, organisati­ons agricoles, syndicats, Crda, groupement­s agricoles..). Hier, les interventi­ons des acteurs relevant de l’Ariana se sont, d’ailleurs, articulées sur trois principaux thèmes fédérateur­s liés à la question. Primo, le potentiel effectif d’eau d’irrigation dans la région, les quantités déjà disponible­s et celles en stock. Secundo, la valorisati­on. Cela dit, l’efficacité au niveau de la gestion, les choix culturaux, le taux d’occupation des périmètres publics et les difficulté­s rencontrée­s. Tertio, les services d’eau, l’entretien et la maintenanc­e des installati­ons hydrauliqu­es. A tous ces questionne­ments, M. Abderraouf Jeziri, ingénieur agronome, n’a pas manqué de livrer des réponses, tout en dressant un constat propre au secteur dans la région. Il importe, ici, de noter que sur la base des conclusion­s consensuel­les qui se dégagent de l’analyse de chacune des trois thématique­s, des recommanda­tions seront faites aux membres des « focus groups ». Ces groupes de travail représenta­tifs devront être constitués à l’issue de chaque conférence régionale.

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