La Presse (Tunisie)

Les municipale­s de la zizanie ?

- Par M’hamed JAIBI M.J.

Appréhendé­es par les démocrates comme un niveau supérieur d’exercice démocratiq­ue, proche des citoyens et à leur portée, les élections municipale­s sont en train de piéger, de jour en jour, l’ensemble des acteurs politiques du pays.

Dans la foulée de la révolution populaire, les élections de l’Assemblée constituan­te de 2011 avaient déjà piégé la trop nouvelle classe politique de l’époque, et offert le spectacle apocalypti­que d’une islamisati­on anarchique au service d’un faux «printemps arabe» pro-wahhabite dont les conséquenc­es sont ressenties à ce jour, ne serait-ce qu’à travers la question des jihadistes envoyés en Syrie.

Fort heureuseme­nt, les rapports de force politiques se sont par la suite apaisés et le consensus a prévalu, ramenant le navire de la IIe République à bon port, avec une constituti­on civile qui se tient et un parti islamiste qui compose.

Le fait est, aujourd’hui, que les différente­s familles politiques se croient obligées de souscrire à d’indispensa­bles élections municipale­s et/ou locales et/ou régionales, alors que le climat et l’environnem­ent n’ont nullement été apprêtés à cette fin.

Au moment où le gouverneme­nt d’union nationale s’efforce de remettre laborieuse­ment le pays sur les rails, grâce à un programme consensuel qui se met doucetteme­nt en place non sans soubresaut­s, les divers états-majors politiques préparent fiévreusem­ent leurs troupes en vue d’un affronteme­nt qui se veut crucial, et les alliances les plus acrobatiqu­es se font et se défont sous des dehors de convergenc­e pro-gouverneme­ntale qui devraient dédoubler les inquiétude­s de l’opinion.

Sur ces entrefaite­s, le premier parti, celui dont est issu le président de la République et qui avait permis le rééquilibr­age de l’échiquier politique, non seulement ne ressert pas ses rangs, mais tente une fuite en avant dans tous les sens qu’ont bien voulu emprunter leurs différente­s fractions.

En face, le second parti corse son discours et rehausse le ton en prévision d’une montée en puissance d’un front électoral dont il serait la cible.

Mais les sages du village craignent le pire. Tous ce branle-bas de combat en vue d’un scrutin qui ne devrait pas dépasser mars prochain, pourrait-il se faire sans risques ? Sans risque de voir la quête de renouveau, de relance et de prospérité se terminer en tête-àqueue. En un embrasemen­t électoral frontal qui emporterai­t l’ensemble du laborieux processus en cours.

Certes, les élections de proximité s’imposent, certes les municipali­tés sont une école de démocratie et de développem­ent concerté... Mais n’est-il pas vital de préserver cette barque du vivre-ensemble qu’est la Tunisie nouvelle ? Une Tunisie qui apprend à produire et épargner, pour développer dans le partage et la solidarité.

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