Les municipales de la zizanie ?
Appréhendées par les démocrates comme un niveau supérieur d’exercice démocratique, proche des citoyens et à leur portée, les élections municipales sont en train de piéger, de jour en jour, l’ensemble des acteurs politiques du pays.
Dans la foulée de la révolution populaire, les élections de l’Assemblée constituante de 2011 avaient déjà piégé la trop nouvelle classe politique de l’époque, et offert le spectacle apocalyptique d’une islamisation anarchique au service d’un faux «printemps arabe» pro-wahhabite dont les conséquences sont ressenties à ce jour, ne serait-ce qu’à travers la question des jihadistes envoyés en Syrie.
Fort heureusement, les rapports de force politiques se sont par la suite apaisés et le consensus a prévalu, ramenant le navire de la IIe République à bon port, avec une constitution civile qui se tient et un parti islamiste qui compose.
Le fait est, aujourd’hui, que les différentes familles politiques se croient obligées de souscrire à d’indispensables élections municipales et/ou locales et/ou régionales, alors que le climat et l’environnement n’ont nullement été apprêtés à cette fin.
Au moment où le gouvernement d’union nationale s’efforce de remettre laborieusement le pays sur les rails, grâce à un programme consensuel qui se met doucettement en place non sans soubresauts, les divers états-majors politiques préparent fiévreusement leurs troupes en vue d’un affrontement qui se veut crucial, et les alliances les plus acrobatiques se font et se défont sous des dehors de convergence pro-gouvernementale qui devraient dédoubler les inquiétudes de l’opinion.
Sur ces entrefaites, le premier parti, celui dont est issu le président de la République et qui avait permis le rééquilibrage de l’échiquier politique, non seulement ne ressert pas ses rangs, mais tente une fuite en avant dans tous les sens qu’ont bien voulu emprunter leurs différentes fractions.
En face, le second parti corse son discours et rehausse le ton en prévision d’une montée en puissance d’un front électoral dont il serait la cible.
Mais les sages du village craignent le pire. Tous ce branle-bas de combat en vue d’un scrutin qui ne devrait pas dépasser mars prochain, pourrait-il se faire sans risques ? Sans risque de voir la quête de renouveau, de relance et de prospérité se terminer en tête-àqueue. En un embrasement électoral frontal qui emporterait l’ensemble du laborieux processus en cours.
Certes, les élections de proximité s’imposent, certes les municipalités sont une école de démocratie et de développement concerté... Mais n’est-il pas vital de préserver cette barque du vivre-ensemble qu’est la Tunisie nouvelle ? Une Tunisie qui apprend à produire et épargner, pour développer dans le partage et la solidarité.