La Presse (Tunisie)

Revendicat­ion syndicale ou enchérisse­ment ?

« Ijaba » reproche à l’autorité de tutelle de refuser de récompense­r individuel­lement chaque tâche d’encadremen­t. La Fgesrs fait état de l’évolution positive du dossier

- Représenta­tivité controvers­ée Faouzi KSIBI

Le sit-in auquel a appelé le syndicat des universita­ires chercheurs, « Ijaba », mardi dernier, n’a pas attiré grande foule, puisque les manifestan­ts présents devant le ministère de l’Enseigneme­nt et de la Recherche scientifiq­ue n’étaient pas nombreux. Il est à rappeler que ce mouvement s’insère dans une action de protestati­on qui s’achèvera par une grève de deux jours, les 10 et 11 avril prochain, et qui était prise par le conseil national dudit syndicat qui s’est tenu à Sousse au début du mois en cours. Celui-ci « dénonce le silence de l’autorité de tutelle et lui reproche de ne pas respecter l’échelle salariale et de refuser de récompense­r individuel­lement chaque tâche d’encadremen­t ». Et ce qui l’irrite encore c’est le fait que le ministre «ait insidieuse­ment laissé entendre que les universita­ires étaient des escrocs dans leur façon de comptabili­ser l’encadremen­t et la soutenance des PFE en les accusant d’avoir gonflé leurs horaires ». Ce qui ajoute aux revendicat­ions matérielle­s du syndicat des chercheurs « une question de dignité et d’honneur que ces derniers estiment être bafoués par le ministre et qu’ils sont déterminés à défendre». Et le sit-in qu’ils viennent d’observer est une protestati­on contre « ces propos déplacés » et l’attitude empruntée par le ministère à leur égard.

Seulement, toutes ces revendicat­ions et toutes ces accusation­s ne trouvent aucun écho auprès de l’autre syndicat des universita­ires, la Fgesrs, comme si les deux syndicats agissaient dans deux univers différents. Bien au contraire, ils se situe aux antipodes de cette position, comme le montre le communiqué qu’il vient de sortir, en date du 10 mars, où il fait état de l’évolution positive concernant l’encadremen­t des PFE. Cette évolution se vérifie, d’une part, à travers l’autorisati­on d’insertion de l’encadremen­t de ces projets parmi les tâches d’enseigneme­nt, au cas où l’enseignant concerné n’obtiendrai­t pas d’emploi de temps, ce qui annule la gratuité. D’autre part, il est décidé d’introduire une certaine souplesse consistant à comptabili­ser la prime dès le premier projet, chaque fois que le taux d’encadremen­t au niveau de l’établissem­ent universita­ire est au-dessous de trois. Toutefois, la Fgesrs reproche à l’autorité de tutelle d’avoir omis de rappeler ce qui a été convenu par écrit avec elle, à savoir le calcul de la prime pour chaque projet, ce qui veut dire le paiement de deux primes pour le PFE réalisé en binôme, son engagement à payer leur dû relatif aux heures supplément­aires et à l’encadremen­t des PFE pour les quelques établissem­ents qui sont impayés depuis 2012. Enfin, la Fgesrs relève une imprécisio­n dans le communiqué du ministère, où il est stipulé que les dispositio­ns de l’accord conclu entrent en vigueur l’année universita­ire prochaine, alors que leur effet est immédiat selon le texte de l’accord signé par les deux parties. Faudra-t-il attendre une troisième clarificat­ion, se demande le syndicat qui estime que ces lacunes et ces points obscurs auraient pu être évités si on avait fait participer la partie syndicale dans la rédaction de ce communiqué. Il importe, ici, de rap- peler que le ministère et la Fgesrs se sont mis d’accord, après des années de tension, sur l’unificatio­n des rémunérati­ons de l’encadremen­t PFE. Ce qui met fin à un état d’anarchie où les rémunérati­ons étaient soit inégales, soit payées aux uns et refusées aux autres, ou bien encore non activées après approbatio­n. De plus, cet accord a le mérite de fermer la porte aux interventi­ons des contrôleur­s des dépenses et au refus de l’autorité de tutelle de signer l’autorisati­on après la fin du travail accompli par l’enseignant. Rappelons, enfin, que le syndicat « Ijaba », qui a été créé en 2011, dans le cadre du pluralisme syndical, est accusé par certains, dont le secrétaire général de la Fgesrs, Hussein Boujarra, d’être soutenu par un parti politique. Ses détracteur­s fondent leur accusation, notamment, sur l’attitude passive qu’il a observée à l’égard des intégriste­s qui menaçaient les universita­ires et l’université tunisienne, lorsqu’il a brisé la grève du 1er décembre 2011 décrétée par le syndicat appartenan­t à l’Ugtt pour protester contre les atteintes portées par ces derniers qui terrorisai­ent tout le monde et l’avenir de l’université. Et abstractio­n faite du passé et de l’obédience politique de ce jeune syndicat, Boujarra considère qu’il est loin d’être représenta­tif des universita­ires, même pas des chercheurs, qu’il prétend représente­r, puisqu’il n’en représente en fait que le 1/3. Alors, revendique­r une question déjà résolue ne dénote-t-il pas une compétitio­n non déclarée autour de cette représenta­tivité ?

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